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littérature française - Page 8

  • CR120 - les nudités des filles - Jean-Michel Rabeux

    nudites_filles.jpgrésumé : Un metteur en scène de théâtre vit depuis trente-cinq ans une passion amoureuse avec Camille, une comédienne. Il craint sans cesse de la perdre et conjure l'angoisse de sa disparition de différentes manières, jusqu'à fantasmer sa mort. Un chant d'amour et le portrait d'un homme travaillé par le lien intime entre l'amour et la mort. (source : éditions du Rouergue)

    mon avis : dans ce récit bizarre composé de courts chapitres commençant quasiment tous par "si" et ne comportant aucun point (décidément, on en veut bcp à ce point...), j'ai cru comprendre que l'auteur était obsédé par l'idée de la mort, qu'il était amoureux d'une Camille, que cette Camille était une fille un peu déjantée qui n'avait pas peur de se mettre intégralement nue devant un inconnu et ce, sans baisser les yeux. J'ai cru comprendre aussi que l'auteur faisait du théâtre ou du moins qu'il mettait en scène et que c'est en cherchant une actrice d'accord de jouer nue qu'il a trouvé Camille et qu'une histoire d'amour à commencé. J'ai cru comprendre aussi que Camille tombait malade et qu'elle décidait de se suicider en se jetant à la mer d'un bateau dans lequel elle se trouvait avec l'auteur.
    Et si vers la fin du roman, il est question de la prison de Fresnes dans laquelle se trouve l'auteur, est-ce par parce que "les français" le jugent coupable de la mort de Camille ? Et si je mets "les français" entre guillemets, ce n'est pas pour rien, c'est par ce que l'auteur semble avoir un soucis avec "les français", ce qui semble laisser supposer qu'il n'en est pas un et qu'il a eu maille à partir avec les habitants de cette nation qu'est la France.

    Mais dans les dernières pages, Camille est toujours vivante et l'auteur toujours aussi barré, à tel point qu'il veut la tuer avec un couteau, mais il se ravise et semble préférer l'étouffer..mais y arrive-t-il ? extrait

    je l'embrasseJM Rabeux.jpg, c'est à dire lui pose un baiser sur les lèvres, et puis je l'embrasse, c'est à dire, je la serre dans mes bras contre moi, l'appuie contre moi de mon bras droit, de ma main gauche je prends le gros oreiller qu'elle aime caler derrière elle pour lire
    elle dit ses mots, ces mots : si tu le fais, fais-le bien, elle sourirait, je la connais tant, je connais tant son enfante gravité dans les moments terribles de la vie, la gravité de ce sourire qu'elle aurait, je sais qu'elle sourirait

    je le fais, je le fais très bien, elle m'emmène
    (fin du récit)

    Mon esprit trop cartésien s'est pris la tête à essayer de comprendre des choses et des faits qui n'existaient en fin de compte sans doute que dans les délires et les fantasmes de l'auteur.
    Et puis enfin, j'ai trouvé le titre les nudités des filles assez mauvais. A la limite, la nudité des filles aurait mieux passé (encore que ce titre ne signifie pas grand chose au regard du contenu). Donc, à cause de ce mauvais titre, ce sera 2.5 au lieu de 3 (qu'aurait quand même mérité cet espèce de long poème en prose pas si mal goupillé).

    roman, paru en 09/2008
    éditions du Rouergue, 142 pages
    lecture du 04/10 au 07/10/09
    note : 2.5/5
    à venir :

  • CR119 - formation - Pierre Guyotat

    9782070379804.jpgprésentation de l'éditeur : Ce récit raconte la formation sensorielle, affective. intellectuelle et métaphysique d'un enfant né au tout début de la Deuxième Guerre mondiale, en France, dans un village du Sud-Est, dans une famille ancienne, catholique et sans fortune. Je l'ai écrit comme la plupart de mes textes à l'indicatif présent : a très peu près. Les sentiments, les interrogations. les pensées sont d'un enfant qui ne cesse de questionner ses aînés puis d'un adolescent qui, à quatorze ans. décide d'écrire, les idées. les convictions, les tourments qui s'y manifestent sont ceux de son entourage de son temps dans ses lieux.

