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2017

  • CR317: l'archipel du Goulag - Alexandre Soljenitsyne

    l'archipel du goulag.jpgIl y a des monuments littéraires qu'il faut avoir lu pour mourir moins con qu'on est né...à la recherche du temps perdu, la montagne magique, pastorale américaine, sur la route...j'en passe et puis donc l'archipel du Goulag de Alexandre Soljenitsyne. Ce dernier manquait à mon palmarès. La seule chose positive que je peux en tirer sera justement de pouvoir me dire "bon, celui-là, c'est fait", parce que cet essai en lui-même est littéralement imbuvable. Comme tout le monde sait de quoi il traite, je ne vais pas épiloguer...et comme tout le monde sait les ravages du communisme dans les pays de l'Est pendant le XXème siècle, lire ce pavé, c'est enfoncer des portes ouvertes. Mais bon, je me disais, à défaut d'apprendre quelque chose, voyons sa valeur littéraire. Et bien, c'est très moyen. Pour être honnête, c'est aussi rédhibitoire à lire que ne l'était l'absurdité de l'administration soviétique. Il s'agit ni plus ni moins d'un inventaire comme autant d'exemples de gens ayant été arrêtés arbitrairement essentiellement sous Staline, ayant subi les tortures lors d’interrogatoires avant d'être jetés en prison et envoyés dans le fameux archipel. Quand un ou deux exemples aurait suffi, l'écrivain russe nous en livre une centaine, tous plus ou moins identiques. Pour être clair et honnête, c'est barbant.

    Si on ajoute à cela que sur le fond, j'ai été gêné quand à plusieurs reprises, il se permet de dire à peine à mots couverts que le nazisme était moins mauvais que le stalinisme, on n'en peut plus quoi. Il évoque parfois le capitalisme dont il n'est pas fan non plus...et heureusement qu'il lui arrive de louer quand même le monde libre que constituait les pays occidentaux. 

    Mais parfois, la description du  culte de la personnalité provoque des fous rires :

    Voici un petit tableau datant de ces années-là. Une conférence du parti dans la région de Moscou. Elle est présidée par le nouveau secrétaire du Comité de rayon, remplaçant celui qui vient d'être coffré. A la fin de la conférence, adoption d'une motion de fidèle dévouement au camarade Staline. Bien entendu, tous se lèvent ( de même que, tout au long de la conférence, tout le monde a bondi de son siège à chaque mention de son nom). Une "tempête d'applaudissements se transformant en ovation" éclate dans la petite salle. Pendant trois, quatre, cinq minutes, elle continue à faire rage et à se transformer en ovation. Mais déjà les paumes commencent à être douloureuses. Déjà les bras levés s'engourdissent. Déjà les hommes d'un certain âge s'essoufflent. Et même ceux qui adulent sincèrement Staline commencent à trouver cela d'une insupportable stupidité. Cependant, qui osera s'arrêter le premier ? Le secrétaire du Comité de rayon, qui est debout à la tribune et vient de lire la motion, pourrait le faire, lui. Mais il est tout récent, il remplace un coffré, il a peur lui aussi ! Car, entre ces murs, parmi ces gens tous debout et qui applaudissent, il y a des membres du NKVD, l'oeil aux aguets : voyons voir que cessera le premier !... Et dans cette petite salle perdue, perdus pour le Chef, les applaudissements se prolongent pendant six minutes, sept minutes, huit minutes!...Ils sont flambés : Ils sont fichus ! Maintenant, il ne peuvent plus s'arrêter, ils doivent continuer jusque la crise cardiaque ! Au fond de la salle, perdu dans la foule, on peut encore un peu tricher, frapper moins souvent, moins fort, moins frénétiquement : mais sur l'estrade, au vu de tout le monde ?!...

    Voilà, j'arrête là, parce que la scène dure un moment, je ne sais plus comment ça finit mais bon, c'est drôle et d'un autre côté, ça ne surprend personne. Ce genre de scène existe encore en Corée du Nord malheureusement.

    Donc, au final, on a peu de descriptions du Goulag. C'est surtout un enchaînement de transfèrements d'une prison à l'autre et au final aussi, on ne sait même pas comment et pourquoi Soljenitsyne est libéré. En fait, là où le récit aurait pu avoir un intérêt et bien, on n'a pas la réponse. 

