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  • CR71 - le diable au corps - Raymond Radiguet

    29012009435.jpgIl m'aura fallu seulement deux heures ou un peu plus peut-être si je compte certaines phases de lectures un peu ponctuelles  (qui arrivent fréquemment comme par exemple dans les files d'attente qui peuvent se former ici ou là à certains endroits où trop de gens en même temps veulent accéder au même service, même désir, même guichet ou que-sais-je ; quand j'arrive au boulot deux minutes trop tôt et qu'il est hors de question que j'offre ces deux minutes au capitalisme, quand je surveille les pates), deux bonnes heures donc pour lire ce roman écrit par un certain Raymond Radiguet (qui n'a de Raymond que le prénom), écrivain qui fit un court passage sur terre au début du XXè siècle. Pratiquement inconnu du grand public, il bénéficie d'une certaine aura dans le petit public. Jean Cocteau a quand même dit de lui : "Raymond Radiguet partage avec Arthur Rimbaud le privilège d'être un phénomène des lettres françaises."


    Mais le diable au corps ne m'a pas spécialement emballé. Style très conventionnel avec utilisation pléthorique du subjonctif de l'imparfait ou du passé simple. Histoire somme toute banale d'un amour impossible entre un jeune homme et une femme mariée pendant la guerre 14-18. Moeurs provinciales vs amour impossible. Vieille rangaine de la littérature française, n'est-ce pas. Rien de rimbaldien dans cette affaire-là. Juste un bon moment de lecture.

    Deux courts extraits, sur lesquels on peut méditer :

    "la puissance ne se montre que si l'on en use avec injustice. "

    "Si la jeunesse est niaise, c'est faute d'avoir été paresseuse. Ce qui infirme nos systèmes d'éducation, c'est qu'ils s'adressent aux médiocres, à cause du nombre. Pour un esprit en marche, la paresse n'existe pas. Je n'ai jamais appris plus que dans ces longues journées qui, pour un témoin, eussent semblé vides, et où j'observais mon coeur novice comme un parvenu observe ses gestes à table."

    Sur le premier j'ai des doutes mais sur le deuxième, j'approuve totalement.


    lecture : 23.01.2009
    note : 3.5/5
    à venir : le paysan de Paris, Louis Aragon

  • un passage de Cendrillon où il est question d'un passage.

    DSCN2378.JPGDans  la première partie du paysan de Paris de Louis Aragon, il est question du passage de l'opéra et cela me rappelle un autre passage décrit par Eric Reinhardt dans Cendrillon, et qui se situe quelque part à l'entrée des jardins du Palais-Royal . Je ne fais aucun lien entre Louis Aragon et Eric Reinhardt mais le fait est que la lecture du Paysan de Paris m'évoque un quelque chose de Cendrillon. Je ne saurais trop dire quoi, c'est méta (comme dirait une personne qui se reconnaîtra )..Mais c'est peut-être le fait que les deux écrivains fantasment sur des lieux un peu comme ça, des lieux transitoires qui ne sont pas forcément des lieux touristiques. Et puis l'amour pour Paris.


    J'ai fouiné sur le net mais n'ai pas trouvé de photo de ce passage, et j'ai d'ailleurs du mal à me figurer à quoi il ressemble (si quelqu'un....) A ma prochaine escapade à Paris (et oui, il arrive aux paysans de se rendre à Paris), on ira voir ça de près donc. Car je trouve ce passage (-)) du livre (p255) vraiment très beau, métaphysique et poétique à souhait :

