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arthur rimbaud

  • Éloge de Saint-John Perse (Éloges !)

    J’ai appris l’existence de Saint-John Perse au lycée Dupuy-de-Lôme à Lorient grâce à un camarade qui était fan du film les Bronzés...Vous me direz “quel rapport ?” Et bien, dans le premier épisode des Bronzés, Jérôme (Christian Clavier) récite du SJP (on va faire court) à genoux au bord d’un lac et Nathalie (Josiane Balasko) lui dit un truc du genre “ ça t’arrive souvent de réciter du SJP à poil au bord d’un lac ?”. Maintenant que ça me vient, c’est étonnant d’ailleurs, c’est même inconcevable qu’elle ait pu reconnaître que c’était du SJP qu’il récitait, car qui connait ce poète ? quasiment personne. Alors, Nathalie, qui est un peu cruche dans son genre quand même; non seulement, elle connaît le nom de ce poète mais en plus elle est capable de reconnaître par quelques vers récités que c’est du SJP ! Ne cherchons pas midi à quatorze heures, c’est une comédie et elle n’a pas vocation à être cohérente.

    Donc voici ce que récite Jérôme :

     Azur ! nos bêtes sont bondées d’un cri !

    Je m’éveille, songeant au fruit noir de l’Anibe dans sa cupule verruqueuse et tronquée…

    C’est le début d’un poème du recueil Éloges...que mon camarade de classe avait acheté que pour ces deux vers ! Depuis, je l’ai un peu perdu de vue (on s’est appelé il y a 3 ou 4 ans je crois) mais grâce à lui, non seulement, je n’ai jamais oublié ces vers mais en plus, je connais Saint-John Perse...qui est un poète littéralement imbuvable.

    Enfin non, je me suis rappelé après coup qu’en première, au lycée Notre-Dame-du-Vœu à Hennebont, une prof d’histoire sachant mon grand amour de la poésie (que la responsable du CDI lui avait soufflé car j'empruntais plein de recueils de poésie), m’avait demandé après un cours ce que j’aimais comme poètes...et comme je n’en connaissais pas beaucoup, j'avais dû citer Baudelaire, Rimbaud, Verlaine et elle m’avait demandé si je connaissais SJP. Je lui avais répondu que non et je crois que ça l’avait déçue.

    N’empêche que ces deux vers dont on ne comprend rien sont tellement beaux que je ne les ai jamais oubliés...à tel point que j’ai réussi à les faire rentrer dans la famille. Mon beau-frère par exemple récite les premiers mots parfois mais je crois qu’il remplace Azur par Amour en s'adressant à ma sœur et Prisca lui a emboîté le pas et m’appelle parfois Amour sur le même ton que Christian Clavier dans les Bronzés

    Non mais quelle histoire !

    S’il y a une vie après la mort et qu’on peut voir ce qui se passe sur Terre, quelle tristesse cela doit être pour SJP de se dire qu’il est passé à la postérité grâce à un nanar.

    A la base, je voulais m’amuser à tenter une explication d’un texte de SJP mais j’ai déjà trop écrit, j’ai la flemme...et surtout SJP, c’est vraiment chiant ! Alors, une autre fois !

    Si un jour, j’ai le courage de le faire, ce sera sur celui-là... que j’ai pris en prenant une page au hasard dans Éloges (page 61)

     

    Silencieusement va la sève et débouche aux rives minces de la feuille.

    Voici d'un ciel de paille où lancer où lancer, ô lancer  ! à tour de bras la torche !

    Pour moi, j’ai retiré mes pieds.

    ô mes amis où êtes-vous que je ne connais pas ?. . . Ne verrez-vous cela aussi ?... des havres crépitants, de belles eaux de cuivre mol où midi émietteur de cymbales troue l'ardeur de son puits... Ô c’est l'heure

    où dans les villes surchauffées, au fond des cours gluantes, sous les treilles glacées, l'eau coule aux bassins clos violée

    des roses vertes de midi... et l'eau nue est pareille à la pulpe d'un songe, et le songeur est couché là, et il tient au plafond un œil d'or qui guerroie. . .