    Point final. 

    lecture sur liseuse Kindle en septembre 2017, parution en France le 1er juillet 1974 aux éditions Seuil, 446 pages. note : 1.5/5

    Loïc LT

  • CR316 : la chambre des époux - Eric Reinhardt

    la chambre des époux.jpgJ'adore Eric Reinhardt autant qu'il m'agace mais l'éblouissant Cendrillon sorti en 2007 (à propos duquel il dit qu'il ne pourra jamais rien écrire de mieux) fait que je lui excuse beaucoup de choses. Et avouons que cet écrivain secoue un peu le doux ronronnement de la littérature française d'aujourd'hui de part l'ambition de ses romans, leurs constructions et les thèmes toujours très proches de l'actualité qu'il y développe. 

    Figurez-vous la chambre des époux. Il évoque dès le début un roman qu'il aimerait écrire qui s’appellerait une seule fleur mais qu'il ne va pas écrire car il a d'autres projets. Faute de l'écrire, il nous en explique la trame...qui constitue quasiment tout le roman la chambre des époux ! Plutôt cocasse comme "dispositif" comme il dirait. ER s'amuse volontairement avec les codes romanesques et avec ses lecteurs. C'est un fait que l'écrivain n'est pas un amateur du récit banalement chronologique et qu'il profite des libertés qu'offre l'art romanesque quitte à dérouter et à provoquer des mises en abyme vertigineuses (et pardon si c'est un pléonasme). L'autre  caractéristique des romans de ER est toujours se mettre en scène (à part peut-être dans le système Victoria, j'ai un doute), faisant donc de l'autofiction dans ce qu'elle a de plus noble. Il y a donc une base de vrai et ensuite on ne sait plus trop. Ce qui est vrai dans ce récit, c'est que l'écrivain a appris le cancer du sein de sa femme Margot alors qu'il était loin d'en avoir fini avec Cendrillon, que Margot a survécu à ce cancer. Après ce ne sont que conjectures mais ce qui fait 80% de la chambre des époux, c'est à dire une période de la vie de son fils (ou pas) Nicolas (compositeur et chef d'orchestre de génie...) constitue de la pure fiction, c'est justement ce une seule fleur qu'il ne veut pas écrire. Donc, il écrit un roman qu'il n'écrira jamais !

    Le cancer est omniprésent dans ce roman mais il est narré comme un drame autant que comme une bénédiction. C'est la cancer qui donne à l'auteur la force de finir Cendrillon  et c'est le cancer de Marie qui va pousser Nicolas  à se rapprocher d'elle et lui écrire un requiem ( évidemment plus beau que celui de Fauré ou de Dvořák...mais pas celui de Mozart) au risque de briser son propre couple mais il joue franc jeu annonçant à sa femme Mathilde qu'il va la quitter provisoirement pour aller au chevet d'une mourante. 

    J'ai le sentiment que Eric Reinhardt a voulu exorciser par l'écrit ce drame qui l'a touché de près. Alors sans doute, il en fait trop, trop de superlatifs, trop de tout mais en dehors de cet aspect, on ne lui enlèvera pas cette énergie romanesque qu'il parvient à insuffler à ses romans. 

    Des citations, je pourrais vous en mettre plein mais moi qui adore le pot-au-feu, je veux juste vous restituer ce passage parce que je veux parler du pot-au-feu (que ma femme m'a promis de refaire très vite, je regarderai comment elle fait cette fois-ci et je l'aiderai) :

    La savoureuse odeur d'un pot-au-feu cuisiné par Mathilde et mijotant doucement dans sa marmite voluptueuse et argentée embaume l'appartement. C'est plat préféré de Nicolas [...] et c'est lui-même qui le matin, au marché, a fait part  à Mathilde de son envie de pot-au-feu. 

    lecture sur liseuse Kindle en septembre 2017,  Editions Gallimard , parution août 2017. note : 4 / 5

    Loïc LT

  • CR315 : sur les chemins noirs - Sylvain Tesson

    sur les chemins noirs.jpgTout le monde s'imagine seul avec son baluchon tel Rimbaud sur les routes ardennaises (Mon unique culotte avait un large trou. - Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course, Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse. - Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou... ), avec quoi dedans,en tout cas sans thunes et personne qui ne t'attend nulle part. Et bien, si c'était le cas pour moi, je ferais le trajet ouest-est en longeant la Loire et en rejoignant Paris à la confluence de la Seine et de la Marne et je rejoindrai l'est, sans forcément suivre le cours de la Marne comme JP Kauffmann mais en prenant des chemins noirs ainsi que les appelle Sylvain Tesson qui dans se récit relate sa marche initiatique des Alpes vers le Cotentin. 