    Immédiatement à droite de la terrasse se trouve l'une des entrées des jardins du Palais-Royal. Il s'agit d'une brève galerie voûtée qui débouche sur la cour des colonnes de Buren qui est elle-même une manière de prologue aux jardins proprement dits : ils la prolongent derrière une colonnade qui constitue une frontière en pointillé entre les deux espaces. J'ai toujours été fasciné, en particulier la nuit (quand il s'emplit d'une mystérieuse obscurité) (quand on aperçoit par cet oeil emmuré comme une énorme réserve de rêves, de branches, de ténèbres) (et peut-être l'attraction qu'exerce sur moi ce point précis de la géographie parisienne s'explique-t-elle tout entière par ce détail architectural : métaphysique en réalité), j'ai toujours été magnétisé par cet étroit conduit. Il est intéressant de noter qu'on accède à l'immensité des jardins par un discret petit passage, par une virgule de cet ensemble grammatical de premier ordre, dont je précise à la hâte (n'étant pas un passionné d'histoire) qu'il a été voulu par le cardinal de Richelieu, dessiné au XVIIe siècle par Jacques Lemercier et amplement modifié au XVIIIe par Victor Louis, à qui l'on doit la cour et les arcades actuelles (que j'adore) ainsi que le Théâtre-Français (1785), dont il est décevant de se dire qu'il n'est pas exactement celui où a joué le grand Molière, l'un de mes écrivains préférés. Je disais qu'on accède à l'immensité des jardins du Palais-Royal par une virgule de cet ensemble grammatical de premier ordre. Cette virgule s'auréole dans la nuit d'un mystère inégalable car elle exalte le principe qui lui est constitutif, accentué par son étroitesse, de passage. J'ai déjà dit l'importance que revêtait dans mon imaginaire le principe du passage : le petit pont de Brigadoon et la bouche d'égout du Trou. Quand le soir, la nuit, l'automne, attablé en terrasse du Nemours , je plonge mon regard dans ce mince interstice ténébreux et que je voix, profonde, intérieure, onirique, impénétrable, la perspective nocturne qui s'y déploie, peuplé d'ombres, d'arbres, de silence, d'éternité devrait-on dire, j'éprouve la sensation que ce petit passage est comme la métaphore de ce passage métaphysique que je ne cesse de rechercher depuis l'adolescence -quelque chose de ce genre, aussi vague, imprécis, instinctif que cela. Il me suffit de jeter un regard sur ce petit passage et j'y crois : mes sens s'exaltent, mes rêves se réalimentent , je me mets à y croire à nouveau. Et puis, c'est comme un oeil, l'oeil d'une femme par rapport à son immensité intérieure, par rapport aux méandres, aux mystères, à la beauté, aux grâces, aux secrets, aux forêts, aux rêves, aux fables, aux illusions uniques et merveilleuses qui s'y devinent.

  • le bateau ivre expliqué à Chloé : strophes 2 et 3

    24012009347.JPGJ'étais insoucieux de tous les équipages,
    Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.
    Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,
    Les Fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.

    définition de équipage. équipage : ensemble du personnel embarqué sur un navire, un avion, un char etc, dont il assure la manoeuvre et le service.
    On dirait que Rimbaud a étendu la notion d'équipage à l'ensemble des marchandises que le bateau transporte. Parce qu'à la base, un équipage ce ne sont que des gens. Mais bon, le poète fait ce qu'il veut, il est libre et Rimbaud, peut-être plus que tout autre. Débarrassé des haleurs (dont je t'ai donné la définition lors de l'étude de la strophe 1), le bateau file, emporté par les eaux.

    Dans les clapotements furieux des marées,
    Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,
    Je courus ! Et les Péninsules démarrées
    N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.


    Ça se complique ! Le bateau continue de s'exprimer et nous apprend ici que sa folle aventure se déroula "l'autre hiver" et qu'il était plus sourd qu'un cerveau d'enfants. J'explique : quand tu ne veux pas manger ta soupe, tu n'en démords pas, et quand on t'oblige à la goûter, tu fais la sourde. Le bateau, c'est pareil : rien ne peut le faire revenir en arrière. Que sont "les péninsules démarrées" ? Je sais pas trop mais on va dire que ça signifie que le bateau entre juste en mer et qu'il fait tellement de vague qu'elle se ressentent jusqu'au large.

    tohu-bohu : grand désordre ; agitation confuse et bruyante

  • couverture du télérama n°3080

    TS.jpg15 jours après Obama (qui faisait la une du n°3078), voici que télérama fait une nouvelle fois preuve de grande originalité en nous proposant une couverture anti Sarkozy. Tout en subtilité en plus puisqu'on appose sur la tête du président un message de la forme de ceux présents sur les paquets de cigarette. ouh la.  Tout ça confirme dans l'idée qu'à Télérama, on est capable du meilleur comme du pire.

    A l'intérieur, il y a une interview de Claude Badinter et il aurait été plus astucieux de mettre ce dernier en couv. non ? Ou bien alors, Philippe Djian, l'un des meilleurs écrivains français de sa génération dont le dernier roman impardonnables est chroniqué (par l'excellente Nathalie Crom).