    Et l'enfant qui revient de l'école des Pères, affectueux longeant l'affection des Murs qui sentent le pain chaud, voit au bout de la rue où il tourne

    la mer déserte plus bruyante qu'une criée aux poissons. Et les boucauts de sucre coulent, aux Quais de marcassite peints, à grands ramages, de pétrole

    et des nègres porteurs de bêtes écorchées s'agenouillent aux faïences des Boucheries anglaises, déchargent un faix d'or et d’ahan

    et au rond-point de la Halle de bronze, haute demeure courroucée où pendent les poissons et qu'on entend chanter dans sa feuille de fer, un homme glabre, en cotonnade jaune, pousse un cri : je suis Dieu ! et d'autres : il est fou !

    et un autre envahi par le goût de tuer se met en marche vers le Château d'Eau avec trois billes de poison : rose, verte, indigo.

    Pour moi, j'ai retiré mes pieds .

     

    Je n'ai même pas réussi à trouver ce poème entièrement sur le net. Il m'a fallu faire des collages... et des corrections même !

    Mes amis, où êtes-vous que je ne connais pas ? Ce n'est même pas la peine que je vous demande de trouver une explication (mais le premier vers au moins est assez simple), vous n'avez même pas été capable de trouver le poète de Quistinic, Paul-Alexis Robic, que je suis le seul à évoquer sur le net. J'aime bien être le seul à m'occuper d'une figure disparue. 

    Et bon courage....comment une mer peut-elle être déserte (une plage encore, on comprendrait) mais déserte et  plus bruyante qu'une criée aux poissons ? Bon courage si vous voulez essayer et bon courage à moi. Je ne suis pas idiot, je sais qu'une criée est souvent bruyante mais une mer ne peut pas être déserte....ou alors elle s'est retirée très loin (comme elle le fait sur la côte ouest du Cotentin lorsqu'à marrée basse, elle se barre à des kilomètres si bien que si on veut aller la voir quand elle est au plus loin, plus on s'y approche plus on a l'impression de s'en éloigner si bien qu'on se croit en plein désert) mais si elle s'est retirée très loin, elle ne peut pas être bruyante !

    Il y a des accents rimbaldiens dans ce poème (oui, je sais, j'y reviens toujours) mais sans rien n'y comprendre on devine que l'action se situe dans un pays chaud....dans ces pays poivrés et détrempés comme écrivait Arthur et quand SJP écrit "je suis Dieu ! et d'autres : il est fou !", ça me rappelle un poème de Rimbaud mais je ne me souviens plus lequel.

    Mais, vous ne perdez rien pour attendre, je reviendrai dussé-je m'enfiler des boucauts d'absinthe ! 

    Loïc LT

  • un bon morceau de viande

    A 17 ans, Rimbaud pensait qu'on pouvait changer le monde par la poésie :

    Il s'agit d'arriver à l'inconnu par le dérèglement de tous les sens. Les souffrances sont énormes, mais il faut être fort, être né poète, et je me suis reconnu poète. Ce n'est pas du tout ma faute. C'est faux de dire : Je pense : on devrait dire : On me pense. − Pardon du jeu de mots. −
                                   Je est un autre. Tant pis pour le bois qui se trouve violon, et nargue aux inconscients, qui ergotent sur ce qu'ils ignorent tout à fait !

