Ah ba, je croyais avoir fait le compte rendu de l'établi mais non en fait. Comme le match de foot est chiant et que je suis seul et bien pourquoi ne pas m'y mettre, ça fait quand même déjà trois semaines que je l'ai lu. J'ai découvert Robert Linhart dans l'émission Hors-Champs de Laure Adler sur France Culture. Il fut dans les années 60 l'un des principaux leaders d'un mouvement maoïste (avant de couler une bielle par la suite, ce que raconte sa fille Virginie dans le jour où mon père s'est tu) et à ce titre, avec ses camarades, décision fut prise de s'établir incognito dans les usines afin déjà de voir en vrai la réalité du monde ouvrier et puis de tenter de semer les graines de la révolte. Fin 1968, quelques mois après la Grande Révolution donc, Robert a choisi sa proie : ce sera l'usine Citroen de Clichy où l'on fabrique essentiellement des 2CV. Dans l'établi (écrit 10 ans après l'expérience et n'ayant pas pris de note, en faisant appel à se seule mémoire), Robert raconte ces quelques mois parmi les ouvriers. Il raconte comment il se fait embaucher très facilement (on ne s'embarasse pas trop avec les formalités à cette époque-là) et comment les premiers jours, il ne parvient pas à faire ce qu'on lui demande tant il est emprunté. Bon an mal an, il arrive à se stabiliser à un poste et là, au fil des semaines, tranquillement il essaie de rentrer en contact avec les ouvriers, afin de voir ce qu'ils ont dans le ventre. Il est déçu de constater un certain fatalisme chez ces derniers et puis surtout il réalise que ses belles idées révolutionnaires ne pèsent pas lourd à côté du poids du quotidien. Le système répressif très subtil mis en place par Citroen est par ailleurs implacable. Les petits chefs lèchent le cul des grands pontes et l'organisation de la production empêche toute vélléité contestataire. Robert se trouve un peu coincé et se désespère.
Et puis arrive un jour où une nouvelle injustice s'abat sur les ouvriers : la direction décide subitement que les jours non travaillés pendant les événements du printemps 68 doivent être récupérés (je schématise) et que donc tous les salariés vont devoir finir une heure plus tard tous les soirs pendant quelques mois. Devant le manque de réactivité du syndicat (qui en prend pour son grade pendant tout le récit tant il apparaît comme étant à la botte de la direction), Robert et quelques autres meneurs décident de passer à l'attaque. Un jour où tout le monde devait finir à 18:00 au lieu des habituels 17:00, un débrayage a lieu, pas très bien suivi les premiers jours et puis, petit à petit le mouvement prend de l'ampleur. Robert est heureux, il a ce qu'il voulait. Mais la direction réagit, fait du chantage auprès des africains en situation plus ou moins irrégulière. Certains sont même virés. Robert est fourgué dans une annexe en dehors de l'usine, il perd le contact et le mouvement se termine en queue de poisson. Par ailleurs, on a découvert que Robert était un intellectuel de gauche. Démasqué il est viré mais il s'en fout, il n'avait pas prévu rester. Et de toute façon, le jour où il quitte l'usine, celle-ci ferme définitivement ses portes.
C'est un document remarquable, non seulement sur le combat contre les puissances obscures du capitalisme mais aussi sur le quotidien des ouvriers dans les années 60. La fraternité entre tous ces gens de nationalités différentes (beaucoup d'africains et de yougoslaves) est touchante. Robert retranscrit à merveille la petite histoire de chacun, les drames, les joies car (clin d'oeil à Franck Magloire qui a eu la gentillesse de m'envoyer un petit mail),
les bourgeois s'imaginent toujours avoir le monopole des itinéraires personnels. Quelle farce ! Ils ont le monopole de la parole publique, c'est tout. Ils s'étalent. Les autres vivent leur histoire avec intensité, mais en silence'
Même si depuis, beaucoup de choses ont changé et que, bon an mal an, la condition des ouvriers s'est quand même améliorée, le rapport de force entre les dominants et les dominés est toujours là, mais on ne sait plus trop qui sont les dominants, dans quel tour de quel pays ils prennent des décisions ayant pour but d'augmenter les marges. Il faut lire l'établi, qui par ailleurs est un bijou littéraire. Bravo Robert. Ce monde de fous a besoin de visionnaires comme toi.
lecture : juillet 2012, éditions de minuit, kindle, note : 4/5
loïc LT
Jonathan Franzen est le "grantauteuraméricain" du moment. Télérama le dit, Arte le dit et surtout le NY Times dont il a fait la une l'affirme. Les américains sont comme ça, il leur faut tout le temps un écrivain au dessus du lot, un écrivain qui écrase tout. Mais pas n'importe quel écrivain...car Jonathan Franzen n'est pas le Marc Levy ou le Guillaume Musso US. Rien à voir. Franzen est un vrai grand auteur qui fait de la littérature, n'est-il pas. Accesoirement nous fait savoir un récent reportage d'Arte qui lui était consacré, Franzen est ornithologue et n'hésite pas à enfourcher son 4X4 pour aller étudier les piafs dans le désert de Mojave. Par ailleurs, mr Franzen en a marre qu'on lui pose toujours les mêmes questions sur le 11 septembre 2002.

