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littérature française - Page 10

  • CR82 - Courir - Jean Echenoz

    courir.jpgmot de l'éditeur : On a dû insister pour qu’Émile se mette à courir. Mais quand il commence, il ne s’arrête plus. Il ne cesse plus d’accélérer. Voici l’homme qui va courir le plus vite sur la Terre.

    mes avis (deux pour le prix d'un) :
    1 - Un petit Echenoz après un grand classique ne peut pas faire de mal. Courir est le dernier roman de l'écrivain qui a donc décidé après Ravel de continuer dans la veine biographique. J'ai lu pas mal de commentaires négatifs de courir qui pour beaucoup est un petit Echenoz et qui n'apporte rien de plus de ce qu'on savait de Zatopek. Ok mais perso, je ne savais rien de Zatopek avant. Donc, j'ai joins l'utile à l'agréable comme on dit avec ce bouquin que j'ai lu en une heure, temps pendant lequel le coureur a pied arrivait à parcourir 20kms. Le style Echenoz est bien toujours là par moment, par petites touches ici ou là mais est peut-être moins marqué que d'habitude au point que j'ai eu souvent le sentiment de lire une simple biographie.

    2 - Même si je n'ai pas retrouvé dans ce petit roman (lu en 1heure, c'est à dire durée pendant laquelle Zatopek parcourait 20kms), le style si particulier d'Echenoz, au moins j'ai découvert la vie et les exploits de ce Zatopek, coureur à pied tchécoslovaque hors norme de l'après-guerre. L'auteur rappelle également, et non sans une certaine ironie, les excès du communisme et la récupération par le pouvoir du phénomène Zatopek.
    Que dire de plus si ce n'est que c'est une bonne petite biographie sous-titrée quand même "roman" comme pour permettre à l'auteur de prendre quelques libertés dans les anecdotes relatées. On peut dire quand même qu' en dehors d'un travail de recherche (par exemple sur la technique du coureur à pied), Jean Echenoz ne s'est pas beaucoup "foulé" sur ce coup-là.
    On l'attend au tournant.


    lecture : le 28.03.2009
    note : 3/5
    à venir : la nausée, Jean-Saul Partre

    zatopek_qr.jpg

  • CR78 - l'absolue perfection du crime - Tanguy Viel

    v_2707319449.jpgmot de l'éditeur : Marin, Andrei, Pierre, c'étaient tous des caïds. Et dans ce monde de traîtres, leur disait l'oncle, pour que " la famille " survive, il faut frapper toujours plus fort. Alors quand Marin est sorti de prison, lui, le neveu préféré, il a dit : le hold-up du casino, ça nous remettrait à flot.

    mon avis : Contrairement à ce que laisse présager le titre, la photo en couverture ainsi que la date de naissance de l'auteur (1973...), ce polar n'a pas beaucoup d'intérêt. Il est plaisant à lire, certes le récit est haletant, j'en conviens, (comme dans tout polar qui se respecte). Mais j'ai regretté que dans une histoire aussi convenue (qui m'a rappelé les romans de José Giovanni ou certains  films avec Lino Ventura et Jean Gabin ), l'auteur n'adopte pas un ton plus décalé et plus ironique, à la façon d'un Jean Echenoz qui sait faire de grands romans avec des intrigues minimales.
    Ceci dit, je donnerai une seconde chance à Tanguy Viel. Peut-être avec Paris-Brest, son dernier roman qui fait parti de la sélection finale pour le 4ème prix du livre France-Culture Télérama. Je reparlerai dans une future note de ce prix qui associe deux médias dont je suis très friand.

    Un avis que je partage ici.

    lecture : 22/02/09
    note : 3/5
    à venir : pastorale américaine, Philip Roth

  • CR77 - insecte - Claire Castillon

    9782213625065.jpgmot de l'éditeur : Insecte évoque les rapports entre les mères et les filles. Dix-neuf nouvelles qui sont l’expression libre de sentiments intenses, de pensées fulgurantes, irréelles quelquefois, qui s’installent pourtant sans relâche dans la tête des mères et des filles. Dans ces nouvelles, les pensées fugitives deviennent des récurrences, des poids, des raisons de vivre. La mère est un insecte et la fille son insecte. Vice-versa. Mante religieuse, lézard ou coccinelle, les femmes étudiées à la loupe ont sans doute des vies à facette.

    mon avis : lecture jubilatoire s'il en est. Ce livre m'a été fortement conseillé par la bibliothécaire de Camors après que j'eus lu et approuvé une autre oeuvre de la dame. C'est un recueil de nouvelles a qui on peut accoler pas mal d'adjectifs : savoureux, brillant, fin, subtil, hilarant, glaçant, dérangeant, pétillant. Ça se boit comme du petit lait. Je conseille fortement.