    Moi, à 20 ans, je pensais que la techno allait changer le monde. Je ne le pense plus, je vous rassure mais j'écoute toujours autant ce qu'on appelle plus communément aujourd'hui de l'électro. Et il se trouve que les compositeurs français font partie des meilleurs du monde et que parmi eux, il y a Rone, un type qui ressemble à un étudiant et en tout cas pas à l'idée qu'on se fait d'un dj. Rone, de son vrai nom Erwan Castex est intelligent et curieux de tout (il vient d'ailleurs de faire un concert à la Philharmonie de Paris). Et hier soir, me laissant guider par le flow de deezer, je suis tombé sur un titre du bonhomme. Ce morceau s'appelle Vood(oo).  J'étais allongé et je me serais mis à danser sur le lit s'il n'y avait pas un risque que je casse une autre latte et alors j'ai voulu faire part de cette découverte à un ami des Côtes du Nord et pour une fois je ne voulais pas dire que c'était une "tuerie". Alors, j'ai cherché ce qu'il y avait comme synonyme à "tuerie" et je n'ai rien trouvé de probant. Le moins pire était "boucherie"....alors l'ami en question m'a répondu (il y a encore des gens qui répondent aux textos dans les 5 minutes...si si), qu'il n'avait pas encore "dégusté ce morceau de viande". Et j'ai été pris d'un fou rire dont j'ai fait part à ma femme quand elle est venue me rejoindre et que j'écoutais toujours Vood(oo) en boucle. 


                           

    Je l'ai écouté en voiture dans la journée et ce soir pendant que je cassais de la vaisselle, Chloé est passée par là et m'a dit que c'était pas mal. Rare qu'il y ait connivence entre elle et moi sur les questions musicales. Je me suis donc dit que ce morceau de viande n'était pas anodin...d'autant que passant dans le coin aussi (je n'ai pas le monopole de la cuisine), Prisca m'a demandé ce que c'était et je lui ai rappelé l'anecdote de la veille. Quand Prisca me demande le nom  d'un titre que j'écoute, c'est qu'elle n'y est pas indifférente, d'autant plus étonnant que ce morceau de viande (de sanglier ou de lièvre, en tout cas, une viande bien dure) est bien underground, limite agressif et en tout cas n'a rien pour plaire à quelqu'un qui est hermétique à l'électro. Ayant fini de casser la vaisselle, je me suis mis à danser comme Saint Guy et, effrayée, elle est partie. 

    Donc Vood(oo) que vous le vouliez ou non possède quelque chose de particulier, il dégage une énergie positive et oui, effectivement Olivier, tu ne le savais pas encore mais il se déguste comme une bonne entrecôte ( quand même pas du gibier, n'exagérons pas). 

    Je signale par ailleurs que Rone a travaillé avec Daho (remix raté de en surface par exemple), que je l'ai vu à Rennes aux Transmusicales où il m'a un peu déçu. Il n'a pas peur de porter des jeans informes, comme ceux qu'on trouve dans les coopératives agricoles à 20 balles pièce (il doit s'approvisionner dans le même magasin que Biolay).

    Ça ne veut pas rien dire. − RÉPONDEZ-MOI : chez M. Deverrière, pour LLT.

              Bonjour de cœur,
                                      Loïc LT

  • recensement des cabines # 71 - Sainte-Hélène-sur-Mer (56)

    Quand j'étais ado, nous n'avions pas l'habitude d'aller à la mer qui ne se situait pourtant qu'à une demi-heure de Languidic. Par ailleurs, je n'avais pas appris à nager en école primaire. Alors, lorsque tonton Michel m'a offert un vélo qui ressemblait un peu à celui-là,

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    je me suis mis à pédaler, j'allais souvent autour du Blavet et puis un jour je me suis dit "pourquoi ne pas aller à la mer ?". J'avais quoi 16 ans et demi, jouant rarement les tombeurs même si parfois je me retrouvais souvent groggy avec des larmes plein le coeur (après avoir été largué par Loraine ou Sophie, hein, je meuble ikea). 

    La plage la plus proche était Plouhinec et se situait à 28 kms de Languidic. Je me souviens très bien du trajet : Languidic (cabine) - Brandérion (Cabine) - Nostang (Cabine) - Sainte-Hélène (Cabine) puis Plouhinec (cabine ?). Je partais donc en début d'après-midi sans rien dire à personne, sans serviette ni maillot de bain et je me sentais bien !