    mon avis : J'ai trouvé ce récit assez long à l'allumage, un peu trop descriptif et puis au fil des pages la "formation" de Pierre, fils de petits bourgeois catholique de Bourg-Argental (département de la Loire) prend toute sa mesure et gagne en densité. Formation avant tout  spirituelle mais aussi sexuelle, ce en quoi je lui ai trouvé des ressemblances avec le lumineux l'âge d'homme de son ami Michel Leiris (qui est celui par qui j'ai découvert l'existence de Guyotat - car Michel Leiris tout en étant une fin en lui-même permet d'ouvrir également quelques  portes).
    Pierre Guyotat né en 1940, évoque les années d'après-guerre, les privations et l'histoire du monde (la guerre froide) vu de la France profonde, ses années de collège, de pensionnat, son éducation religieuse et puis petit à petit sa conversion à l'athéisme (assez brutal alors qu'il fut un enfant et un adolescent très pieux).
    Au final, PG nous livre une autobiographie de ses jeunes années agréable à lire et fourmillante d'anecdotes.
    Coma du même auteur fait par ailleurs partie de mes projets de lecture.

    extrait : refusant toute classe de gymnastique et tout jeu de ballon, je passe beaucoup de temps dans les latrines du préau, le temps du moins que le cours s'épuise : j'ai tout loisir alors, dans la tension, de lire, de dessiner, de sentir et de regarder les excréments, la coulés de ceux qui m'ont précédé - la forme des étrons c'est la forme des culs -, les virgules de merde et les vers qui se tordent sur les murs, l'excitation des mouches, et j'y ressens beaucoup mieux mon corps, dans ce quoi il est promis, sexe - et si par une oeuvre il devenait public ? - et mors. Plutôt avoir le nez dedans que d'obéir aux sifflets du gymnaste en survêtement. (p204)

    autobiographie, parue en 09/2007
    folio n°4888, 220 pages
    lecture du 24/09 au 03/10/09
    note : 3.5/5
    à venir :

     

    pierre-guyotat-et-le-mississippi.jpg

     

     

     

  • CR117 - ritournelle de la faim - J.M.G Le Clézio

    9782070122837FS.gifle mot de l'éditeur : Prix Nobel de littérature 2008
    Ma mère, quand elle m'a raconté la première du Boléro, a dit son émotion, les cris, les bravos et les sifflets, le tumulte.
    Dans la même salle, quelque part, se trouvait un jeune homme qu'elle n'a jamais rencontré, Claude Lévi-Strauss. Comme lui, longtemps après, ma mère m'a confié que cette musique avait changé sa vie. Maintenant, je comprends pourquoi. Je sais ce que signifiait pour sa génération cette phrase répétée, serinée, imposée par le rythme et le crescendo. Le Boléro n'est pas une pièce musicale comme les autres.
    Il est une prophétie. Il raconte l'histoire d'une colère, d'une faim. Quand il s'achève dans la violence, le silence qui s'ensuit est terrible pour les survivants étourdis. J'ai écrit cette histoire en mémoire d'une jeune fille qui fut malgré elle une héroïne à vingt ans.