    L'idée est d'éviter autant que faire ce peut la civilisation (les routes, les métropoles...), ce qui l'appelle donc les chemins noirs, qui correspondent pour moi aux routes jaunes (c'est ainsi que jadis on nommait une route non bitumée située deux cent mètres devant la maison familiale et qui  servait juste à faire passer les tracteurs et les vaches, routes qu l'administration appelle des chemins d'exploitation). Son intention est de retrouver de l'authenticité deux ans après avoir fait l'imbécile en tentant d'escalader le mur de la maison d'un ami après avoir pris un coup de pied de barrique. Dans son périple, il dort soit à la belle étoile, soit sous sa tente Quechua, rencontre des paysans d'un autre temps et des âmes égarées, s'arrête dans des cafés de campagne pour boire de l'eau. 

    Entre deux bois, je lançais mes cris d'amour aux vaches et obtenais un parfois un long "meuh" en réponse. A Saint-Sévère, je lus la presse dans un soleil huileux. Les nouvelles du monde  n'étaient pas pire que d'habitude. Après tout, quand Attila avait débarqué avec des Huns sur les rives de la Loire, la situation n'avait pas dû être plus enviable qu'aujourd'hui.

    Et à Ardentes, au bord de l'Indre, il se demande :

    Les rivières ont-elles la nostalgie des sources ? 

    Alors qu'en même temps, Julien Doré surenchérit dans mon écho  " où vont le silence des rivières ? ", question que je ne comprends pas car une rivière est rarement silencieuse.

    Sylvain Tesson, le visage déformé par l'accident, prend plaisir à passer ses nuits à la belle étoile. " Le bivouac est un luxe qui rend difficilement supportables, plus tard les nuits dans les palaces". 

    A la fin du périple :

    Toute longue marche a ses airs de salut. On se met en route, on avance en cherchant des perspectives dans les ronces, on évite un village, on trouve un abri pour la nuit, on se rembourse en rêves des tristesses du jour. On élit domicile dans la forêt, on s'endort bercé par les chevêches, on repart un matin électrisé par la folie des herbes hautes, on croises des chevaux. On rencontre des paysans muets.

    Et pour finir

    La France changeait d'aspect, la campagne de visage, les villes de forme et la marée montait autour de notre tente, demain il s'agirait de ne pas traîner. Une seule chose était acquise, on pouvait encore partir droit devant soi et battre la nature. Il y avait encore des vallons où s'engouffrer le jour sans personne pour indiquer la direction à prendre et on pouvait couronner ces heures de plein vent des nuits dans des replis grandioses. 

    Il fallait les chercher, il existait des interstices.

    Il demeurait des chemins noirs.

    De quoi se plaindre ?

     

    Ce récit me fait penser un peu aux expériences de François Maspero ( les passagers de Roissy Express), aux travaux de Raymond Depardon et évidemment au périple de Jean-Paul Kauffmann le long de la Marne...et puis aussi à l'essai de Philippe Vasset cherchant à Paris des zones blanches, autant d'auteurs que j'ai évoqués sur ce blog pour le meilleur ou pour le pire (je parle de moi).

    lecture sur liseuse Kindle en septembre 2017,  Editions Gallimard , parution octobre 2016. note : 4 / 5

    Loïc LT

     

  • les flocons de l'été # Etienne Daho


     

    Le nouveau titre de daho est sorti le 1er septembre à 08h00 précise (quand on est fan, on sait ces choses-là, je me comprends) et il préfigure la sortie d'un album en novembre (Blitz). S'en suivra une tournée. J'irai le voir à Rennes, ça fait trop longtemps que je ne l'ai pas vu. Je n'ai pas entendu en live les titres de ces trois derniers albums, ce n'est pas normal quand même !

    Bon, parlons de cette neige estivale. D'abord musicalement parlant, on sait que Daho est un touche-à-tout, qu'il ne se fixe aucun interdit. Dernièrement, il avait sorti un titre très rock (avec un super clip) intitulé 'Paris sens interdit' et aujourd'hui, il nous sort quelque chose de plus électronique, plus aérien, doux comme un flocon. La mélodie est superbe, sur ce point, il n'y a rien à dire. Quelques jours avant le 1er septembre, il avait mis en ligne 10 secondes de la chanson et j'avais adoré direct...par contre, j'étais loin de m'imaginer le texte qui allait suivre. Sur ce point, je suis désolé, ça manque cruellement d'inspiration. Etienne doit le savoir, je ne sais pas, il dit qu'il a écrit le texte très vite, ba je suis désolé mais ça se voit et pour se défausser il répond aux journalistes qu'il ne donnera pas d'explications au texte, que chacun en fera son interprétation. C'est l'argument facile quand on écrit un peu n'importe quoi...encore que là, ce n'est pas n'importe quoi, le texte est tellement simple et basique qu'on le comprend tout de suite : tout ce qui est blanc en été, comme une robe blanche, les étoiles, le soleil voilé, les nuits blanches évoquent pour le chanteur les flocons. La belle affaire. Après, il y a peut-être un message caché et que je me suis levé de ma jambe blanche, alors dans ce cas, je suis le dindon de la farce. Etienne dit que ce titre a des accointances avec "les heures hindoues" et bien, question musique et ambiance, je retrouve beaucoup des "les pluies chaudes de l'été" qui figure sur l'excellent album Eden