    Ah ! cette vie de mon enfance, la grande route par tous les temps, sobre naturellement, plus désintéressé que le meilleur des mendiants, fier de n'avoir ni pays, ni amis, quelle sottise c'était - Et je m'en aperçois seulement ! (AR)

    A la différence de Rimbaud, je me complaisais dans ma solitude. Je n'étais pas forcément un être épanoui mais c'est avec un brin de nostalgie que je me souviens de cette époque où je découvrais la littérature, la natation (et n'ayant pas de maillot de bain, je me baignais nu sur la plage déserte)...et l'économie aussi parce que je me rappelle que je posais plein de question à mon père sur la bourse parce qu'il y avait ce fameux encart avec les cotations dans le Ouest-France dont je ne comprenais rien.

    Donc, j'enfourchais mon vélocipède et partais, libre comme le vent. Languidic, Brandérion, Nostang. A Nostang, les marécages commencent à  signaler que la mer n'est pas loin mais c'est en arrivant dans le bourg de Sainte-Hélène que je me sentais proche du littoral.

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    Il y avait l'avant Saint-Hélène et l'après. Aujourd'hui donc, après une introduction autobiographique longue et nostalgique, je vous fais visiter le bourg de Sainte-Hélène, qui s'appelle depuis peu officiellement Sainte-Hélène-sur-mer (raison du changement : trop de Sainte-Hélène en France). C'est une connaissance qui m'a informé de la présence d'une cabine dans ce joli bourg de caractère. Elle se situe à sa sortie direction Plouhinec au milieu d'un parking triste et près d'une cité pavillonnaire. 

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    Son numéro d'appel est le 36 60 35 (on est dans le Morbihan, est-il encore utile que je vous donne les 4 premiers chiffres ?). Quand on appelle, ça sonne et quand la sonnerie d'une cabine retentit on est surpris, on a l'impression de se retrouver 30 ans en arrière ou dans un téléfilm de Maigret. C'est une cabine à carte mais je ne me risque plus à tenter d'émettre d'appels. 

    Le centre bourg est caractéristique des bourgs côtiers du Morbihan. Les murs sont blancs ou en pierre, les routes bitumées et pour peu qu'il fasse beau (comme en ce 13 août 2016) il n'y a pas beaucoup de contribuables à traîner dans la place. 

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    Quelques-uns cependant prennent du bon temps sur la terrasse de l'un des deux cafés du village (le Napoléon), café qui se situe à côté de l'épicerie moderne. 

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    Sainte-Hélène-sur-mer apporte un soin particulier au fleurissement du bourg. De grandes vasques contiennent des hortensias, pétunias, heuchères et autres fleurs en plastique aux couleurs marquées. 

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    De l'autre côté du Napoléon, il y a cette maison devant laquelle nous nous sommes arrêtés quelques instants. On a discuté avec son habitant qui nous a pris pour des touristes. Je n'ai pas démenti. Je me sens toujours un peu touriste quand je visite des bourgs. 

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    photo parmi d'autres...

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    A la fin, j'étais las de ce monde ancien. Après avoir lu les messages laissés par des retraités dans l'abribus,

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    je me suis endormi dans cet abri sempiternellement parrainé par Groupama, je me souviens avoir rêvé la nuit verte aux neiges éblouies, baiser montant aux yeux des mers avec lenteur, la circulation des sèves inouïes et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs :

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    Sainte-Hélène-sur-mer , (56700), Morbihan , bourgmestre  : Pierre Le Fur  (depuis 2014),  1156,3 hélénois, cabine téléphonique accessible handicapés et pouvant recevoir des appels d'offres. reportage réalisé le 13 août 2016. 

    Loïc LT

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  • le bateau ivre (version finale)

    Je n'aime pas trop l'idée de toujours se filmer, (d'autant que je n'aime ni me voir ni ma voix),  je préfère l'écriture mais pour le projet bateau ivre, il fallait que je me filme. Donc, c'est terminé. Le poème est acquis, il est dans la boite, la diction est loin d'être parfaite, la forme non plus mais je ne suis pas acteur. Le bateau ivre, c'est fini, il est coulé. Il resurgira dans ma vie en épave (mais vous savez, même les épaves ont la trempe des braves...). 