    mon avis : Lorsqu'on lit un roman d'un prix nobel, on en attend forcément un peu plus que les autres et en particulier de Le Clézio dont le talent n'est plus à prouver et dont à titre perso je garde un lointain mais exquis souvenir de la quarantaine, roman publié quelque part dans les années 90 et que j'avais lu un peu par hasard, le livre ayant atterri dans la bibliothèque paternelle en provenance de France Loisirs dont ce devait être peut-être la sélection du mois, qu'en sais-je aujourd'hui.
    Mais cette ritournelle de la faim m'a laissé sur ma faim - pardon pour le jeu de mots- . Il s'agit de l'histoire un peu banale d'une famille bourgeoise (sur le déclin) d'origine mauricienne installée à Paris, racontée par Ethel, la fille unique. Si les premières pages sont très poétiques (relation d'Ethel avec son oncle dont j'ai oublié le nom et la folle idée de cette cabane de type créole que le-dit oncle voulait construire sur un terrain au coeur de Paris), le reste n'a pas grand intérêt. A travers les péripéties de cette famille au prestige déclinant (du fait des mauvais placements et de la paresse d'Alaxandre, le père) ; Le Clézio nous fait traverser la deuxième partie du XXème siècle en ne faisant qu'effleurer à peu près tout et personnellement je pense qu'il manque 500 pages à ce roman. 500 pages de plus, en gardant la même trame mais en fouillant un peu plus les gens et l'histoire (un peu comme peut le faire Philip Roth), ça aurait fait un beau roman.
    Voilà que je commence à donner des conseils à un prix nobel. Mais où va-t-on ?
    Mais je pense aussi que Le Clézio n'est plus Le Clézio dès lors qu'il quitte son île Maurice ou autres contrées exotiques mais  on conçoit qu'il ait voulu faire différemment pour une fois. Mais ça n'enlève rien à la qualité et l'originalité de toute son oeuvre (d'ailleurs Désert fait partie de mes projets de lecture moyen-long terme).

    roman, paru en 10/2008
    Gallimard, 206 pages
    lecture du 07/09 au 12/09/09
    note : 2.5/5
    à venir : les charmes discrets de la vie conjugale, Douglas Kennedy

  • rentrée littéraire 09, suite

    9782283023488.jpgEt il faut peut-être rajouter l'annonce de Marie-Hélène Lafon. Bonne critique de toutes part, tout arrive sur france culture entre autres et celle de télérama (par Christine Ferniot) dont voici la fin :

    Sa fiction devient d'une redoutable puissance grâce au rythme de ses phrases longues, tantôt pressées, tantôt languides. Elle déniche le mot juste qui cingle, l'adjectif qui hypnotise, la ponctuation qui rend la phrase vertigineuse. Ce septième livre est le plus abouti, le plus apaisé, plein de silences, de pudeurs et de désirs.

    Ce qui donne envie de courir l'acheter ou plutôt me concernant de cliquer l'acheter. Ce qui va être fait dans la minute.


    interview pour fnac.com :
  • rentrée littéraire 09

     

    beaune.jpg

    La France est le pays du monde qui compte le plus d'écrivains par habitant et c'est celui aussi où ils sont le plus talentueux. Ce qui n'est pas pour me déplaire car je préfère qu'on ait de bons écrivains que de bons sportifs (mais si c'était possible d'avoir les deux, ce serait mieux). La littérature sublime la vie, nous aide à vivre et à mourir alors que le sport sert à se voiler la face, à lutter vainement contre le temps qui passe. Mais c'est vrai que j'aime le sport et plus que de raison même. Mais il n'en reste pas moins que je suis conscient que le sport est un leurre.
    Voilà pourquoi il ne faut pas prendre à la légère la rentrée littéraire dans un pays comme la France. Et voilà pourquoi aussi il est difficile de faire son choix (je sais, c'est un peu tarte à la crème de dire qu'"il est difficile de s'y retrouver dans les 600 romans de la rentrée"). Et comme on ne peut pas tout lire, il faut faire des choix.

    . Un homme louche de François Beaune me tente bien. Parce qu'il y a des bambous en arrière plan de la photo promotionnelle ;

    . Des hommes de Laurent Mauvignier car c'est la seule sortie des Editions de Minuit et que les Editions de Minuit sont chères à mon coeur ;

    . Demon de Thierry Hesse pour l'ambition et parce qu'un peu dans l'esprit du sublime zone de Mathias Enard ;

    . Hors-champ de Sylvie Germain parce qu'il faut une dame et que l'histoire un brin kafkaienne de cet homme qui devient invisible est assez tentante ;

    . L.A Story de James Frey parce qu'il faut un roman étranger ;

    . Un coeur intelligent de Alain Finkielkraut parce qu'il faut un essai, parce que Finkielkraut est brillant et parce qu'il nous dit ici son amour de la littérature.