    Ou bien je sais pas moi, quelque chose d'optimiste, d'enjoué, d'hilarant...Pour une fois ? Dans un pays où 90% des gens s'avouent heureux, ça n'aurait rien d'indécent. Ah ! Que j'exècre cette sinistrose provoquée et entretenue par nos médias de tous bords. Que j'exècre ce mot crise employé à tort et à travers...Que j'exècre ce discours qui consiste à trouver anormal tout excès qu'il soit économique, culturel ou même météorologique ! Bon sans mais que veulent les journalistes ? Une société où il ne se passe rien, où la croissance économique est forte, une société de plein-emploi, où l'on ne meurt que de mort naturelle, où l'accident est impossible, où il neige à noel et qu'il faut chaud (mais pas trop) en août. Enfin, non je sais pas, je me demande si les journalistes ne se complaisent pas dans l'énumération de ces soi-disant dérèglements. Je les trouve en effet plein d'assurance et de ferveur à essayer de nous expliquer tout ce qui ne va pas avec ce ton qui leur est propre où chaque phrase tombe comme une sentence, totale et définitive. Alors qu'en fin de compte une majorité de journalistes ne se rendent pas compte à quel point ils sont totalement déconnectés de la vraie vie. En plus, d'être déconnectés, ils sont incompétents. Et vlan.

    Mais je m'égare. A la base il était question des couvertures de télérama...que je trouvais tristement banales..

    Loïc

     

  • CR70 - Cherokee - Jean Echenoz

    22012009338.jpgJe viens de terminer cherokee et j'ai adoré ce roman tout comme j'avais adoré je m'en vais. Jean Echenoz confirme donc tout le bien que je pensais de lui. Et il ne pouvait en être autrement tant dans ma conception de la littérature, la forme compte tout autant que le fond..voire plus.   Dans cherokee, l'histoire brinquebalante d'un type un peu paumé qui se retrouve enquêteur dans une espèce d'agence de détectives où l'on enquête sur des affaires abracadabrantesques (un vol de perroquet par exemple) n'est évidemment une fois de plus qu'un prétexte à une débauche verbale d'une ingéniosité sans pareil où les mots rares et précieux côtoient des termes techniques qui tombent à chaque fois fort à propos, où des phrases insolites se succèdent comme autant de surprises et d'émerveillement ! Pour autant l'environnement échenozien n'est pas spécialement chatoyant puisqu'en général et dans cherokee en particulier, les terrains vagues se succèdent à rues sombres jonchées de déchets et à des zones péri-urbaines à moitié désertées. Mais la plume de l'écrivain donne à tous ces endroits et aux antihéros qui les fréquentent une sorte de grandeur poétique véritablement enivrante.

    Ça donne des choses de ce genre :


    Ils s'éloignèrent. Le bruit de leur moteur décrut, se fondit dans la rumeur lointaine, ils n"étaient plus là. Cependant, nous restons. Alentour le paysage est gris et terne. Il fait humide et froid. Tout est désert, on n'entend plus rien que cette rumeur lointaine sans intérêt. Que ne partons-nous pas. Mais voici qu'un autre bruit de moteur naît en coulisse, se précise, s'incarne en une nouvelle voiture qui paraît au bout du passage, s'approche, ralentit et se gare là même où stationnait la 504. C'est la Mazda locative de Fred. Va-t-il se passer quelque chose. Aurions-nous bien fait de rester. (p96) (note : narrateur extérieur au récit)

    Le perroquet Morgan était âgé d'une soixantaine d'années, ce qui correspond en gros, à l'échelle humaine, à une soixantaine d'années...
    (p138)

    Sur l'autoroute, à cette heure-ci, il n'y avait que des quinze-tonnes lancés à toute allure dans leur cortège classique de cuir, de tabac, de laine, de sueur et de gasoil et aussi quelques voitures particulières menées à toute allure par des hommes seuls, ivres et désespérés.
    (p171)


    Plus qu'un simple écrivain, Echenoz est aussi un poète, un sculpteur du verbe et et lorsqu'on lit ses oeuvres, on devine tout le plaisir qu' il a mis à les écrire. Ça se devine et ça se sent qu'il prend beaucoup de plaisir à l'écriture. Je considère Jean Echenoz comme l'un des plus grands écrivains français contemporains, au côté  de Philippe Djian (dont les romans sont différents mais qui cultive une même forme de cynisme) et de Benoit Godillon (dont un nouveau roman sort en mars).
    Alors, rejoignez le fan club de Jean Echenoz sur facebook. Et par la même occasion celui de Georges Marchais. -))
    Et puis lire l'excellente note de Pitou, le blogger au bout de la lettre.
    Et puis, aller faire dodo.