    C'est ma fierté d'être français que de compter parmi mes concitoyens tant d'esprits subtils. Et modestes avec ça. Pas fiers. Les américains sont tellement jaloux de nous qu'ils s'inventent des fausses morts de la culture française, histoire de se rassurer.

    lecture les 18 et 19 février 2009

    note : 4.5/5

  • CR76 - les accommodements raisonnables - Jean-Paul Dubois

    9782879295541.jpgmot de l'éditeur : Le grand roman de Jean-Paul Dubois très attendu depuis "Une Vie française". Jean-Paul Dubois retrouve le souffle romanesque d"Une Vie française" dans ce livre qui devrait enthousiasmer ses fans. Aucun des « fondamentaux » ne manque à l’appel : Toulouse, un anti-héros (Paul Stern) et son épouse (Anna), un père encombrant, l’actuel président de la République, l’Amérique, les bateaux, les petits-enfants, etc. Cette fois, Jean-Paul Dubois nous conduit à Hollywood. Paul doit y réécrire le scénario d’un film dont il est l’auteur, pour le compte d’un producteur qui prétend en tirer un remake. En réalité, Paul est parti pour oublier la maladie de sa femme, en dépression profonde, le remariage scandaleux de son père et, de manière plus générale, son échec personnel. Embauché par la Paramount, il découvre un autre univers où le sexe, l’argent, la drogue, la célébrité, mais aussi le désespoir occupent une place centrale. Et puis, il rencontre Selma Chantz, employée comme lui par la Paramount. Et sa vie bascule. Car Selma est le double parfait d’Anna, avec trente ans de moins…Une femme fascinante et dangereuse.
    Après un détour par le comique ( Monsieur Tanner) et l’inquiétante étrangeté ( Hommes entre eux ), Jean-Paul Dubois a écrit le grand roman que nous attendions. Tragique et drôle, jetant sur son époque un regard lucide, ce livre de la maturité garde néanmoins le charme des héros de Jean-Paul Dubois, éternels adolescents écartelés entre leur amour de la vie et leur sens aigu de la culpabilité.

    mon avis : En dehors de quelques scènes hilarantes (dont celle du crématorium au début), j'ai trouvé ce livre plutôt moyen. Agréable à lire, certes mais bien en dessous de Djian (qui écrit un peu ce type de choses avec jet-setters cyniques, drogue, sexe et tout et tout), mais peut-être quand même un peu au dessus de Foenkinos (dont les romans sont anecdotiques).
    Mais il se dégage quand même du roman,  cette idée que les étapes de nos vies ne sont que des successions d'accommodements raisonnables (avec 2 m à accommodements, à bons entendeurs salut) , que pour sauvegarder les apparences, nous devons sans cesse faire des compromis et tirer un trait sur d'autres possibles.
    Par ailleurs, j'aime beaucoup la couverture. Elle m'avait tapé à l'oeil dès la sortie du livre. Et je l'aime tellement qu'elle suffirait presque à me faire acheter ce livre (que j'ai emprunté pour cette lecture) et ce même bureau avec des tiroirs que d'un côté, mais peut-être pas la même chaise, encore que, dans un certain cadre pourquoi pas. Je me demande si on ne va pas revenir à une forme de rustique après cette folie du mobilier contemporain carré et translucide façon ikea.

    lecture du 13.02 au 17.02.09
    note : 3/5
    à venir : insecte, Claire Castillon

     

  • CR10 : un livre blanc - Philippe Vasset

    9dd31d96835d343f75e1bdeb1b0d961f.jpgQuel autre livre pouvait mieux que celui-là inaugurer la nouvelle mouture de ce site ?
    ça fait un mois qu'un livre blanc m'avait tapé à l'oeil suite à une excellente critique d'un chroniqueur du nouvel obs.

