S’il y a un portrait de Rimbaud qui me plaît et qui correspond à l’idée que je me fais du poète, c’est bien celui réalisé par Henri Fantin-Latour dans ce tableau. Assis près de son ami Verlaine ( en train de se boire un pichet de rouge à lui tout seul), il tourne le dos aux autres (Léon Valade, Ernest d’Hervilly, Camille Pelletan, Pierre Elzéar, Emile Blémont, Jean Aicard, poètes qui auront laissé une trace dans l’histoire que par leur présence dans ce tableau). Dans ce groupe des “vilains bonshommes”, il apparaît clairement qu’il n’y a que deux vrais vilains bonshommes : Verlaine et Rimbaud, le couple qui fait scandale dans le tout Paris de l’époque. Scandale et génie, tout est là.
Claude Chevreuil raconte la genèse de cette oeuvre et pour se faire, fait parler Henri Fantin-Latour, peintre réaliste faisant dans le portrait et la nature morte. On traverse avec lui les tourments de la guerre de 1870 et de la Commune de Paris. On y découvre un homme serein, prenant beaucoup de distance avec les événements, un homme qui sacrifie sa vie amoureuse pour pouvoir s’occuper de son père malade. Courtois, humaniste, il est apprécié des poètes qui se succèdent chez lui pour se confier ou pour lui faire part de leurs dernières productions. Au départ, le projet est de faire un tableau en hommage à Baudelaire (d’ailleurs ce sont les fleurs du mal que lit Ernest d’Hervilly sur la toile) et puis, le projet évolue, Arthur Rimbaud a débarqué de Charleville et à la lecture de ses poèmes, tout le monde comprend que quelque chose se passe, Fantin-Latour le premier. Il décide que Rimbaud sera présent sur la toile, qui finalement s’intitulera un coin de table.
Dans la foulée, parce que j’aime bien fouiner dans les limbes de la littérature, j’ai lu un roman de l’un des autres vilains bonhommes, celui en haut-de-forme et qu’on voit de profil. Personne ne se souvient de lui, il s’agit de Pierre Elzéar et j’ai trouvé sur le site de la bnf, un de ses romans : la femme de Roland. Je l’ai lu cet après-midi, c’est une sorte de huis clos sentimental entre 6 personnes dont la figure principale est un vieux peintre qui devient aveugle et dont la jeune femme affriolante s’acoquine de son médecin. C’est plutôt une pièce de théâtre, ça n’a rien d’extraordinaire et en tout ça n’a rien de dérangeant, pour un vilain qu’il était censé être.
lecture : mars/avril 2012
éditions de Fallois, 281 pages
année de parution : 2010
note : 4/5
littérature française - Page 5
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CR229 : un coin de table - Claude Chevreuil
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CR227 : ce qu'aimer veut dire - Mathieu Lindon
Dans ce qu’aimer veut dire, Mathieu Lindon, fils de Jérôme Lindon, fondateur des éditions de minuit revient sur sa jeunesse dorée dans les beaux quartiers de Paris et sur sa découverte de l’amour au sein d’une bande de copains, tous plus ou moins écrivains et homosexuels. Parmi eux la figure de Michel Foucault (philosophe de renom aujourd’hui décédé que personnellement j’ai toujours confondu avec Roland Barthes, ce dernier apparaissant dans le récit également) s’impose. Michel Foucault donc, habite un appartement cossu, rue de Vaugirard je crois (la lecture date d’un mois, je ne me souviens plus des détails quoi) qui sert de lieu de ralliement pour cette bande d’amis donc quelques-uns sont en couple. Dans cet appart, on se drogue et l’on s’alcoolise tendrement et intelligemment. Mathieu Lindon qui additionne les conquêtes et les expériences noue une relation amicale très profonde avec Michel Foucault...amitié, amour, difficile à dire...car pas de relations charnelles mais quelque chose au dessus de tout, faite de pudeur, de fascination et d’attirance.
C’est un peu longuet par moments, surtout dans la première partie. Dans la seconde , Michel Foucault emporté par le sida (les événements se passent dans les années 80) n’est plus. Mathieu Lindon prend du recul par rapport à cette période un peu folle de sa vie. Il revient sur sa relation compliquée avec son père, sur la difficulté d’être le fils de, sur sa carrière professionnelle.