    Loïc LT


     

  • le bateau ivre, Arthur Rimbaud # tentative première

    J'ai un projet encore diffus dans ma tête basé sur le poème 'le bateau ivre' de Rimbaud. Il s'agirait de le réciter dans les endroits les plus insolites, qu'il y ait des gens ou pas. On pourrait presque appeler ça du Street art mais ne nous prenons pas le chou. Mais dans un premier temps, il faut le connaître par cœur, que les strophes sortent de façon mécanique sans qu'il est l'ombre d'un doute. Je n'y suis pas encore. Je récite le texte par cœur dans ma voiture, dans ma tête mais dès qu'il y a quelqu'un qui m'écoute, je bloque...mais je m'améliore. Il faut que travaille la forme et pense aux endroits. C'est un projet qui a des chances de n'intéresser personne sauf moi, et c'est bien l'essentiel ! 

    En attendant, tentative première dans mon jardin :


     

    Loïc LT

  • la cabine ivre (ébauche d'un pastiche)

     

    Comme j’étais fixé sur un socle infrangible

    Je ne pouvais quitter ce quartier de malheur

    Et des jeunes branleurs me prenaient pour cible

    taguant sur mes vitraux de sordides horreurs.

     

    J’étais un peu soucieux que mon appareillage

    Ne serve plus que deux ou trois fois dans l’année

    Alors quand un Génie m’a offert un voyage

    J’ai quitté sans douleur ce trottoir malfamé.  

     

    Et j’ai quitté la ville munie de trois bottines

    Empruntant dans la nuit de petites ruelles

    Et j’ai croisé des gens voyant une cabine

    Courir et ne croyant que cela soit réel.

     

    J”ai traversé des bois et des chemins de terre

    Des champs avec du blé ou bien du triticale

    Et j’ai même failli surpris par une pierre

    Faire tomber au sol mon caisson de métal.

     

    Or moi, cabine libre tout comme un troubadour

    J’ignorais le destin de ce vagabondage

    Et j’avais même un peu le regret de ces jours

    Où je servais de lieu pour de longs bavardages.

     

    Et il advint que Max cherchant de la ferraille

    Croisa médusé ma carcasse d’acier

    Et il n’eut aucun mal avec son attirail

    A me mettre en pièces et puis à m’embarquer.   

    Loïc LT/Arthur R 

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    (dessin original de Marcel Marlier - Martine fait de la Bicyclette - (Casterman)

     

  • enquête rimbaldienne

    Avant de poursuivre le récit de ce périple de début février  qui tient quelques uns en haleine fétide, j'avais envie d'une petite pause rimbaldienne. Ce sera une pause photographique que l'on doit à Ernest-Pignon-Ernest-Pignon-Ernest, artiste plasticien, spécialiste de ce qu'on appelle aujourd'hui le street art,   qui dans les années 70 s'amusa à coller des portraits de Rimbaud sur les murs de Charleville (lieu de naissance du trafiquant d'armes) et de Paris. 

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    Que nous dit cette photo ? Pas de nom de rue, par contre, vous ne le voyez pas vous (je n'ai pas pris toute la photo, quel con) , deux concerts de Thiefaine sont annoncés pour les 13 et 14 mai ( la photo a donc sans doute été prise en début d'année), mais évidemment l'année n'est pas précisée puisque lorsqu'on colle une affiche, ce n'est pas pour annoncer un concert qui aura lieu dans deux ans. Donc, Hubert-Félix a donné deux concerts dans cette ville, tout comme Gilles Servat, qui est surtout  connu en Bretagne et là, j'apprends qu'il a donné des concerts en dehors des contrées armoricaines. Au-dessus de l'affiche, on voit clairement indiqué Angoulème donc tout porte à croire que la photo a été prise à Angoulême. 