     

  • CR115 - Alabama song - Gilles Leroy

    9782070359844FS.gifle mot de l'éditeur : "Les garçons des clubs, les jeunes officiers du mess, je les tiens dans ma main gantée de fil blanc. Je suis Zelda Sayre. La fille du Juge. La future fiancée du futur grand écrivain.
    Du jour où je l’ai vu, je n’ai plus cessé d’attendre.
    Et d’endurer, pour lui, avec lui, contre lui."

    Montgomery, Alabama, 1918. Quand Zelda, « Belle du Sud », rencontre le lieutenant Scott Fitzgerald, sa vie prend un tournant décisif. Lui s’est juré de devenir écrivain : le succès retentissant de son premier roman lui donne raison. Le couple devient la coqueluche du tout New York. Mais Scott et Zelda ne sont encore que des enfants : propulsés dans le feu de la vie mondaine, ils ne tardent pas à se brûler les ailes…
    Gilles Leroy s’est glissé dans la peau de Zelda, au plus près de ses joies et de ses peines. Pour peindre avec une sensibilité rare le destin de celle qui, cannibalisée par son mari écrivain, dut lutter corps et âme pour exister…
    Mêlant avec brio éléments biographiques et imaginaires, Gilles Leroy signe ici son grand « roman américain ».


    mon avis : Alabama song est un petit bijou de roman que j'ai lu dans un état de grande jubilation (et d'ailleurs dans la foulée, je me suis dégoté le seul roman de Zelda traduit en français (accordez-moi cette valse) et puis tendre est la nuit de Scott).
    Alors donc, le narrateur est Zelda et c'est la grande prouesse de l'auteur qui d'avoir si bien réussi à se mettre dans sa peau le temps de 200 pages. On s'y croirait, on croirait vraiment que c'est Zelda qui s'exprime tant le tout est raconté avec naturel et sincérité. Maintenant, bien sûr il s'agit plus d'une fiction que d'une biographie. Mais on apprend beaucoup sur les années 30, sur le couple Fitzgerald évidemment, sa beauté, sa magnificence mais également ses débordements et ses excès, sur l'environnement du couple avec par exemple ce Lewis O'Connor (qui n'est autre qu'Ernest Hemingway) écrivain et ami de Scott, détesté par Zelda qui le trouve grossier, vulgaire, égoïste...
    Et la descente aux enfers de Zelda, malade et incomprise de tous (et avant tout de son mari), hospitalisée en établissements psychiatriques en Europe et aux Etats-Unis.
    Je me suis attaché à cette femme entière, délurée, amoureuse, sincère, mais trop faible, trop naïve dans cet univers littéraire trop masculin.
    Chapeau à Gilles Leroy pour ce chant d'Alabama, couronné du Goncourt en 2007. Et des Goncourt de cette trempe, on en redemande. (de toute façon, nous les français, si on n'est pas une nation sportive, on a les meilleurs écrivains du monde...c'est parce qu'on est trop introverti, qu'on n'a pas confiance en nous, sauf quand on est seul et devant une page blanche. On est comme ça nous les français, on est un peu froussard et puis on est raide comme des balais aussi mais là c'est génétique. )

    roman, paru en 08/2007
    Folio, 215 pages
    lecture du 30/08 31/08/09
    note : 4/5
    à venir : eldorado, Laurent Gaudé