Au bout du compte, je ne sais pas si Mathieu Lindon parvient à répondre à la question qui fait le titre du livre...je dirais même qu’au contraire il nous embrouille l’esprit, si bien que je me demande si avec ce titre, il n’a pas voulu faire dans l’ironie. Le style est raffiné sans être trop précieux. La démarche de l’écrivain est vraiment courageuse tant il se met à nu sans omettre les parties les plus immorales.
D’aucuns diraient qu’il s’agit d’un récit d’apprentissage. Je plussoie d’aucuns et m’en veut d’avoir tacher la couverture de ce livre dès le début de la lecture. Il n’y a pas que les claviers qui attirent le liquide, il y a aussi les livres que l’on voulait garder en bonne place dans sa bibliothèque.
lecture du 19.01 au 28.01.2012
P.O.L, 311 pages
année de parution : 2011
Prix Médicis
note : 3.5/5 -
CR226 : Skoda - Olivier Sillig
J’ai lu ce petit livre en deux heures il y a presque un mois. Mais il m’a suffisamment marqué pour ne pas disparaître dans les limbes de ma mémoire défaillante.
Allongé sur une route, un soldat sort d’un état inconscient. Autour de lui gisent par terre tous ses compagnons d’armes, tous victime d’un raid aérien. Plus loin, à l’intérieur d’une voiture démembrée, il constate que les deux occupants adultes sont morts. Dans les bras de la femme, un nourrisson par contre vit. Le soldat - qui s’appelle Stjepan - décide de poursuivre sa route mais une voix intérieure lui demande de prendre le bébé. Ce qu’il fait. Comme la voiture est une skoda, il décide de l’appeler Skoda. Stjepan ne connait rien en bébé. Il ne cherche même pas à savoir si c'est un garçon ou une fille. Il poursuite sa route dans un pays en guerre. Jamais nommé, peut-être en Europe, peut-être ailleurs. Il croise une sorte de douanier qui le viole et puis il trouve refuge dans un village où ildonne un coup de main aux travaux de la ferme (car les hommes sont absents). On prend soin de lui et de son bébé. Au passage, on le dépucelle. Mais la guerre étant, les morts s’alignent et le duo quitte précipitamment le village à feu et à sang.
A l’approche d’une grande ville, Stjepan et Skoda sont pris en stop par un brave type qui conduit un camion de lait. Mais une attaque aérienne survient....et puis, ça finit d’une certaine façon.
C’est un livre merveilleusement poétique dans lequel, avec une grande économie de moyen, l’auteur nous narre la cruauté de la guerre et les moments de douceur et d’humanité profonde propres aux périodes tragiques.
lecture : début janvier 2012
Buchet-Chastel, 110 pages
année de parution : 2011
note : 4.5/5 -
CR224 : l'art français de la guerre - Alexis Jenni
S’il l’art français de la guerre n’avait pas remporté le plus célèbre prix littéraire français, je ne l’aurais jamais lu, tout juste aurais-je parcouru sa 4ème de couverture et alors, j’aurais passé mon chemin. Mais voilà, il y a quelques années, je me suis juré de lire tous les nouveaux goncourt (l’année suivante la consécration des bienveillantes, ouf j’ai eu chaud), alors celui-là n’a pas fait exception à la règle. Car non seulement le sujet ne m’intéressait pas (les guerres subies et menées par la France dans la deuxième partie du XXème siècle à travers le regard du Victorien Salagnon, un soldat-peintre qui les aura toutes faites), en plus c’est un pavé de 630 pages et enfin, on peut dire que la critique l’a diversement appréciée, voire même ignorée (télérama ne l’a même pas chroniqué).
Ce roman n’a donc rien pour lui...à part d’être le Goncourt 2011 (et encore, est-ce un gage de qualité ?).
Lecture vient d’être faite...en 15 jours..avec des hauts et des bas, des moments d’agacement, d’autres d’ennuis et puis certains autres plus exaltants. des sentiments variables donc mais globalement quand même un certain malaise devant cette France telle que décrite par Alexis Jenni. Ce n’est pas tant le rappel de ce que furent les méthodes employées par l’armée française lors des guerres coloniales (qui n’ont rien à envier aux méthodes des khmers rouges) mais c’est cette description de la France contemporaine uniquement axée sur les problèmes de violence urbaine, d’émeutes dans les banlieues, de cohabitation entre les “races” etc. On a vraiment l’impression à lire ce livre que la France de 2010 est devenu un pays de non-droit, où les gens ont peur et se calfeutrent. Des groupes armés s’organisent pour tenter de maintenir l’ordre (telle la bande de Mariani à Voracieux-les-Bredins). Le propos de Jenni est de dire en quoi le poids de l’histoire se ressent dans le présent, d’où l’explication de cette violence généralisée. Soit. Mais j’ai vraiment trouvé cette vision de la France d’aujourd’hui un peu restrictive.