    L'intention de Philippe Vasset avec cet ouvrage fut de recenser toutes les zones laissées en blanc sur les cartes ign de la région parisienne et d'aller voir sur place ce qu'étaient en réalité que ces lieux que les cartographes n'avaient pas réussi à identifier (ou voulu). Donc, le récit est découpé en quinze chapitres comme autant de zones blanches. A chaque fois, nous avons un extrait de la carte et l'on suit Philippe Vasset dans ses pérégrinations entre cabanes de sdf, entrepôts désaffectés, terrains vagues, bordures d'autoroutes, endroits bizarres. A la base, il dit être en quête de merveilleux..si si, Vasset pensait que si les cartes ne pouvaient décrire ces lieux, c'est que ces endroits étaient en dehors du descriptibles donc en dehors du réel; en dehors de la ville, en dehors du temps. Au bout du compte et très vite, il est déçu :

     

    " au bout de deux mois, j'avais complètement abandonné l'idée de faire apparaître la moindre parcelle de merveilleux : les blancs des cartes masquaient, c'était clair, non pas l'étrange, mais le honteux, l'inacceptable, l'à peine croyable..."

    Le livre est bien écrit, l'auteur trouve les mots justes pour décrire l'injuste" ou en tout cas l'inracontable. On rit même parfois quand il laisse aller son imagination devant une usine désaffectée (on imagine que le site était autrefois peuplé de scientifiques en blouse blanche devisant calmement et portant sous leurs bras des plans roulés en tube).
    Une fois refermée la dernière page, une idée vient : prendre la carte ign de l'endroit où l'on habite..je l'ai fait..et ô surprise, il n'y a quasiment que des zones en blancs..normal, les champs sont représentés en blanc. Donc, l'expérience ne marche pas pour la campagne..dommage.


    Sinon, l'écrivain prolonge l'aventure sur le site www.unsiteblanc.com

    Finissons par une petite minutes de poésie

    Le monde, c'est ce mouvement incessant entrevu par les trous de la coque de nos capitales, désormais paquebots de croisière pour le troisième âge. Sur des centains de kilomètres, ce sont des maisons à demi construites et déjà abandonnées, des bandes d'exclusion le long des frontières, des zones franches, des villes-entrepôts, des galeries commerciales et ces dalles de béton ceintes de hauts grillages où les zones de jeu peintes sur le sol sont depuis longtemps effacées. Ce sont les bâtiments flambant neufs de New Mumbai et Suzhou Industrial City, dont les façades brillent entre les fondrières et les tas de sable, et les resorts du sud de l'Espagne, vides six mois par an comme les colonies de Cisjordanie et les bases-vie des champs pétroliers de Hassi Messaoud.


    paru chez fayard dans la collection rentrée littéraire..

    signé Loïc, 0h10

  • CR9 : Je m'en vais - Jean Echenoz

    8b20a10dac7980a4004ce504f4dd7392.jpgAvant de lire ce livre, je ne connaissais de Jean Echenoz que ses quelques passages réguliers dans les émissions littéraires. A vue de nez, il m'apparaissait comme un type bien, bien sous tout rapport, écrivant des romans propres, sans fantaisies, sans fioritures, sans chichi. Une sorte  d'écrivain banal dans une production littéraire 'sans estomac'.
    Si l'habit ne fait pas le moine, l'écrivain ne fait pas le roman..."Je m'en vais" est un roman au style déjanté, qui sort vraiment de l'ordinaire et ce, pour deux raisons principales :
    - la place du narrateur : on ne sait pas qui il est, il ne fait pas partie du récit et pourtant il se permet des "je" et des remarques plus que subjectives.
    - des phrases tordues, destructurées où les verbes conjugués au présent côtoient ceux conjugués au passé, où les dialogues s'interposent, l'air de rien, dans une phrase narrative. Et plein de choses bizarres comme ça..à tel point qu'on se dit que les mêmes phrases écrites par un collégien seraient évidemment sanctionnées de rouge à la correction..Mais le fait est que Echenoz maîtrise à merveille ce joyeux bordel grammatical et que la surprise des premières pages passées, on s'habitue pour finalement aimer.

    Alors, s'agit-il plus d'un exercice de style qu'un récit avec une histoire etc ? peut-être..d'autant qu'on s'attend en lisant la 4ème de couverture à un récit d'exploration dans le pôle Nord (mais le titre aussi laisse entendre que ça parlera d'un départ)..mais en fait, le voyage en question ne dure que 4 ou 5 petits chapitres dans le livre et le roman n'est ni plus ni moins que la vie banale d'un galeriste parisien, alternant des hauts et des bas et courant de jupons en jupons. On imagine d'ailleurs tout à fait le roman sans le voyage au pôle et sans les conséquences de ce voyage.