    lecture du 15.01 au 22.01.09
    note : 4.5/5
    à venir : le diable au corps, Raymond Radiguet

    Loïc

     

     

  • CR69 - le sucre - Georges Conchon

    baigneur.JPGIl y a quelques années, je me souviens que j'avais tellement adoré l'argent de Zola que je m'étais mis à chercher d'autres romans traitant de spéculation financière. Et on m'avait conseillé celui-ci, écrit par Georges Conchon, écrivain que quasiment personne ne connait (bien qu'il ait obtenu le prix Goncourt en 1964 avec l'Etat sauvage).
    Cela fait quelques jours que j'en ai fini la lecture et si je tarde à faire mon cr est que ce roman reste pour moi une énigme et que je ne suis pas très fier de moi sur cette affaire-là. Mais il faut quand même que je fasse une note car ce serait trop facile de ne pas en faire. C'est vrai quoi, zut, si je commence à faire de la ségrégation et de ne traiter que des livres que j'ai aimés, où-va-t-on ? Mais en fait, ce n'est pas que je ne l'ai pas aimé. C'est plutôt que je ne l'ai pas compris. A partir de la page 49, je suis rentré dans un brouillard complet et j'avais beau relire, redémarrer les chapitres, rien n'y a fait : je n'ai pas compris ce que voulait nous dire l'auteur.
    Au début, ça va. Ça se passe dans les années 70 : un fonctionnaire qui se prénomme Adrien hérite d'une grosse somme. Il abandonne son boulot d'inspecteur des impôts et décide de spéculer sur des marchés à terme, et ici, en l'occurrence sur le marché du sucre. S'aidant de ses ex-relations professionnelles,  il dispose de bons tuyaux et part très confiant. Il parie sur une hausse du prix du sucre..et c'est ce qui arrive, et même plus qu'il ne l'espérait. Grisé, il continue à investir des millions pariant toujours sur une hausse..ça augmente toujours jusqu'au jour où... ça dégringole. Il s'y attendait parce que comme le dit ce proverbe que connaissent bien les boursicoteurs "les arbres ne montent pas jusqu'au ciel". Il s'y attendait mais suite à un malentendu avec son collaborateur, il ne peut pas vendre suffisamment tôt et par un effet boule de neige se retrouve ruiné. Là, on en est à la page 49 pour un livre qui en compte 218. C'est la suite que je n'ai pas compris. Rien du tout. Apparemment, Adrien essaie d'annuler ses pertes en faisant du chantage à des banquiers ou des ministres. Et je ne sais pas s'il y arrive vraiment. D'ailleurs, je ne suis pas sûr qu'il s'agisse bien d'une histoire de chantage. La honte donc.
    Dû à quoi ? Sans doute au style de l'écrivain : plein de phrases nominales ou exclamatives et une écriture parlée avec pas mal de termes dans le genre argotique ..et du coup, Conchon oublie d'expliquer les choses à un moment où, les événements se compliquant,  il aurait peut-être fallu le faire. C'est tout ce que je vois.


    Bon, mais si vous cherchez un bon roman sur les dérives spéculatives et qui parle aussi de Mallarmé, des charmes de l'automne, d'amour, de chevilles féminines, de Paris, tout quoi, je re-re-re-conseille Cendrillon d'Eric Reinhardt. Il y a vraiment des pages sublimes dans ce livre et j'ai la chair de poule rien que de repenser à l'euphorie qui fut la mienne au temps de cette lecture.

    Sinon, cette note inaugure le mois du baigneur. C'est crétin mais c'est comme ça : toutes les illustrations mettront en scène le baigneur de Lola, si Mlle veut bien me le prêter quelques secondes de temps en temps pour la séance photo...oh mais je suis sûr que mon loulou va rien dire et qu'elle sera même fière que son papa s'intéresse au baigneur.

    note : 1.5/5
    lecture du 11.01 au 14.01.08
    à venir : cherokee, Jean Echenoz

  • espèce de bug sur l'espèce de blog.

    Aujourd'hui, j'étais chez un ami et j'ai voulu lui montrer mon blog et tout, et alors je me suis rendu compte que les pages ne s'affichaient pas correctement, voire pas du tout..petite enquête rapide pour m'apercevoir que c'était le cas depuis pas mal de temps... Et personne ne m'en avait rien dit..(ce qui compte tenu de l'audience de l'endroit, n'est pas si étonnant).