D’un autre côté, le héros du livre, Victorien Salagnon n’est pas si inhumain que son parcours pourrait le faire penser. A plusieurs reprises, on le sent dégoûté par les méthodes employées par ses camarades. Et Il trouve dans la peinture à l’encre ce supplément d’âme qui le rend différent des autres. Victorien Salagnon représente le compromis entre la rigueur de l’armée et une certaine élégance française, ce en quoi il peut servir de modèle au narrateur du roman, un type un peu désabusé et en quête d’identité, à qui il apprend à peindre.
Un pavé qu’on parvient à terminer ne peut pas être foncièrement mauvais (je viens encore de caler sur le tambour de Gunter Grass) mais c’est quand même une lecture fastidieuse. En bon petit soldat de la littérature, il m’a fallu de la discipline (50 pages par jour au minimum) pour vaincre l’ennemi. Je signe la fin des hostilités.
Et voici la critique d'une étudiante bretonne....de 18 ans. La France a de l'avenir !
lecture : du 02.01.2012 au 15.01.2012
Gallimard, 632 pages
année de parution : 2011
note : 2.5/5 -
CR223 : le système Victoria - Eric Reinhardt
En 2007, j’avais eu un véritable coup de coeur pour Cendrillon, et j’en avais beaucoup parlé sur ce blog. Tous les blogueurs ont un peu comme ça leur auteur fétiche dont ils lisent tout. Entre temps, j’avais lu le moral des ménages qui m’avait laissé sur ma faim mais qui écrit avant Cendrillon, l’annonçait déjà.
Voici donc, le système Victoria le dernier opus de Eric Reinhardt, sorti en août 2011 et que j’ai décidé de ne pas lire tout de suite tout comme on patiente devant un bon plat afin d’aiguiser l’appétit.
Résumé : David Kolski, directeur de travaux est marié avec Sophie. Le couple a deux enfants. David est à la tête d’un chantier énorme : la construction de la plus haute tour de Paris. Un jour, par hasard, dans une galerie marchande, il a un coup de foudre pour Victoria de Winter, une magnifique quadragénaire, drh d’un groupe international de 12000 personnes et marié à un violoncelliste. Les deux amants se retrouvent dans des chambres d’hôtel luxueuses que loue Victoria : on boit du champagne, on parle politique (elle est de droite et lui de gauche), et surtout on fait l’amour de façon totalement débridée. Professionnellement parlant, David subit les pressions du prometteur immobilier du fait du retard pris par le chantier. Victoria, quant à elle, voyage sur tous les continents et doit entre autres s’occuper d’une fermeture d’usine en Lorraine.
Dès le début du roman, on est informé de la fin tragique de Victoria mais on ne sait pas pourquoi et comment. On sait juste que David n’y est pas totalement étranger mais on sait aussi qu’il n’est pas coupable. Petit à petit, l’auteur tisse sa toile. Il en profite, à travers le parcours des deux tourtereaux, pour nous rappeler ce qu’il pense du système libéral, de l’impasse dans lequel il nous mène (toile de fond de Cendrillon également). Victoria, dans son combat quotidien avec les syndicats symbolise cette fuite en avant, ce jusqu’auboutisme et ce jusque dans sa sexualité dont elle ne s’interdit rien. Pendant qu’elle plane dans des sphères luxueuses de la jet-set planétaire, David (qui n’est pas trop à plaindre quand même avec son salaire de 4000€) est englué dans le cambouis de sa Tour Uranus. Il subit mais retrouve de la vigueur grâce à sa relation avec Victoria. Les deux amants en veulent toujours plus....jusqu’au drame final...
Bien que ce roman soit passionnant, qu’il se lise comme un polar et qu’on ne s’ennuie pas un instant (mention spéciale pour les pages où il est question de la maladie de la femme de David), j’ai trouvé que l’auteur caricaturait beaucoup les choses (mais peut-être force-t-il volontairement le trait). Cette Victoria est vraiment "trop" pour être crédible : trop belle, trop raffinée, trop intelligente, trop “bonne”, trop cultivée, trop bien placée. David, lui est la caricature du bobo de gauche (ceci dit , ce type de bobos existe vraiment, c’est ce qui m’attriste...). Jusque la destination finale de David qui après le drame, seul et déprimé va s’enterrer dans un hôtel situé dans ...la Creuse, on ne fait pas plus cliché .