Au début du XXe, sur la côte est des Etats-Unis, Martin Eden, marin au long cour, costaud, bagarreur traine sa misère de ports en ports jusqu'au jour où sauvant un jeune bourgeois d'une bagarre, il fait son entrée dans une maison bien tenue où il rencontre Ruth, une jolie et frêle demoiselle dont il devient éperdument et secrètement amoureux. A partir de là, il n'a qu'une ambition : la conquérir et pour ce, il décide de parfaire son bagage intellectuel. Partant de très bas, il passe ses journées en bibliothèque et rentré dans sa piaule, il dévore des bouquins de toutes sortes jusqu'au bout de la nuit. Très vite, il se sent la fibre littéraire...il découvre qu'il dispose d'une grande aisance pour l'écriture. Il se met à écrire des poèmes, des nouvelles, des essais en tout genre qu'il expédie à des magazines. Tout est refusé. Pendant ce temps, Ruth finit par lui déclarer son amour mais lui demande de se trouver une situation car jamais ses parents n'accepteront qu'elle se marie avec un fainéant, pauvre et bourlingueur. Mais Martin Eden, croyant en son génie refuse. Il est convaincu que ce qu'il écrie finira par rencontrer le succès. En attendant, il sombre dans la pauvreté, passe des jours sans manger et doit déposer vêtements et vélos au Mont-de-Pieté. Il est rejeté de tous, saus de Brissenden un ami lettré et alcoolique avec qui il passe ses soirées à refaire le monde. Martin Eden s'intéresse aussi à la politique. Anti-système, il n'en reste pas moins anti-socialiste. Martin est nietzchéen.
Alors que j'avais aux alentours de quinze ans, je me rappelle clairement que m'étant mis subitement à lire, j'avais englouti tous les Agatha Christie que contenait la bibliothèque de Languidic, quelques autres auteurs britanniques (P.D James, Patricia Highsmith...), et ensuite, je m'étais replié sur des auteurs français dont Maurice Leblanc. J'ai découvert alors les Arsène Lupin. Je me souviens d'une jubilation intense. Par contre, je ne me souviens plus vraiment des titres que j'ai lus. Peut-être le bouchon de Cristal en faisait-il partie. En tout cas, je n'en avais pas relu depuis cette période.
J’aurais tant aimé adorer cet écrivain que je suis déçu de devoir faire part de ma déception suite à la lecture de ce roman qui n’a de beau et d’original que le titre. Un détour par la vie, quand même, quoi ça promettait nan ? Gambetti, lui, évoluait dans extinction de Thomas Bernhard, ça en jette aussi, mais l’intérieur a tenu ses promesses et puis aujourd”hui, des mois après, extinction est toujours présent grâce à ce Gambetti, qui est devenu, en quelque sorte, l’agrégateur imaginaire de tous mes interlocuteurs et antagonistes.
Au début du XXème siècle, le contribuable allemand Hans Castorp, ingénieur de 23ans, fils et orphelin de bonne famille rend visite à son cousin Joachim Ziemssen qui se soigne d’une tuberculose au sanatorium Berghof qui se situe dans les Alpes suisses sur la commune de Davos (connue aujourd’hui pour être un lieu de rencontre pour les communistes du monde entier). A la base, il ne doit y rester que 3 semaines, ce qui est déjà pas mal pour une visite de courtoisie, mais à l’aise dans cet endroit où il n’y a rien d’autre à faire que de s’allonger sur des chaises longues et de refaire le monde entre camarades de la haute société, il trouve le prétexte d’une température corporelle légèrement excédentaire (37°4...tu parles) pour prolonger le séjour avec l’assentiment du docteur Hofrat Behrens, médecin en chef du Berghof (épaulé par l’excellent docteur Krokovski qui oblige tous les “malades” (entre guillemets car les ¾ des pensionnaires du Berghof sont des malades imaginaires, Hans Castorp le premier) à venir écouter ses conférences psychanalytiques.
S’il y a un portrait de Rimbaud qui me plaît et qui correspond à l’idée que je me fais du poète, c’est bien celui réalisé par Henri Fantin-Latour dans ce tableau. Assis près de son ami Verlaine ( en train de se boire un pichet de rouge à lui tout seul), il tourne le dos aux autres (Léon Valade, Ernest d’Hervilly, Camille Pelletan, Pierre Elzéar, Emile Blémont, Jean Aicard, poètes qui auront laissé une trace dans l’histoire que par leur présence dans ce tableau). Dans ce groupe des “vilains bonshommes”, il apparaît clairement qu’il n’y a que deux vrais vilains bonshommes : Verlaine et Rimbaud, le couple qui fait scandale dans le tout Paris de l’époque. Scandale et génie, tout est là.
Je ne vais pas vraiment faire de compte rendu de ce roman policier (mais globalement, mes comptes rendus en sont-ils vraiment ?). Juste dire qu’il remplit pleinement les conditions qui font un bon polar : une bonne histoire et du suspens. C’est le deuxième Arnaldur Indridason que je lis et ce ne sera pas donc pas le dernier. Il y en a quelques autres et cette idée me réjouit. J’avais découvert cet auteur lors de ma suite islandaise pendant l’été 2010 avec