  • CR114 - Dora Bruder - Patrick Modiano

    417965925_small.jpgprésentation (fnac) : Dans un vieux Paris-Soir daté du 31 décembre 1941, l'œil de Patrick Modiano est attiré par l'annonce suivante: "On recherche une jeune fille, Dora Bruder, 15 ans, 1 m 55, visage ovale, yeux gris-marrons, manteau sport gris, pull-over bordeaux, chaussures sport marron. Adresser toutes indications à M. et Mme Bruder, 41, boulevard Ornano, Paris ".
    Cet entrefilet amène l'auteur à enquêter sur cette fille et ses parents envoyés à Auschwitz en 1942. Il essaie de redonner vie à leur existence qu'il traque sur des papiers administratifs, sur des photos. Le texte se présente comme un chassé-croisé dans Paris entre présent et passé, des souvenirs de l'auteur s'entremêlant à ce qu'il découvre de la jeune fugueuse, de sa famille et des personnes qui l'ont côtoyée.
    Mais aucun document officiel ne peut restituer les occupations de Dora pendant ses fugues qui ainsi demeurent le secret de ce destin tragique décrit tout en subtilité par Patrick Modiano.


    mon avis : Vendredi dernier, avant de prendre le train Vannes-St Lô (avec changement à Rennes), je me suis demandé s'il fallait que j'embarque la délégation norvégienne dont j'avais commencé la lecture quelques jours auparavant ou alors s'il fallait que je reparte à zéro avec autre chose. Et je me suis souvenu de cet agréable moment de lecture que constitua pour moi accident nocturne de Patrick Modiano lorsque je fis le même trajet dans l'autre sens aux alentours de Noël 2007. Alors j'ai opté pour le Modiano (la délégation attendra...ou pas, j'ai beaucoup de mal avec ce livre).
    Ce qu'il y a de bien avec les romans de Modiano, c'est qu'ils se lisent très vite, le temps d'un voyage en train par exemple mais qu'ils ne sont pas de simples romans de gare. Les romans de Modiano sont quand même plus profonds que des romans de gare (mais il faudrait aussi qu'on explique ce qu'est au juste qu'un roman de gare -puisque dans les maisons de presse qu'on trouve dans les gares, il y a beaucoup de littérature en fin de compte).
    Et donc, j'ai adoré Dora Bruder. Je l'ai trouvé plus cohérent, plus envoûtant que dans le café de la jeunesse perdue, le dernier ouvrage de Patrick Modiano que je n'avais pas trouvé si réussi. Mais quand Modiano fait du Modiano, c'est à dire qu'il tripe avec les noms de rue et qu'il essaie de raviver la mémoire de gens oubliés, qui n'ont pas laissé de trace ou trop peu parce que trop banals, trop mr tout le monde etc, c'est le bonheur.
    Dora Bruder est une petite juive un peu rebelle, qui en fait voir à ses parents et qui en fin de compte se fait avoir par les allemands. Le narrateur se met à s'intéresser à elle bien qu'elle soit morte depuis longtemps, bien qu'il ne l'ait jamais connu. Et s'il s'est tout à coup intéressé par la vie de Dora, c'est qu'il est tombé par hasard sur un vieux journal d'avant-guerre dans lequel il lit une petite annonce où il est question de la fugue d'une Dora Bruder. Juste ça, ce petit fait vieux d'une trentaine d'année. Et ça fait un grand roman que j'ai lu goulûment. Car j'aime la petite musique modianesque et je ne suis pas indifférent à son délire typographique.
    Un Modiano par an, c'est tout ce qu'il me faut.

    roman, paru en 04/1997
    Folio, 145 pages
    lecture le 28/08/09
    note : 4/5
    à venir : Alabama Song, Gilles Leroy

  • CR112 : la nausée - Jean-Paul Sartre

    134700.jpgquatrième de couverture : « Donc j'étais tout à l'heure au Jardin public. La racine du marronnier s'enfonçait dans la terre, juste au-dessous de mon banc. Je ne me rappelais plus que c'était une racine. Les mots s'étaient évanouis et, avec eux, la signification des choses, leurs modes d'emploi, les faibles repères que les hommes ont tracés à leur surface. J'étais assis, un peu voûté, la tête basse, seul en face de cette masse noire et noueuse entièrement brute et qui me faisait peur. Et puis j'ai eu cette illumination. Ça m'a coupé le souffle. Jamais, avant ces derniers jours, je n'avais pressenti ce que voulait dire "exister" ».