    En tout cas, le texte, à la limite, on s'en tamponne le coquillard. Globalement la chanson est belle, apaisante, onirique et je l'écoute en boucle depuis hier. Ce ne sera pas le succès de l'automne (de toute façon, ça fait longtemps que la roi de pop française se fout des hits parades, normal quand on veut faire de la qualité) mais pour les fans, c'est un joli cadeau pour cette rentrée qui s'annonce blanche et lumineuse. 

    Loïc LT

  • recensement des cabines # 84 - Marais-Vernier (Eure)

    Je ne vous oublie pas, chers amateurs de cabines téléphoniques. Et d'ailleurs pour m'excuser de vous avoir faire attendre si longtemps, petit cadeau ( spéciale dédicace à Julie Schittly).

                 

    Pour cette 84ème chronique cabine, je vous emmène au Marais-Vernier, bourg que j'ai visité le même jour que Triqueville, c'est à dire le 16 avril 2017. Pour vous aider, sachez qu'il se situe au nord de Bouquelon, à l'ouest de Saint-Aubin-Sur-Quillebeuf et à l'est de Saint-Samson-de-la-Roque. 

    Lorsque je suis arrivé, j'ai été impressionné par le nombre de carrioles garées un peu n'importe comment . Était-ce jour de pardon ? Ou bien étaient-ce les vêpres ? Mais non, les vêpres ont lieu plutôt l'après-midi. Mais point de tout cela, le cœur du village accueillait une foire aux plantes, l'une des vingt plus grandes foires aux plantes du canton de Bourg-Achard. 

    Je me suis garé tant bien que mal devant le portail d'entrée d'un particulier sur lequel il est inscrit "interdit de stationner", mais je dispose d'une dérogation en tant que recenseur de cabine. C'est ça qui est bien. 

    Ensuite, j'ai flâné dans le bourg à la recherche du Graal tout en admirant ce village typiquement normand :

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    Ah non, zut, je me suis trompé ! J'ai posté une vieille chaumière bretonne qui se trouve du côté de Saint-Jean-Brévelay. Etant breton, ce genre de maison me laisse de marbre mais je suis certain que certains lui trouvent du charme, ne serait-ce que pour son toit fait de tôles rouillées. Bon, revenons au Marais Vernier dont les chaumières ont quand même une autre allure :

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    J'ai fait le tour du bourg, je suis passé par la foire aux plantes mais je n'ai pas vu de cabines. Je partais lorsque je croise un jeune et je lui demande s'il y a une cabine téléphonique dans le village et il me répond gentiment que oui "elle est là-bas, derrière une boutique de la foire aux plantes". J'ai remercié cette racaille aimable et courtois et suis revenu sur mes pas. 

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    L'intérieur de la cabine est guère engageant mais tout fonctionne à merveille. Orange a opté pour la modernité. Pour l'utiliser, il faut sortir un appareil que certains appellent "smartphone" de sa poche et composer le numéro souhaité. Il n'y a même pas besoin de payer sur l'instant, c'est prélevé en fin de mois. T'as différents types de forfait et puis tu peux même "surfer sur le net" comme disent les jeunes. Et cerise sur le gâteau, on peut sortir de la cabine et continuer à téléphoner à l'aide de ce petit boitier. D'ailleurs, je ne suis même pas certain qu'il est utile de rentrer dans la cabine. 

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    Fier de ma découverte, je suis resté un peu sur le marché où  j'ai acheté des graines de pissenlits et de liserons. Un type vendait des taupes vivantes. Si j'en achetais deux, j'avais la troisième gratuite. Trop bien. Ça tombait bien, la terre de mon jardin avait besoin d'être aéré en sous-sol et c'est bien le rôle de ces gentilles bêtes qui en plus de creuser des galeries sous-terre nous offrent de la terre gratuite qui forment ce qu'on appelle des taupinières. Il n'y a que se servir pour rempoter ou pour boucher des trous.  