    Alors, globalement, je dis chapeau..car j'ai beaucoup ri et un roman qui fait rire aux éclats est un roman réussi. Ce n'est pas un petit goncourt (1999) comme on a pu l'entendre. C'est un Goncourt audacieux pour un livre audacieux.
    Sur ce, les amis, je vais me plonger dans un roman étranger..pour changer un peu.

    bon weekend à toutes. signé Loïc, 0h00

  • CR8 : rue des boutiques obscures - Patrick Modiano

    a4902c340857765eb1922d1d9eb63861.jpgIl faut que je vous parle de rue des boutiques obscures, le roman de Modiano que je viens de lire..Enfin, je ne sais plus si je l'ai lu..et même si je l'ai lu, je ne me souviens plus de l'histoire..et qui suis-je au fait ? J'ai trouvé un carnet à spirale appartenant à un certain Loïc LT ? Est-ce un ami, un proche ou peut-être moi ? Une petite enquête m'apprend que ce Loïc a vécu à la fin du XXème siècle, zone du Ty-Mor à Hennebont dans un immeuble au bord d'un fleuve, immeuble ressemblant plus à un hangar qu'autre chose..A-t-il fréquenté le café aujourd'hui fermé qui jouxte cet immeuble ? S'est-il balladé le long de ce fleuve au bord duquel trônent des épaves ? Ensuite, je trouve sa trace au 21 rue Nationale, toujours à Hennebont..puis dans un petit bourg...où tout se précipite. Ce type qui semblait être un rêveur solitaire, que l'on croisa dans des fêtes un peu bizarres semble s'être rangé...une femme, des enfants..un maison, des livres...La hasard de l'enquête m''apprend que le dernier livre qu'il a lu fut rue des boutiques obscures de Patrick Modiano...

    Le roman porte bien son nom. De rues en rues, de rencontres en rencontres, d'indices en indices, le narrateur, amnésique,  part à la recherche de son passé. Les fausses pistes ne le sont pas tant que ça et lui donnent à chaque fois un indice supplémentaire. Le narrateur interroge les rues, les immeubles, les paysages. Petit à petit,  le puzzle se forme et le passé obscure devient plus clair, et les fantômes, des êtres humains...Voulant fuir la France pendant la guerre, un immigré dominicain (le narrateur) et sa compagne font confiance à un passeur qui s'avère être une crapule. Perdu dans la neige, le narrateur perd connaissance..

    J'ai A.D.O.R.E...pas spécialement pour l'histoire..d'ailleurs, sur le dernier tiers, je me suis totalement perdu dans le dédale des personnages..non, j'ai adoré pour cette petite musique de rien du tout, cette musique nostalgique d'un temps oublié et des êtres ordinaires qui ne laissent de traces que des numéros dans des bottins ou les souvenirs confus de gens les ayant vaguement rencontrés. Par le style dépouillé, il y a un peu de Kundera chez PM, par l'obsession des chiffres et des détails insignifiants, il y a un peu de Georges Pérec. Par la place du passé et des traces qu'il laisse, un peu de Proust...

    Ce qui fait un excellent roman...

     

    signé quelqu'un, à 22h15

  • CR6 - l'élégance du hérisson - Muriel Barbery

    5d71c3d4ce79fab57ed439a1b2c45457.jpgL'histoire : une concierge intelligente et cultivée d'une immeuble parisien cossu se fait passer pour une conne afin de rester dans son rôle. Elle lit et regarde des films d'art et essais en cachette en prenant le soin de laisser tf1 dans la loge. Pendant ce temps, une adolescente de 12 ans habitant l'immeuble, surdouée écrit dans un journal qu'elle veut se suicider car les gens qui l'entourent sont trop stupides et que le monde est absurde. Arrive un nouvel habitant. C'est un riche japonais qui ne met pas longtemps à remarquer toutes ces petites cachoteries. Autour de ces trois personnages principaux gravitent tout un tas de gens plus ou moins grotesques et caricaturaux.