    mon avis : Rarement je n'ai eu autant de mal à terminer un roman ! Commencé en début d'année et stoppé quelques jours plus tard après une cinquantaine de pages de laborieuse lecture, il me titillait quand même de le finir. Je l'ai repris donc ce mois d'août avec l'intention de l'achever (dans tous les sens du terme), mais je l'ai repris du début histoire de remettre les compteurs a zéro et repartir sur de bonne bases.
    Mais pourquoi me titillait-il de le reprendre ? Parce que de façon générale, je n'aime pas ne pas finir un livre, question d'orgueil et puis, parce que quand même le propos de Sartre (à travers celui de son narrateur Antoine Roquentin) m'interpellait quelque peu, me parlait quelque part, sans trop savoir comment et pourquoi.
    En effet, Antoine Roquentin, le héros de cette histoire, ou le non-héros plutôt est un type qui vit dans la ville portuaire (imaginaire ?) de Bouville et qui passe ses journées dans la bibliothèque municipale à faire des recherches sur un aristocrate un peu haut en couleur qui vécut dans la cité quelques siècles auparavant. Le but d'Antoine est d'en écrire une biographie. Et un jour, Antoine se met à avoir la nausée, une sorte de nausée en rapport avec les choses, les objets qui l'entourent et qu'il ne sait plus nommer, ne sait plus reconnaître. A partir de là, la nausée lui provoque toute une crise existentielle et son rapport aux autres et à lui-même s'en trouve perturbé.
    Je crois n'avoir pas bien compris le sens du malaise mais j'ai quand même saisi l'état d'esprit dans lequel il s'est produit. (encore l'autre jour, je regardais un robinet et je trouvais ça fou que l'objet s'appelle robinet..je le regardais ce robinet dans toute sa forme et sa profondeur et je n'arrivais plus à me persuader que la chose s'appelait robinet. Pour qui, pourquoi robinet, qui suis-je, ou vais-je.
    Et puis en fin de compte, l'existentialisme)
    Ah ! l'existentialisme ! Je n'ai jamais trop compris ce que c'était mais en lisant ce roman écrit par son théoricien, je me suis dit, je me suis dit quoi..qu'Antoine Roquentin ressemblait à tout sauf à l'idée que je me faisais d'un existentialiste. C'est à dire qu'Antoine agit très peu, subit sans cesse et chez lui l'essence semble précéde l'existence.
    C'est la raison pour laquelle je me suis senti assez proche de l'individu.
    et du coup du roman.
    enregistrement, prévisualiser, envoyer.

    roman, paru en 03/1972
    Folio, 248 pages
    lecture du 02/08 au 17/08/09
    note : 4/5
    à venir : le voyageur de la Toussaint, Georges Simenon

     

  • CR110 - Rimbaud le fils - Pierre Michon

    Rimbaud-le-fils.jpgle mot de l'éditeur : « Qu'est-ce qui relance sans fin la littérature ? Qu'est-ce qui fait écrire les hommes ? Les autres hommes, leur mère, les étoiles, ou les vieilles choses énormes, Dieu, la langue ? Les puissances le savent. Les puissances de l'air sont ce peu de vent à travers les feuillages. La nuit tourne. La lune se lève, il n'y a personne contre cette meule. Rimbaud dans le grenier parmi les feuillets s'est tourné contre le mur et dort comme un plomb. »

    mon avis : Les êtres humains sensibles à la poésie ont pour la plupart une histoire toute personnelle avec Rimbaud, un poème préféré, une théorie pour expliquer ses adieux à la littérature et une autre pour dire que même en Abyssinie, Rimbaud le trafiquant continuait d'être un poète. Et quelques-uns d'entre eux pensent que cette histoire vaut le coup d'être partagée.
    Combien de biographies, combien d'essai sur l'homme aux semelles de vent, ô saisons, ô chateaux, quel âne est sans défaut.
    Mais aussi combien de tintins (dont je fais partie) pour se moquer de toutes ces biographies qui n'apportent rien de plus que de l'oseille dans la poche de ce celui qui s'y est collé.
    Ce Rimbaud Le fils de Pierre Michon (l'occasion pour moi de découvrir cet écrivain) m'a globalement ennuyé. Style pompeux avec de longues phrases mal boutiquées et ce pour un défilé d'anecdotes plus ou moins véridiques (mais j'ai quand même apprécié le passage où il est question de la séance de photographie chez Carjat (la fameuse). Sinon, bof, rien de nouveau en Rimbaldie . (et rien à voir mais je garde un très bon souvenir des jours fragiles de Philippe Besson..que je me verrais même bien relire afin de replonger dans ses jours suspendus alors qu'Arthur revenu en ces terres natales fait de longues promenades en calèche avec Isabelle, sa soeur...exquis.)