    Or (oui je suis de l'école Yann Moix),

    Angoulême se situe à 400 kilomètres de Rennes. Ce n'est pas impossible que le chanteur  ait donné un concert là-bas puisque dans les années 70, sous l'impulsion de Alan Stivell, la musique bretonne était à la mode donc pourquoi pas. Sauf que dans le livre où j'ai chopé cette photo il est indiqué que les sérigraphies d'Ernest ont été collées et exposées, en 1978, sur les murs de Paris, de la région parisienne et de Charleville. On n'annoncerait pas un événement qui a lieu a Angoulême sur un mur de Paris. Restons donc sur l'idée que la photo a été prise à Angoulême et qu'il s'agissait d'une exception temporaire. 

    Qu'apprend-on par ailleurs sur la photo ? Qu'une personne déclare son amour à une autre (oui, j'ai bouffé le je), mais ce type de déclaration est possible partout, même à Plounévez-Quintin. Sinon, on voit un petite affichette jaune (ou un panneau) sur lequel il est indiqué MONTRRON. Aucune réponse de Google. Pour le reste, on a des affiches déchirées que ne me sont d'aucune aide. Je vais taper Ernest-Pignon-Ernest Angoulême pour voir si à tout hasard quelqu'un signale quelque part que l'artiste à collé une sérigraphie à Angoulême, genre pour une exposition temporaire . Aucune réponse. Le mystère reste donc entier et ce n'est pas cette fille pressée et se foutant de Servat et de Rimbaud comme de son premier jupon qui pourrait me mettre sur une piste. 

    Mais j'ai peut-être trouvé la réponse. Dans ce bouquin préfacé par Jack Lang où les photos d'Ernest alternent avec des poèmes d'Arthur, il y a une photo où l'on voit une femme qui marche à l'angle de la rue Friedland. Il existe beaucoup de rues Friedland en France mais, merci encore à Google Map, la photo prise en 2015 nous montre un angle de ladite rue ressemblant parfaitement à celui de la photo. J'en conclue donc que cette photo aussi a été prise à Angoulême.  

    arthur rimbaud, Ernest Pignon-Ernest

    A gauche, nous avons la photo d'Ernest datant donc des années 1970 (c'est l'artiste qui prenait les photos) et à droite, une photo prise par l'automobile de Google en 2015 à Angoulême rue Friedland. A part les panneaux de signalisation qui ont changé et en 30 ans, cela se conçoit, il faut avouer que la ressemblance est frappante. Même angle, même type de pierre et surtout on retrouve la corniche sur les deux clichés. 

    Je décrète donc que Ernest Pignon-Ernest a exposé à Angoulême et ce sans doute après 1978. Après avoir enlevé ses affiches de Paris et de Charleville, il n'est pas impossible qu'il ait fait un petit tour de France. Ça aurait été dommage de tout ranger dans un grenier. 

    Voilà pour la petite enquête du samedi soir. Sur ce, je vais boire deux ou trois verres d'eau agrémentés de cacahuètes et d'autres petits amuses bouches.

    Loïc LT

  • CR288 : boussole - Mathias Enard

    boussole, Mathias EnardComme je me suis fixé comme règle stupide de lire tous les prix Goncourt (sauf les années se terminant par le chiffre 6), j’ai donc lu Boussole de Mathias Enard, auteur que je connaissais pour avoir lu (et approuvé) zone (qui est bien plus qu’un exercice de style avais-je dis à son propos si je me souviens bien), mais la prose de cet auteur est quand même un peu compliquée si bien que je n’étais pas tenté de relire l’une de ses productions. Mais le sort en a décidé autrement.

    Dans Boussole, le narrateur est Franz Ritter, un musicologue viennois qui agonise dans sa chambre suite à une maladie apparemment contractée lors d’un voyage en Orient, l’Orient qui, comme on dit  est le personnage principal de ce roman, un roman auquel il faut s’accrocher, trouver des branches solides pour ne pas se casser la gueule par terre. Lors d’une nuit d’insomnie, il se remémore tous ses voyages et ses rencontres dans cette partie du monde dont il constate à regret la situation actuelle.