    Là, je crois que ça marche. Toutes mes excuses à ceux qui ont été empêchés de lire ma prose subliminale.

    ++++, Loïc

     

  • CR68 - Syngué sabour, pierre de patience - Atiq Rahimi

    SynguésabourPierredepatience.jpgQuelque part dans un appartement sommaire d'une ville afghane, une femme veille sur son mari, dans le coma suite à une blessure de guerre. Elle lui parle et lui dit tout ce qu'elle a sur le coeur, tout ce qu'elle n'a jamais osé ou pu lui dire. La pierre de patience est ce mari, inerte comme un caillou et auprès de qui elle peut enfin s'épancher et se livrer, ce qu'elle n'a jamais pu faire du temps où il était soldat et qu'elle lui était soumise. Dehors se font entendre de sporadiques coups de feu et l'on devine un spectacle de ruines.

    Récit bien mené dont il est impossible de décrocher. Mots justes et très évocateurs. L'écrivain veut dénoncer la violence, l'extrémisme, le fanatisme religieux et la soumission de la femme qu'il induit. C'est bien tout ça. Et c'est à mille lieux de la tendance au nombrilisme des littérateurs français contemporains. Mais ça ne valait pas le Goncourt. Les membres du jury ont sans doute voulu montrer qu'ils étaient ouverts sur le monde. On va dire que c'est culturellement correct (mais je devrais pas : je ne supporte plus l'expression politiquement correct !!!). Je dis ça parce que c'est vraiment le sentiment que j'ai. Bien d'autres romans édités en 2008 étaient supérieurs à celui-ci. Plus ambitieux, plus étoffés. Encore que, comme on sait, quantité ne signifie pas forcément qualité. Mais quand même il y a des limites. Donc voilà, un Goncourt de plus dans l'escarcelle. Et qui sera totalement oublié dans trois mois.

    note : 3.5/5
    lecture du 08.01 au 09.01.09
    à venir : le sucre, Georges Conchon.

  • la vie mode d'emploi, mode d'emploi.

    Imgp6038.jpgla vie mode d'emploi, mode d'emploi.

    Mais non, ce n'est pas vraiment un mode d'emploi mais juste quelques considérations sur la lecture de ce célèbre roman de Georges Pérec. Concrètement de quoi s'agit-il ? de la description de ce qui se passe dans un immeuble parisien à un instant T. L'écrivain se place devant l'immeuble et fait comme s'il voyait tout l'intérieur, comme s'il pouvait voir à travers les murs. Il dit tout. Jusqu'aux détails. Rien ne doit être laissé pour compte. Inventorier, relier, recouper. Tout.

    Au départ donc, je me suis dit que j'allais noter au fur et à mesure dans un petit bloc-notes prévu à cet effet toutes les informations importantes sur les habitants. Comme j'ai une  mémoire de poisson rouge, j'avais peur de ne plus savoir au bout d'un certain nombre de pages qui était un tel ou un tel déjà présenté au début, et est ce un tel connaissait un tel qui habite à l'étage du dessous ou pas. Parce qu'il faut bien se rendre compte que l'immeuble en question compte quelque chose comme huit étages et une trentaine d'appartements. J'ai commencé de la sorte. Notant tout très proprement avec un beau Waterman. Et puis, très vite, ça m'a laissé. A sans cesse interrompre la lecture, on n'avance pas et on ne prend pas de plaisir. Et je me suis dit alors que ce qu'il fallait faire, c'est reconstituer l'immeuble sur une grande feuille blanche et faire autant de case que d'appartements mais au lieu d'y dessiner le mobilier et les habitants, noter les points essentiels correspondant à chaque appart. Ça me semble évident que c'est ce qu'il faut faire.

    baise.jpgSinon, comme indiqué dans la colonne de gauche, il s'agit d'une lecture parallèle..à une autre. Je procède de la sorte lorsque je suis en face d'un ovni ou d'un pavé (celui-ci est les deux) et donc je lis un autre roman plus classique à côté. La vie mode d'emploi compte 99 chapitres. L'idée est de lire 2 chapitres par jour ce qui signifie à peu près un mois et vingt jours de lecture et donc une fin de lecture aux alentours du vingt février. J'en suis à la page 154 et si c'était un roman traditionnel je me dirais "vivement que cessent les présentations et les descriptions, de l'action vite !"...mais là, bien que je ne sais pas exactement de quoi il en retourne, je me dis qu'il y a quand même une forte probabilité que les 450 pages  restantes (écrites en tout petit...) ne seront guère différentes des 150 premières.