    essai, paru en 11/1991
    Folio, 109 pages
    lecture du 26/07 au 27/07
    note : 2/5
    à venir : la pluie avant qu'elle tombe, Jonathan Coe

     

    65.jpg
  • CR109 - zone - Mathias Enard

    zone.jpgJe n'ai lu qu'une phrase de ce roman que je viens de terminer.
    Hou là, avouez que ça commence fort.
    Et pourtant, ce n'est pas une plaisanterie, c'est la vérité puisque zone ne contient qu'une phrase (avec quelques virgules mais très peu). Alors, c'est la marque des écrivains français que de vouloir faire des effets de style, de vouloir réinventer la forme etc..et certains disent que ça en devient lassant, qu'à trop soigner la forme, ils en oublient le fond. Peut-être que "certains" ont raison mais pas concernant ce roman de Mathias Enard (car sa qualité  vient avant tout de son contenu). Et si avant d'en débuter la lecture, j'étais plus que sceptique quant à l'idée de cette phrase unique, il s'avère en fait que l'absence de points est assez logique au regard de la façon dont les pensées défilent dans l'esprit du narrateur, dans un souffle et le temps d'un voyage en train. 
    Et le contenu, c'est quoi, c'est toute l'histoire de l'Europe et du pourtour méditerranéen dans ce qu'elle a de plus tragique et de plus violent, vu par un ex agent secret français d'origine croate, un brin fasciste sur les bords et qui participa aussi directement à la guerre de Yougoslavie. Le type - qui a quitté toutes ses fonctions - voyage en train en direction de Rome où il doit remettre au Vatican une valise contenant des documents compromettants, moyennant pas mal d'euros (300.000 de mémoire et comme on dirait à M6, 300.000 c'est beaucoup d'argent). Tout le voyage durant, les images se bousculent dans sa tête, s'entrechoquent, aux guerres succèdent les génocides, aux génocides les attentats et les souvenirs défilent et en appellent d'autres, ce qui fait que pour le lecteur, chaque flash ne dure pas plus de deux ou trois pages. Parfois quand même quelques considérations sur la voyage en train et les passagers servent de transition et permettent au lecteur de reprendre son souffle avant de retourner dans les affres de l'histoire.
    Quelque part, cette façon  de présenter les faits  en suivant les cheminements chaotiques, désordonnés et donc non structurés de l'esprit m'a rappelé Claude Simon qui, dans la route des Flandres procède un peu de la sorte (en plus hermétique). Mais pas vraiment Michel Butor (dont le seul point commun consiste au fait que la narrateur effectue également le voyageParis-Rome).
    J'écrivais que Claude Simon était plus hermétique, puisque malgré les apparences, la lecture de Zone n'est pas si difficile. Malgré sa longueur, la phrase se lit assez vite.
    Le roman est incroyablement bien documenté et peuplé de personnages secondaires (et souvent historiques) effroyables de haine. Mais ce qui donne sa force du récit, c'est le cynisme et le ton implacable avec le lequel s'exprime Francis Servain Mirkovic, le narrateur.
    Et je dois avouer que j'ai quitté la zone un peu bouleversé.

    roman, paru en 08/2008
    Actes Sud, 517 pages
    lecture du 16/07 au 25/07/09
    note : 4/5
    à venir : Rimbaud le fils, Pierre Michon