Avant de poursuivre le récit de ce périple de début février qui tient quelques uns en haleine fétide, j'avais envie d'une petite pause rimbaldienne. Ce sera une pause photographique que l'on doit à Ernest-Pignon-Ernest-Pignon-Ernest, artiste plasticien, spécialiste de ce qu'on appelle aujourd'hui le street art, qui dans les années 70 s'amusa à coller des portraits de Rimbaud sur les murs de Charleville (lieu de naissance du trafiquant d'armes) et de Paris.
Que nous dit cette photo ? Pas de nom de rue, par contre, vous ne le voyez pas vous (je n'ai pas pris toute la photo, quel con) , deux concerts de Thiefaine sont annoncés pour les 13 et 14 mai ( la photo a donc sans doute été prise en début d'année), mais évidemment l'année n'est pas précisée puisque lorsqu'on colle une affiche, ce n'est pas pour annoncer un concert qui aura lieu dans deux ans. Donc, Hubert-Félix a donné deux concerts dans cette ville, tout comme Gilles Servat, qui est surtout connu en Bretagne et là, j'apprends qu'il a donné des concerts en dehors des contrées armoricaines. Au-dessus de l'affiche, on voit clairement indiqué Angoulème donc tout porte à croire que la photo a été prise à Angoulême.
Or (oui je suis de l'école Yann Moix),
Angoulême se situe à 400 kilomètres de Rennes. Ce n'est pas impossible que le chanteur ait donné un concert là-bas puisque dans les années 70, sous l'impulsion de Alan Stivell, la musique bretonne était à la mode donc pourquoi pas. Sauf que dans le livre où j'ai chopé cette photo il est indiqué que les sérigraphies d'Ernest ont été collées et exposées, en 1978, sur les murs de Paris, de la région parisienne et de Charleville. On n'annoncerait pas un événement qui a lieu a Angoulême sur un mur de Paris. Restons donc sur l'idée que la photo a été prise à Angoulême et qu'il s'agissait d'une exception temporaire.
Qu'apprend-on par ailleurs sur la photo ? Qu'une personne déclare son amour à une autre (oui, j'ai bouffé le je), mais ce type de déclaration est possible partout, même à Plounévez-Quintin. Sinon, on voit un petite affichette jaune (ou un panneau) sur lequel il est indiqué MONTRRON. Aucune réponse de Google. Pour le reste, on a des affiches déchirées que ne me sont d'aucune aide. Je vais taper Ernest-Pignon-Ernest Angoulême pour voir si à tout hasard quelqu'un signale quelque part que l'artiste à collé une sérigraphie à Angoulême, genre pour une exposition temporaire . Aucune réponse. Le mystère reste donc entier et ce n'est pas cette fille pressée et se foutant de Servat et de Rimbaud comme de son premier jupon qui pourrait me mettre sur une piste.
Mais j'ai peut-être trouvé la réponse. Dans ce bouquin préfacé par Jack Lang où les photos d'Ernest alternent avec des poèmes d'Arthur, il y a une photo où l'on voit une femme qui marche à l'angle de la rue Friedland. Il existe beaucoup de rues Friedland en France mais, merci encore à Google Map, la photo prise en 2015 nous montre un angle de ladite rue ressemblant parfaitement à celui de la photo. J'en conclue donc que cette photo aussi a été prise à Angoulême.
A gauche, nous avons la photo d'Ernest datant donc des années 1970 (c'est l'artiste qui prenait les photos) et à droite, une photo prise par l'automobile de Google en 2015 à Angoulême rue Friedland. A part les panneaux de signalisation qui ont changé et en 30 ans, cela se conçoit, il faut avouer que la ressemblance est frappante. Même angle, même type de pierre et surtout on retrouve la corniche sur les deux clichés.
Je décrète donc que Ernest Pignon-Ernest a exposé à Angoulême et ce sans doute après 1978. Après avoir enlevé ses affiches de Paris et de Charleville, il n'est pas impossible qu'il ait fait un petit tour de France. Ça aurait été dommage de tout ranger dans un grenier.
Voilà pour la petite enquête du samedi soir. Sur ce, je vais boire deux ou trois verres d'eau agrémentés de cacahuètes et d'autres petits amuses bouches.
Loïc LT