    La théorie qui sert de fil rouge au tout est que la musique classique occidentale a été fortement influencée par la musique orientale. Je me garderais bien de le contredire ! En tout cas, c’est pour constater sur le terrain la véracité de sa théorie qu’il passe sa vie à parcourir l’Orient, de la Syrie, à l’Iran en passant par Istanbul. C’est un peu barbant quand on n’est pas amateur de Wagner ou de Liszt mais le roman qui est d’ailleurs autant un essai qu’un roman (on va dire que c’est un essai romanesque) ne s’arrête pas aux travaux de Ritter. Ces voyages  sont pour le narrateur l’occasion de rencontrer des personnages hauts en couleur et je pense notamment à ce professeur alcoolique qui lui rappelle tout le processus qui a amené l’Iran à devenir une république islamique. Lors de ce monologue, Franz Ritter est accompagnée de Sarah, l’égérie de Boussole, Sarah, une orientaliste dont Franz est amoureux et avec qui il a dormi corps contre corps sous les colonnes des ruines de Palmyre mais cet amour platonique sera finalement le grand regret de Franz. Sarah l’amour de sa vie ne sera restée en fin de compte qu’une grande amie fuyante et trop absorbée par ses voyages et sa quête spirituelle qui l’amènera au bouddhisme.

    Évidemment, cette oeuvre est dans l’air du temps et l’auteur a sans doute voulu briser des idées reçues et montrer les rapports étroits qui unissent l'Orient et l'Occident dans tous les domaines culturels surtout dans cette période tourmentée que traverse cette partie du monde mais il n’occulte rien des atrocités et du rigorisme oriental.  Dans ce roman d'une érudition qui frôle parfois le débordement, on croise les figures de Rimbaud (dont, horreur, on subodore qu’il n’est pas l’auteur des illuminations) et de femmes aventureuses ou sulfureuses comme Annemarie Schwarzenbach qui vaut un roman à elle toute seule.

    Alors oui, il faut lire Boussole (et celle que possède Franz indique désespérément l’est…) et tant pis si parfois on perd le fil du rasoir. C’est un grand Goncourt et Mathias Enard prouve une fois de plus que c'est un auteur sur qui il faut compter si tant est qu’il devait encore le prouver. Vive Lorient !

    Loïc LT, 10/12/2015

    lecture sur kindle novembre/décembre 2015, 390 pages, parution  le 19 août 2015, actes sud. note : 4/5

  • recensement des cabines # 27 (Ploërdut 56)

    Vendredi soir, alors que je me rendais au concert d'un chômeur décomplexé et rappeur non moins décomplexé, je me suis rendu compte que j'étais un peu en avance alors je me suis arrêté dans le premier bourg qui s'est offert à moi et l'heureux élu fut Ploërdut, une petite bourgade de centre Bretagne comme je les aime et que je connaissais un peu pour y avoir souvent déjeuné lorsque je travaillais à Guéméné/Scorff, où, comme chacun sait on fait une meilleure andouille que celle de Vire. 

    Ploërdut : 42mns, 42kms (oui ça fait lent mais nombreux virages et chemins de terre à emprunter)

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    J'ai très vite trouvé l'édicule et me suis garé  devant une ruine devant laquelle poussaient d'horribles hortensias. 

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    Je ne me rappelle plus s'il s'agit de la première cabine rouge que je recense, en tout cas, ces cabines "à l'anglaise", on va dire ne sont pas les plus courantes et ne sont pas non plus celles que je préfère. Je leur préfère les vieilles cabines déglinguées, taguées, informes, c'est mon côté rimbaldien : 

    J'aimais les peintures idiotes, dessus de portes, décors, toiles de saltimbanques, enseignes, enluminures populaires ; la littérature démodée, latin d'église, livres érotiques sans orthographe, romans de nos aïeules, contes de fées, petits livres de l'enfance, opéras vieux, refrains niais, rythmes naïfs.

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    Son numéro d'appel : 02 39 39 46 35

    Tout en bas de la cabine, sur une plaque il est inscrit : OFFERT PAR LA TWINNING ASSOCIATION OF STITHIANS (CORNWALL), COMITE DE JUMELAGE DE PLOERDUT, PLEURDUT 11/09/1993. 