    Voilà une lecture jubilatoire avec plein de pensées profondes et subtiles et d'anecdotes croustillantes, un livre que l'on ne voudrait jamais finir.
    A partir de là, ses quelques défauts n'ont que peu d'importance. Mais je vais quand même vous dire le plus gros histoire de faire preuve d'un peu d'esprit critique : la plupart du temps, les pensées philosophiques (sur la phénoménologie par exemple..) tombent comme un cheveu sur la soupe. On a le sentiment que l'auteur a voulu placer coûte que coûte des théories dans ce roman en utilisant la concierge comme support. Aussi intelligente et cultivée est-elle, ça sonne mal d'autant que dans ces intermèdes (exquis au demeurant), il n'est fait aucune mention de l'histoire.
    J'ai trouvé le journal de Paloma bien plus marrant que celui de Renée, plus direct, bidonnant..bien que j'ai du mal à croire qu'une enfant de 12 ans puisse avoir une telle intelligence et surtout l'envie de se suicider pour finalement des broutilles. L'idée générale qui sous-tend le roman est que plus on intelligent et plus on trouve le monde absurde. C'est un parti pris mais je ne le partage pas. Je pense au contraire que plus on comprend le monde, plus on comprend qu'on s'inscrit dans un certain dessein,  dans le 'cosmos'. Même si nos petits quotidien peuvent parfois sembler merdiques, en nous inscrivant dans un tout qui fait la marche du monde, on peut s'endormir en paix et remercier le hasard de nous avoir fait être.
    Une des conclusions de ce roman est que désormais il faut que je vois un film d'Ozu. La mule est déjà en action de ce côté-là.
    J'ai apprécié aussi dans ce livre les quelques attaques contre le socialisme (t'imagine..), attaques contre les gens riches socialistes et contre le socialisme en tant que philosophie. Je sais pas, je ne suis tellement pas socialiste que peut-être j'exagère sur les intentions de Barbery..
    Ce roman, ce n'est que du bonheur. En plus, la plume est virevoltante et les tournures de phrases sont toutes comme je les aime.

    extrait (journal de la concierge) : J'avais parcouru les allées de la bibliothèque, plutôt clairsemées et peuplées exclusivement de vieux messieurs très doctes ou d'étudiants à l'air prétentieux. Je suis toujours fascinée par l'abnégation avec laquelle nous autres humains sommes capables de consacrer une grande énergie à la quête du rien et au brassage de pensées inutiles et absurdes. J'avais discuté avec un jeune thésard en patristique grecque et m'étais demandé comme tant de jeunesse pouvait se ruiner au service du néant. Quand on réfléchit bien au fait de ce qui préoccupe avant tout le primate, c'est le sexe, le territoire et la hiérarchie, la réflexion sur le sens de la prière chez Augustin d'Hippone semble relativement inutile. Certes, on arguera sans doute du fait que l'homme aspire à un sens qui va au-delà des pulsions. Mais je rétorque que c'est à la fois très vrai (sinon, que faire de la littérature ?) et très faux : le sens, c'est encore de la pulsion portée à son plus haut degré d'accomplissement, en ce qu'elle utilise le moyen le plus performant, la compréhension, pour parvenir à ses fins. Car cette quête de sens et de beauté n'est pas le signe d'une nature altière de l'homme qui échappant à son animalité, trouverait dans les lumières de l'esprit la justification de son être : c'est une arme aiguisée au service d'une fin matérielle et triviale.
    note (/5) : 4.5
    signé Loïc
    edit le 28.12.07 : avec le recul des mois, je me ravise. Ce livre est très moyen. J'ai été sans doute aveuglé par ce déballage de cultures. alors 3/5

  • CR5 - J'irai cracher sur vos tombes - Boris Vian

    366052751be1426d50222c5e58d5f8e9.jpgL'histoire : L'histoire se passe dans une petite ville américaine dans les années 1940. Globalement les habitants sont de petits bourgeois blancs et racistes. Un type, Lee, métisse (mais plus blanc que noir)  y débarque dans l'unique dessein de venger aveuglément son jeune frère noir, mort lynché par des blancs. Il se trouve un boulot de libraire et fréquente assidument toute la jeunesse de la ville, consomme beaucoup d'alcool, se tape les filles de bonne famille les unes après les autres et jette son dévolu sur deux soeurs, deux jolies poupées vers lesquelles il cristallise toute sa haine du blanc.
    En fin de compte il les tue avec autant de froideur et d'animalité qu'il les baisait autant comme autant. Rattrapé par les flics, il est tué et quand même lynché pour le symbole.