    Mais je me suis quand même déjà bien amusé, j'ai découvert ce qu'était un baise-en-ville et on voyage pas mal à travers la description de tableaux accrochés ici ou là dans quelque appartement de tel étage. Et puis, il y a eu surtout le compte-rendu du voyage d'un ethnologue (qui habita l'immeuble par le passé -parce que Pérec revient aussi sur les précédents habitants-) dans une tribu primitive. Un vrai petit roman à l'intérieur du roman, plus qu'un roman même un récit très pointu d'un ethnologue devenu fou.

  • CR67 - la puissance et la gloire - Graham Greene

    lapuissancetlagloire.jpgDans les années 30, dans un Mexique où le pouvoir révolutionnaire cherche à détruire toute trace de chrétienté en détruisant les églises et en massacrant les prêtres, le dernier de ces derniers est recherché par les autorités. Le roman de Graham Greene est le récit de cette chasse à l'homme.
    Ce roman très fort, très prenant et un brin aride n'est pas aussi manichéen qu'il n'y parait. Le prêtre, alcoolique n'est pas vraiment un saint et le lieutenant à la tête de la traque n'est pas dénué de sentiments. La description de l'extrême pauvreté dans la campagne mexicaine est saisissante et le roman trouve son apogée dans les dialogues de haute voltige entre les deux ennemis enfin réunis. Bien que violent dans le propos et dans les faits, ce roman apparaît avant tout comme le roman des devoirs, les devoirs qui ralentissent le prêtre dans sa fuite et le devoir du lieutenant qui bien que fort respectueux de son prisonnier se doit de le supprimer pour ce qu'il représente.
    Un roman qui donne à réfléchir sur le fait religieux en pays pauvre et les limites de l'anticléricalisme lorsque tout espoir d'être heureux de son vivant est abandonné. Aussi haletant qu'un polar, la métaphysique en plus.

    Une année de lecture qui commence bien. J'ai quelques autres vieux poches avec pages jaunies et odeurs de vieux papier comme celui-ci à lire.



    Le lieutenant cracha tout à coup méchamment, comme si quelque chose de sale s'était glissée sur sa langue.
    " Vous avez toujours des réponses qui ne signifient rien, dit-il.
    - Les livres ne m'ont pas appris grand chose, dit le prêtre. Je n'ai aucune mémoire. Mais il y a chez les hommes de votre espèce une chose qui m'a toujours beaucoup intrigué. Dites-moi : vous détestez les riches et vous aimez les pauvres, n'est-il pas vrai ?
    - Exactement.
    - Eh bien, si je vous détestais, je n'élèverais pas mon enfant en sorte qu'il vous ressemblât. Cela n'aurait pas de sens.
    - En ce moment, vous déformez...
    - Peut-être. Je n'ai jamais su exactement ce que vous pensiez. Nous avons toujours proclamé que les pauvres étaient bénis, tandis que les riches auraient beaucoup de difficultés à entrer au Paradis. Pourquoi ferions-nous des difficultés aux pauvres aussi ? Oh ! Je sais qu'on nous enseigne de donner aux pauvres, afin qu'ils ne souffrent pas de la faim...la faim peut pousser un homme à mal agir tout autant que l'argent...Mais pourquoi donnerions-nous aux pauvres le pouvoir ? Mieux vaut les laisser mourir dans la crasse et s'éveiller au ciel..tant que nous ne les enfonçons pas nous-mêmes plus loin dans la crasse.
    - Comme je déteste vos arguments, dit le lieutenant. Moi, je n'en ai pas besoin. Lorsqu'ils voient quelqu'un souffrir, les gens comme vous raisonnent et raisonnent. Ils disent :"peut-être un jour s'en trouvera-t-il mieux ?" Moi je veux laisser parler mon coeur.
    - Au bout d'un fusil.
    - Oui. Au bout d'un fusil.
    - Ah ! bien, quand vous aurez mon âge, sans doute saurez-vous que le coeur est une bête dont il est prudent de se méfier. L'intelligence en est une autre, mais elle, du moins, ne parle pas d'amour.


    note : 4/5
    lecture du 02.01 au 0601.09
    à venir : Syngué sabour, Pierre de patience, Atiq Rahimi