Ceux qui n’ont pas aimé Cendrillon n’aimeront pas plus celui-là. Quant à moi, modeste smicard de province dont le monde écrit dans ce roman est totalement étranger, j’ai dévoré ses 522 pages en quelques jours, dont les 400 dernières le jour de l’an. J’aime cette introspection très poussée dont font preuve les personnages, cette auto-analyse qu’ils s’imposent, un peu à la manière de Milan Kundera, disais-je à Gambetti, mais en développant même plus. La prose de Reinhardt n’est pas minimaliste. Au contre, elle est ample et vertigineuse...et allez, je l’utilise..JUBILATOIRE. Par ailleurs, par rapport à Cendrillon, le système Victoria est plus classique dans sa construction. Pas de multiplication du même personnage cette fois ci mais un récit palpitant, enlevé qui ne laisse pas indifférent.
Malgré les quelques réserves, un coup de coeur encore une fois !
lecture : du 28.12.2011 au 01.01.2012
stock, 522 pages
année de parution : 2011
note : 4.75/5 -
CR222 : autoroute - François Bon
S’embarquer sur l’autoroute. Partir de Paris, et ne jamais sortir de l’autoroute. Pour la beauté des paysages. Quand on descend vers le sud, quand on remonte vers l’est, comment ça se transforme, les plantes, les reliefs. On s’arrête à chaque parking, chaque péage, chaque station-service, on parle avec les gens. On leur demande de nous parler.(p7)
Deux types décident de faire un reportage de sept jours sur l’autoroute A6. L’un, Verne filme et l’autre, François Bon le narrateur, écrit. . On suit les deux routards d’aires en aires, de péages en péages. Les deux compères captent tout, le banal et l’insolite, comme par exemple ce couple sur une aire de repos qui recherche une alliance balancée quelques mois plus tôt suite à une dispute mais depuis ça va mieux alors équipé d’un détecteur de métaux, le mari ne désespère pas de trouver. Il y a aussi ce type qui du fait de problèmes conjugaux se refuse à quitter l’autoroute....quelques tranches de vie comme ça qu’on n’imagine pas lorsqu’on emprunte les autoroutes et qu’on ne fait pas attention à autre chose qu’à sa route et sa destination. Et puis, François bon dont on connaît le talent pour ce type de littérature, parvient même à rendre la chose poétique :
“la station service Fina Dijon nord a ceci de particulier qu’elle s’inscrit dans une courbe montante, qu’on l’aperçoit donc de très loin comme juste déposée par hélicoptère sur les champs très verts, le grand auvent blanc éclairé dans le plein jour et la boutique comme un intérieur offert et brillant.” (p85)
voire même parfois, à faire rire..moi en tout cas, ce passage où il interroge le type qui s’occupe de l’entretien d’une aire de repos :
“le pénible, en fait, c’est les gazons à tondre. Je n’aime pas tondre le gazon. Je conduis la tondeuse, je roule dans un sens, je roule dans l’autre sens, et à quoi ça ressemblera toujours : un vieux tapis mité, où personne ne s’essuie les pieds. Je fais des variantes, au milieu trois fleurs, au bord quelques herbes sauvages et qui le regarde, qui me dira merci ? Si je ne tondais plus ce gazon, qui viendrait me le reprocher, et pourtant c’est le règlement, mercredi et vendredi : tondre le gazon....(p32).
François Bon nous prouve que la littérature peut trouver matière dans le quotidien, voire même le sublimer, un peu comme il le fit quelques temps plus tard avec Paysage Fer. Il y a une cohérence dans son oeuvre, quelque chose de résolument moderne. Et il ne faut pas s'étonner que le même homme soit l'un des plus vibrants acteurs et défenseurs de la littérature numérique.