    Mon avis : Ce qui est incroyable dans ce livre, c'est la façon dont par petites touches anodines, le narrateur fait part de ses intentions finales. Il en parle comme il parlerait de la pluie et du beau temps. Lee est un type intelligent miné par le désir de vengeance et ces obsession lui fait perdre toute humanité notamment dans son rapport aux filles dont il consomme les corps tel un animal. Ce qui est déroutant, c'est que dans cette Amérique que l'on croirait puritaine, les filles sont faciles et dénuées de tout scrupule.

    Ce livre m'a confirmé dans l'idée que Boris Vian avait définitivement beaucoup de talent. Le très poétique l'écume des jours m'a marqué pour la vie. Celui, je ne sais pas, faute de recul. Quelque part quand même, J'irai cracher sur vos tombes est l'antithèse de l'écume des jours....Mais c'est du grand Art, du très grand Art.
    note (5) : 4.5
    J'attaque l'élégance du hérisson de Muriel Barbery (enfin) et ensuite, ce sera sans doute Cendrillon de Eric Reinhardt.

  • CR4 - les mains de Jeanne-Marie - Gisèle Le Rouzic

    M'est-il permis de vous dire ce que j'ai pensé de ma dernière lecture, à savoir les mains de Jeanne-Marie de Gisèle Le Rouzic ? Je vous en avais déjà touché un mot dans une précédente note.
    L'histoire se déroule dans la petite bourgade de Lochrist dans le Morbihan, au début du XXième siècle, en 1906 précisément. Un jeune instituteur, Yvon Le Braz débarque à l'école publique et se trouve mêlé au monde ouvrier des forges d'Hennebont, un monde où la lutte des classes et l'affrontement est une réalité quotidienne.  Petit à petit, il tombe amoureux de la mère d'un de ses élèves qui est justement la leader de la contestation ouvrière.  Lui est épris de liberté, de république, de laïcité, de poésie, de buccolisme et tente d'analyser la marche du monde avec hauteur et surtout dans la nuance. Elle, n'aime pas les livres et ne considère son salut et celui des siens que dans l'affrontement, la lutte, la 'grève à outrance'. Il essaie de la modérer. En vain. Elle essaie d'en faire un révolté. En vain. . La grève de 1906 éclate, dure et échoue. Les maîtres des forges n'ont pas cédé.
    En clair, tout le monde campe sur ses positions...car n'oublions pas qu'on est en Bretagne et que les bretons sont têtus.

    Mon commentaire : lecture forte agréable et très instructive. Je me suis senti d'autant plus intéressé que le décor m'est familier (Hennebont, le Blavet, la campagne bretonne, les noms de famille..). Un siècle plus tard, on réalise que tout ce qui semblait insensé en 1906 (la journée de 8 heures réclamée par les 'rouges' était considérée comme étant de l'utopie) est devenue une réalité..ainsi que les congés payés..la sécurité sociale...1936, 1968, 1981 sont passés par là.
    L'écriture est très agréable, sans temps mort, sans phrase inutile. Le narrateur est l'instituteur et il y dans le troisième tiers du roman quelques pages féériques, en dehors du temps lorsqu'Yvon et ses élèves vont en promenade dans un ancien bourg ouvrier. Je n'ai pas tout compris d'ailleurs à cet endroit mais juste saisi une petite musique du bonheur.

    un passage : ce fut Colette qui me révèla que la différence des classes se marque jusque dans le teint. Ses camarades, pour la plupart mal nourris, avaient les privilèges qu'accorde la nature à ceux qui vivent par force hors de l'abri des maisons. Leurs joues larges et rouges, avivées par le vent, se couvraient de hâle et de taches de son dès les premiers jours de Pâques.  Colette, en toute saison, gardait le tient pâle, en partie parce que sa peau prenait mal le soleil, mais surtout parce qu'en dehors des heures d'école elle vivait douillettement dans la belle demeure que la direction des usines avait mise à disposition de sa famille, à Langroix, de l'autre côté de la rivière.

    A savoir : Gisèle Le Rouzic est la femme de l'ancien maire socialiste de Inzinzac-Lochrist.

    le livre-objet : collection France-loisirs. pas d'odeur particulière. 3 semaines pour lire ce livre de 360 pages..lecture longue faute de temps.

    note (/5) : 3.5