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    J'ai quitté les lieux et j'ai marché vers la périphérie et suis tombé sur le garage Marie. Dommage que ma 4L n'avait pas de soucis d'échappement car il y avait une " opération spéciale échappement". 

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    j'ai quitté Marais Vernier après ne pas avoir pris un verre ni avoir fait mon plein. 

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    visite le dimanche 16 avril 2017 en matinée.  Maire  : William Calmesnil . Canton de Bourg-Achard en Normandie. 504 Maraiquais fans de la poésie de Arun Kolatkar. Cabine téléphonique, modèle de Paris, utilisant une technologie moderne utilisable à distance. 

    Loïc LT 

  • Gambetti est bien vivant !

    Gambetti (qui n'est pas mort - et donc pas enterré à Triqueville, pas plus que la mémé de Philippe Torreton -) qui existe en vrai et qui est quelqu'un qui m'est très proche tout en étant physiquement éloigné) et Apolline ( qui m'est encore plus proche dont en étant également physiquement éloignée) sont des fin lettrés donc je me permets de leur dire que pseudo ou pas, j'aimerais qu'ils mettent une majuscule à la première lettre de leur pseudo, parce qu'étant maniaque sur la question, je m'emmerde à corriger cette erreur non fondamentale. 

    Mais ceci est peu de de chose avec l'objet de cette note qui a pour but avant tout de revenir sur le texte que Gambetti a posté hier en commentaire. Je le retranscris ici. 

    Bonjour Loïc,

    Pourquoi un texte personnel, égocentré comme "La promesse de l'aube" a-t-il connu un succès mondial ? Et "Vipère au poing?" Et..... Je pense que dans son enfance se trouve un monde. Que l'on veut fouiller ou pas. Que l'on exprime ou pas. Voilà deux textes: sur le père, sur la mère. A toi de dire si l'intérêt dépasse le personnel.

    Gambetti

    Lorsque je passe sur le quai logistique, après quelques cafés, alors que les palettes de poissons surgelés passent, se chargent et se déchargent ; quand les contrôles s'enchaînent avec logique, quand les gestes trouvent naturellement leurs places, comme les pièces idoines d'un puzzle, une sorte d'emphase, un lyrisme me prend. Alors, c'est bien moi qui siffle « Summertime », mais c'est une réminiscence de mon père qui s'accompagnait ainsi au piano, sur la mezzanine du salon. Etait-ce alors l'été de sa vie ? Ou alors comme tout, c'était plus compliqué ; comme cet air triste finalement, avec des paroles optimistes. 
    Des temps meilleurs sont arrivés, et je les siffle à ta manière, en ton honneur. Dans les entrepôts frigorifiques, hantés de fantômes capitonnés, j'entretiens ce dernier lien sonore, cet air simple, infiniment modulé de variations. 
    Et je les siffle en orchestrant mes journées frénétiques. Comme toi qui avais besoin de construire. Tout le temps. Soir et week-end. Toi qui transformas en vingt cinq ans une bergerie en mas provençal avec dépendances. Toi qui entretenais un hectare de terrain. Toi qui me traitais de cossard, me disais que j'aurais pu faire polytechnique. J'ai finalement, vingt ans après, pris le même chemin productiviste que toi. Pour quoi ? Pour qui ? A qui ai-je à prouver ma valeur, sinon toi ? Et toi, à ton époque, était-ce la même impérieuse et muette obligation d'être à la hauteur des attentes du père? Et ces attentes étaient-elles atteignables ?
    Le père semble être celui qui a le pas suffisamment sûr. Celui qui a assez voyagé dans ses émotions pour supporter le tremblement des générations.