Et à ce propos, je me souviendrai toute ma vie de autoroute pour avoir été ma première lecture sur liseuse (kindle). J’en reparlerai peut-être si le choeur mendie.
lecture : décembre 2011
publie.net , 168 "pages"
année de parution : 1998 (papier)
note : 4/5
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CR221 : Limonov - Emmanuel Carrère
Après d’autres vies que la mienne que j’avais beaucoup aimé, Emmanuel Carrère nous concocte la biographie d’Edouard Limonov, un écrivain russe, aventurier, va-t-en guerre et surtout patriote et opposant au pouvoir en place en Russie (quel qu’il soit). Personnalité complexe, Limonov dérange autant qu’il séduit et j’avoue qu’après la lecture des quasi 500 pages composant ce récit, je ne sais trop que penser de lui...par contre, ce dont je suis sûr c’est que sa vie tumultueuse romanesque vallait bien un hommage et je salue à nouveau le talent de Carrère car le récit est rondement bien mené, façon roman, avec quelques effets de manche (que j’appelle moi l’énergie romanesque). Carrère parvient subtilement à garder sa neutralité, faisant part de son admiration parfois, de son dégoût aussi devant les actes et paroles de Limonov. Ce faisant, cette biographie nous plonge dans l’histoire de la Russie contemporaine de l’ère brejnev à l’ère Poutine. L’écrivain en profite pour égratigner un peu les pays occidentaux et notamment l’Europe qui serait à son sens trop sûre d’elle-même, de son modèle et de ses valeurs. On sent que sur ce point, il rejoint un peu les idées de Limonov (qui pour l’anecdote finira néo-bolchevique). Il apparait d’ailleurs que derrière son côté un peu lisse et politiquement correct de gauche, la personne de Carrère (qui se met un petit peu en scène, forcément, c'est un écrivain français, y'a rien à faire, ils ne peuvent pas s'empêcher -) est plus complexe qu’elle en a l’air.
Biographie vraiment passionnante qui donne envie de découvrir la plume de Limonov.
lecture : décembre 2011
P.O.L, 489 pages
année de parution : 2011
note : 4.5/5Limonov, un petit air de Lénine ?
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CR220 : lac - Jean Echenoz
Jusque là, Jean Echenoz ne m’avait jamais déçu et donc je me suis dit que pour ce retour en littérature après deux mois d’errance, le plus judicieux était de repartir avec cette valeur sure de la littérature française, auréolée d’un prix goncourt à la fin du siècle dernier avec son roman je m’en vais que j’avais adoré (et je note au passage que cette trêve indépendante de ma volonté ne m’a pas guéri du syndrome des longues phrases qui se veulent subtiles mais qui en fin de compte sont pédantes et qui doivent être assez désagréables pour les deux ou trois lecteurs qui me restent - sachez que je vous aime, tous autant que vous êtes, sauf les spams qui me disent que des choses gentilles mais qui ne sont pas des vrais gens et ça c’est un peu embêtant-).
Jean Echenoz donc, un roman assez court en plus, cocktail idéal pour s’assurer un retour gagnant avant des choses plus ambitieuses (comme l’atteste ce tambour à gauche, peu engageant et pourtant si tentant).
Hélas, je n’ai pas réussi à m’intéresser à cette parodie d’affaire d’espionnage, si ce ne sont les quelques formules typiquement échenoziennes qui font mouche. Alors pour faire dans le jeu de mot facile, je dirais que j’ai coulé dans ce lac mais ce n’est pas trop grave car au moins j’ai lu mon premier livre de cet automne 2011.
Tant que j’y pense, s’il y en a qui sont tentés par lire, un chateau un forêt de Norman Mailer(sorti en 2007), roman qui parle de l’enfance d’Adolf Hitler, et bien j’ai envie de vous dire de passer votre chemin...mais après tout les gens font ce qu’ils veulent.
Tant que j’y pense aussi, je lirai le système Victoria de Eric Reinhardt après les fêtes. J’espère qu’il me procurera les mêmes émotions que Cendrillon.
lecture : novembre 2011
minuit, double, 191 pages
année de parution : 1989
note : 1.5/5 -
CR218 : un cirque passe - Patrick Modiano
Je me souviendrai tout ma vie de la première fois que j’ai vu Patrick Modiano à la télévision. Il était l’invité de l’émission apostrophe (ou était ce déjà bouillon de culture) et présentait son nouveau livre intitulé un cirque passe. Nous étions en 1992 et je ne le connaissais que de nom. On avait à la maison un vieux bouquin de lui que je n’aurais jamais eu l’idée de lire. J’étais étudiant à Rennes depuis quelques mois, quelques semaines peut-être. Je ne rentrais dans la demeure familiale que le vendredi soir et ma soeur qui était encore au lycée avait plein de questions à me poser sur la vie à Rennes. Je ne sais pas si je lui disais la vérité car je ne foutais rien en fac et je ne suis pas sûr de le lui avoir dit. Exemple de mon jemenfoutisme : j’ai dû mettre plus d’un mois avant de trouver du premier coup la route me permettant de me rendre à la fac depuis mon logement universitaire.