    La loi Macron s'applique-t-elle également aux cabines de charme et qui plus est aux cabines offertes par des villes anglaises ? Un amendement a-t-il été déposé à ce sujet ? 

    Stithians se situe dans les Cornouailles et ne semble pas manquer de charme (photo piquée ici ) :

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    Ploërdut n'en manque pas non plus. Surtout au crépuscule, lorsque la nuit cache les aspérités et qu'il ne reste plus que l'impression d'un village tranquille, tout de pierre construit et où quelques commerces encore ouverts donnent un semblant de vie.  

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    Si mes souvenirs sont bons, lorsque je travaillais au pays de l'andouille, c'est dans ce restaurant que nous allions souvent déjeuner, avec Marc Tuauden (je me permets de mettre son nom en entier, je n'ai plus de nouvelle de lui et ne trouve rien sur le net alors peut-être qu'en se googlisant, il tombera ici), Elisabeth, David, Marie-Christine... Il y avait une grande salle avec buffet 'à volonté' comme on dit et on en avait pour son argent. 

    Toute épicerie qui se respecte se doit être équitable, bio, solidaire et machin-chose...

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    La boulangerie et les panneaux...autant de bourgs non recensés...

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    St-Tugdual Plouray

    Un jour chez vous j’irai

    Concernant Le Croisty

    Certainement aussi.

     

    magnifique haïku, signé le recenseur.

     

    Voici le bar le Welcome dans lequel je suis rentré mais où je n'ai pas été très bien reçu.  

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    J'ai commencé à parler politique avec des fagotiers qui rentraient juste des bois et comme nous n'étions pas d'accord, ils m'ont foutu dehors en me donnant un coup de pied au derrière...mais deux jours plus tard, je me suis calmé et j’voudrais leur dire que j'ai reçu l’coup de pied au derrière, mais que c’est pas parce que vous voulez renverser la table que vous descendez de la voiture dont vous vous abstenez de choisir le chauffeur.

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    Voilà un bar qui ne porte pas bien son nom. Ne restons pas ici. J'étais bien content de retrouver mon véhicule que j'avais garé en face de la mairie.

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    Mairie que voici. Au revoir, Ploërdut. Direction, le bar 'au pied de Ste-Barbe', dit 'chez Karim' pour écouter l'1consolable et son rap anti-system. Si j'avais le courage, j'en ferai peut-être une note parce que l'endroit (n'est-ce pas Apolline) le vaut bien. 

    recensement des cabines, cabine, ploërdut, bretagne, octobre 2015

    Ploërdut, Morbihan, reportage réalisé le 16.10.15 à 19h. crépusculaire et doux.   

  • le contribuable

    Un contribuable était vexé de ne s’être employé jamais qu’à la perfection de vulgaires déclarations de revenus. Il prévoyait d’étonnantes révolutions fiscales, et soupçonnait ses compatriotes de pouvoir mieux que cette complaisance agrémentée de chiffres et de quotients. Il voulait changer la donne, l’heure du grand soir et de la satisfactions essentiels. Que ce fut ou non une aberration, il voulut. Il possédait au moins un assez gros bagage juridique.

    Tous les inspecteurs qui l’avaient connus furent assassinés. Quel saccage du jardin de la légalité ! Sous le sabre, ils le bénirent. Mais ils réapparurent.

    Il tua tous ceux qui le poursuivaient, après la traque et l’encerclement.

    Il s’amusa à égorger les secrétaires. Il fit flamber les perceptions. Il se ruait sur les fonctionnaires et les taillait en pièces.

    Peut-on s’extasier dans la destruction, réformer par la cruauté ! Le peuple ne murmura pas.

    Un soir, il fraudait. Une inspectrice apparut, d’une beauté ineffable, inavouable même. De sa physionomie et de son maintien ressortait la promesse d’un bonheur indicible, insupportable même. ! Le contribuable et l’inspectrice s’unirent probablement dans la santé essentielle. Comment n’auraient-ils pas pu en mourir ? Ensemble donc ils moururent.

    La fiscalité savante manque à notre désir.

     

    Loïc LT (pastiche AR)