    Notre propriété de Roquevaire se termine par un mur de pierres sèches, une restanque, comme on l'appelle couramment en provençal. Si l'on suit la déclivité du terrain, l'ouvrage prend de la hauteur, mais, soudain, il bute sur un banc de calcaire qui transperce terre et végétation et occupe tout le fond du vallon. Cette roche est fendue à sa base, et, de cette fente suinte un mince mais continu filet d'eau pure, transparente. Une eau qui étincelle parmi les herbes brûlées alentour et qui alimente un gourd, une vasque naturelle, immobile, ceinte de calcaire gris. Ce qui choque, c'est que la végétation avoisinante n'a pas connaissance de cette exception. Autour, tout est sec.
    Lorsqu'on plonge ses yeux dans cette épaisseur de pur, s'agite une multitude de gammares. Parfois, si l'on soulève une pierre, une sangsue se contorsionne, signe de ponctuation dérangé dans son repaire. Mais, ce qui finit par attirer l'attention, dans ces quelques vingt mètres carrés, dans ce lac miniature, ce sont ces traînées de fine poussière beige, qui, si on les suit du regard, nous amènent à détecter de petits fuseaux posés sur leurs nageoires. Des poissons ! De petits chevaines qui m'observent du plus loin que le cirque d'eau le permet. Ils sont la preuve que la vie existe, ici, en continu ! Et si l'on regarde attentivement plus bas, il y a bien ce même ru qui repart entre les pierres et dévale vers le village loin, en contrebas.
    Ce rêve est récurrent ces derniers temps. Pourtant, il n'y a jamais eu de source chez nous. Tout juste un flot de boue qui, lors des pluies méditerranéennes d'automne, emprunte le chemin de moindre pente trois ou quatre jours par an. 
    Une nouvelle vérité sur ma mère se trouve dans cette vision onirique, je le sais. C'est comme si ce climat de relations arides, théâtre de brèves et violentes explications pluvieuses, avait jusque là interdit de remarquer une constance, une présence. Muette et pure.

    Je reviens déjà sur le préambule. Gambetti écrit " Je pense que dans son enfance se trouve un monde". J'ai rajouté le "dans" car je pense qu'il l'avait oublié, sinon la phrase n'a pas de sens. Alors, oui, non seulement notre enfance est un monde à part entière et ce monde n'est pas fermé puisqu'il conditionne ensuite toute notre existence. Je suis intimement convaincu de cela (c'est Freudien donc banal,  je sais) et excusez-moi d'y revenir sans cesse mais c'est justement devant le constat que bien que l'enfant se construit beaucoup lui-même et sait "encaisser des coups" plus qu'on ne pense, le cadre et la stabilité familiale, l'attention que les parents lui portent, l'écoute, les confidences etc sont essentiels. Pour avoir vécu une enfance pour le moins perturbée, j'essaie avec ma femme d'apporter à nos filles ce que n'ai pas eu la chance d'avoir ; de l'affection et le bagage pour rentrer dans le monde adulte. 

    Ensuite, "le poème en prose". Je ne te le dis pas pour te faire plaisir, je n'ai pas envie de te cirer les pompes mais je le trouve sublime, extrêmement bien construit. Subrepticement, tu arrives à transporter le lecteur d'un entrepôt frigorifique à ta maison familiale au milieu de la garrigue dans le sud de la France et le lien se fait grâce à cet air qui te revient, comme une madeleine de Proust et qui te rappelle ton père le jouant du piano dans sa villa, ce père " bâtisseur" qui a cru en toi mais qui te traitait de "cossard". On se retrouve plongé dans une villa du sud, bien loin du quotidien et des odeurs de l'entrepôt. On devine que la description de cette maison de ton enfance, de son jardin sec, où la végétation règne tout en subissant la sécheresse est une métaphore. Tu fais aujourd'hui des rêves d'eaux, de lac, de poissons ( lien avec l'usine où tu travailles). Cette eau justement n'est-elle pas une image du liquide amniotique dans lequel tu as baigné ? L'image de la mère arrive ensuite naturellement, sa présence mais en même temps son mutisme et sa pureté. A la lecture de ce texte, elle me reste mystérieuse. 

    C'est un poème imagé, très fort, cruel aussi, sur la complexité de la relation parents-enfant et lorsqu'on réalise ce qui a nous a manqué dans les premières années de nos existences. Je ne sais pas si je suis dans le vrai mais même si nos parcours n'ont rien à voir, je me retrouve un peu dans ce texte (que j'aurais été incapable d'écrire). Et j'ajoute même si c'est hors-sujet que je suis toujours persuadé que l'on devient vraiment un homme que lorsque le père est mort, malgré toute l'affection qu'on peut lui porter, malgré le désarroi quand on apprend son décès. Le vide.  Tant que son père est en vie, le fils (et la fille aussi mais là, je suis moins certain) même inconsciemment ne vit que pour prouver à son père ce qu'il est capable de faire. Il ne vit que sous le regard (même absent) du père. Bon, désolé, si c'est de la psychanalyse de comptoir mais c'est tout ce que je peux écrire ce soir. En tout cas, chapeau bas pour le texte. 

    Loïc LT 

     

  • CR314 : une vie française - Jean-Paul Dubois

    une vie française, Jean-Paul DuboisJean-Paul Dubois est fan de l’auteur américain Philip Roth (qui n’a jamais obtenu le Nobel de littérature ce qui est scandale quand on sait que le chansonnier de bazar, Bob Dylan l’a obtenu) et cela se ressent dans ce roman (qui est sans doute un peu autobiographique).