Le vendredi soir, je rentrais à Berloch avec ma vieille bx et nous discutions avec ma soeur jusqu’au milieu de la nuit en buvant café sur café et puis on regardait donc cette émission de Bernard Pivot. Je ne lisais pas beaucoup en ces temps-là, à part Rimbaud et Baudelaire mais je m’intéressais quand même à la littérature et ma soeur également qui était en terminale L.
Un soir, Patrick Modiano est apparu. C’était incroyable. iI était incapable de sortir une phare correcte. Je le vois encore en train d’expliquer “oui, un cirque passe, bon..comme ça, vous voyez, il y a des cirques etc.” C’était vraiment incroyable.
19 ans plus tard, voici que je lis ce roman dans lequel aucun cirque ne passe. C’est un très bon Modiano. De toute façon, ils sont tous bons. L’univers de cet écrivain me plait. Je le range vraiment dans une catégorie à part..Ce sera tout pour ce soir.
lecture du 17.08 au 19.08.2011
folio, 153 pages
année de parution : 1992
note : 4.5/5 -
CR217 : mémoires d'Hadrien - Marguerite Yourcenar
Marguerite Yourcenar trouva un jour cette phrase, dans la Correspondance de Flaubert : " Les dieux n'étant plus, et le Christ n'étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc Aurèle, un moment unique où l'homme seul a été. " Et l'auteur de Mémoires d'Hadrien ajoute : " Une grande partie de ma vie allait se passer à essayer de définir, puis à peindre, cet homme seul et d'ailleurs relié à tout. "
Marguerite Yourcenar nous propose de retracer toute la vie de l’empereur romain Hadrien. L’écrivain imagine un long récit écrit par l’empereur au crépuscule de sa vie à l’attention de Marc-Aurèle, son jeune protégé en qui il voit un futur empereur. Nous sommes en 117 après JC, l’empire est à son apogée.
Le résultat est édifiant. Je ne connaissais pas Yourcenar mais il ne m’a pas fallu beaucoup de pages pour être conquis par son style raffiné en même temps que fluide. C’est un plaisir de tous les instants. Dans cet exercice de haute voltige, nous faisons la connaissance d’un grand humaniste, épris de justice et de paix, sévère avec lui même, amoureux d’art, de belles choses (et de beaux hommes) et dont la vie n’aura eu qu’un but : servir le mieux qu’il soit possible le peuple romain.
Le récit fourmille d’anecdotes et de réflexions sur le pouvoir, les religions ( Hadrien considère la religion catholique qui en est à ses balbutiements comme une secte dangereuse), l’amour, la mort.
Mais malgré le travail de documentation important qu’on devine derrière tout ça, je n’ai jamais pu me départir du fait que le point de vue de Yourcenar est forcément très subjectif et j’ai trouvé par exemple que l’auteur prêtait à Hadrien des idées que seul le recul de l’histoire dont elle disposait pouvait avoir fait naître. Elle a eu sans doute conscience de tout cela mais rien n'y fait, je n'imagine pas Hadrien avoir comme philosophes et poètes préférés ceux-là même que l'histoire a gardés.
A plusieurs moments, en lisant ce livre, je me suis dit “quand même, quel grand esprit cet Hadrien !” en mettant de côté la part de fiction dans tout cela. Il n’en reste pas moins que la valeur documentaire de ce récit est indéniable. Pour finir, je laisse la parole à l’empereur.
P123 : je doute que toute la philosophie du monde parvienne à supprimer l’esclavage : on en changera tout au plus le nom. Je suis capable d’imaginer des formes de servitude pires que les nôtres, parce que plus insidieuses : soit qu’on réussisse à transformer les hommes en machines stupides et satisfaites, qui se croient libres alors qu’elles sont asservies, soit qu’on développe chez eux, à l’exclusion des loisirs et des plaisirs humains, un goût du travail aussi forcené que la passion de la guerre chez les races barbares.
lecture du 19.08 au 23.08.2011
Gallimard, 303 pages
année de parution : 1951
note : 4.5/5