    Le parti pris de l’auteur a été d’associer la vie de ses protagonistes à celle de la vie politique française. D’ailleurs, les chapitres sont découpés en ce sens. On part de Gaulle pour finir en cour de mandat de Jacques Chirac. Tout commence au lendemain de la guerre à Toulouse. Le narrateur, Paul Blick est le fils d’un garagiste concessionnaire Simca et d’une mère corrigeant des articles de presse.

    Ensuite, bien que modeste et désabusé , Paul vit mille et une vies. Un temps rockeur, un temps journaliste, un temps photographe etc etc, sa vie suit le cours de l’histoire. Pleinement acteur des événements de mai 68 et donc ultra gauchiste dans l’âme, comme beaucoup dans son cas, il se voit rattrapé par la vie réelle au point de vivre après plusieurs liaisons avec une fille patronne inflexible d’une boite vendant des piscines à l'international. Par ailleurs, en sa qualité de photographe, il publie deux livres à succès sur le thème des arbres qui le mettent à l’abri de tout souci financier.

    Mais tout ce qui brille n’est pas or. Paul a du mal à se jeter dans ce monde ultralibéral à mille lieux de ses idéaux. Il trompe sa femme, Anna, comme il apprendra sur la fin qu’elle le trompait aussi et n’avait que faire de ses piscines.

    Finalement, tout part à vau l’eau (décidément, je n’ai pas de chance avec mes romans d’été). Après la mort accidentelle de sa femme, il est au bord de la banqueroute devant payer les dette laissées par son épouse. A la fin, il finit jardinier à son compte (après avoir été un vendeur de best sellers).

    On sent bien la patte de Phillip Roth dans ce roman mêlant la grande et la petite histoire. Son seul défaut est de manquer de crédibilité. Songez par exemple que Paul, non seulement devient millionnaire après avoir photographié des arbres (ce qui enlève au héros son côté français moyen) mais en plus il reçoit un coup de fil de Mitterrand lui demandant une série de photos ce qu'il refuse par idéologie. Ça en fait trop pour en faire un roman du genre “règne animal”. A l’actif, c’est un beau panorama de notre société de l’après-guerre jusqu’aux années Chirac et surtout rappelle le sérieux retournement de veste comme beaucoup de soixante huitards, d’un mec qui finalement accepte de plonger corps et âme dans le bain du libéralisme tout en étant conscient de ce rétropédalage.

    Le drame pour le narrateur, c’est que dans cet univers économique impitoyable où la famille pourrait servir un peu de garde-fous, il n’y trouve que conflits politiques (avec ses parents dans un premier temps) et avec Anna, ouvertement de droite mais dont la fin funèbre fait semer le doute.

    Des drames, de l’adultère, de la politique, le train-train quotidien (mais tumultueux souvent)...Jean-Paul Dubois fait évidemment du Philip Roth à la française dans un style simple et chronologique. Ce roman qui a reçu plusieurs prix (Fémina et Fnac) date de 2004 et nous replonge sans nostalgie dans la deuxième partie du XXème siècle avec ses francs et ses petits garages au coin de la rue.

    lecture : juillet 2017, éditions de l’Olivier, parution 2004. note : 4 / 5 (oui j’en ai marre de mettre de 4.5/5)

    Loïc LT 

  • Tentative d'écriture d'un poème surréaliste.

    Canicule, 

    Je viens juste de ne pas me réveiller. Du balcon mouvant, je vois des gens qui montent la rue à reculons éjectant des poussettes en papier. Les pierres des murs ne parlent pas, n’en déplaise à Guillevic, mais elles sont moites et ont si chaud qu’on pourrait les modeler pour en faire des poupées en bois.

    Sur les toits qui s’effondrent avec panache, des armées de volatiles forment des bataillons avant de se lancer sur les bipèdes venus de Skagen et de Kungsbacka.

    L’église romane dont on voit une excroissance défier les falaises se transforme en une espèce d’immense bidet magnifique ce qui ne provoque pas l’étonnement de tous ces idiots scandinaves qui marchent désormais en avant mais à quatre pattes.

    A Balazuc, quand il fait chaud, c’est ainsi que ça se passe...ou pas.

     

    Loïc, le 08.07.2017, Balazuc.

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  • CR312 : Balazuc, mémoires de pierres - John Merriman

    5151HPWVFQL._SX328_BO1,204,203,200_.jpgJ’ai dit que ce blog était fermé, je n’ai pas dit que je n’allais plus l’alimenter. C’est comme quelqu’un qui tient un bar. Il peut le fermer mais continuer à y errer et se boire des bières. Bon, comme c’est fermé, je peux me lâcher.

    Cette première quinzaine de juillet, nous sommes allés en famille dans un gîte niché au cœur du petit village de Balazuc, creusé à flanc de falaise au bord de l’Ardèche. A notre arrivée, les propriétaires nous ont gentiment accueilli et à tout hasard, je leur ai demandé s’ils possédaient de la documentation sur le village. Quelques jours plus tard, Franck est revenu mais je n’étais pas là, il a transmis un livre à ma fille en lui disant que ce n’était pas le livre qu’il voulait me prêter mais que celui-là ferait l’affaire.

    Et pour cause ! Je ne sais pas quel autre livre il avait en tête mais après la lecture et après des recherches, je n’ai pas repéré d’autres bouquins sur Balazuc. Il s’agit d’un essai un peu autobiographique écrit par John Merriman, un écrivain américain, amoureux de la France (de son histoire surtout) et qui est tombé sous le charme de ce village improbable au point d’y acheter une maison dans les années 80.

    J’ai littéralement dévoré ce récit très documenté dans lequel en racontant l’histoire de ce petit bourg, de la révolution à la fin du XXème siècle, l’écrivain en profite pour nous rappeler l’histoire de la France des campagnes, de ses petits villages loin de Paris, tirant parfois bénéfices, parfois pas de la Grande Histoire via l’industrialisation,  les deux grandes guerres et un point sur lequel l’auteur s’arrête beaucoup : les écoles de Balazuc tiraillées entre les fervents d’une école catholique et tenants d’une école républicaine. Les anecdotes sont nombreuses, les différents entre le curé et le maire (quand ce dernier était républicain) faisant inexorablement penser à Don Camillo ! On frise parfois le roman.

    Mais en dehors d’être devenu l'un des "100 plus beaux villages de France” et donc une attraction touristique,  Balazuc  a subi le même sort que bien d'autres villages reculés que ce soit Persquen ou Triqueville: l’exode rural a vu sa population fondre. Aujourd’hui, il reste quelques commerces ouverts qu’en été (sauf un)  mais la plupart des volets restent fermés. Quelques vrais Balazuciens y vivent encore mais l’essentiel des maisons sont des résidences secondaires.

    Je pourrais vous parler de l’élevage du ver à soie dont Balazuc a pleinement profité car les mûriers sont peu exigeants et les terres autour du village sont aussi rocheuses que les allées du bourg, de ses vignes, de sa garrigue environnante, ses arbres desséchés et le chant assourdissant des cigales, de la construction du pont enjambant l’Ardèche voulu par un député de la IIIème république afin de bien faire comprendre à ces irrésistibles Ardéchois les profits qu’ils pourraient tirer de la république au détriment de la monarchie et de l’obscurantisme catholique. Je pourrais vous dire beaucoup de choses sur Balazuc pour y avoir vécu quelques jours et pour avoir lu ce récit. Dommage que ce blog soit fermé -)

    Et cerise sur la gâteau, j’ai eu la chance de rencontrer l’écrivain qui m’a accueilli à bras ouverts et m’a invité à revenir deux jours plus tard avec ma famille. J’ai pris l’apéro le plus copieux de ma vie. Il parle très bien le Français mais comment en serait-il autrement quand on a donné des cours dans les universités françaises ?  C’était une chouette rencontre. John Merriman possède l’accent américain, fait un peu dans la démesure mais il est imprégné de culture française, ce qui en fait un personnage attachant.

    Si tous les américains étaient aussi curieux qui lui, ils n’auraient pas voté pour un charlot (que John Merriman honnit, va sans dire).

    lecture : juillet 2017,  édition Tallandier : 368 pages, parution : 2002 et en Français en 2005, note 4.5/5

    Loïc LT

  • J'ai pris ce gros nuage...

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    J’ai pris ce gros nuage

    Ce soir au crépuscule,

    Il partait en voyage

    Avec ses particules

     

    Allait-il vers l’Orient

    L’Occident ou l’Afrique ?

    Qu’en sais-je des errements

    Des corps atmosphériques…

     

    Mais cinq minutes après

    Quand je suis revenu

    Tout était bleu, mais qu’est

    Donc mon stratus devenu ?

     

    Éphémère ou blagueur

    Me demandais-je ensuite ?

    A quoi bon chercher l’heure

    De ce qui n’est que fuites...

     

    Loïc LT (25.04.2017)