Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
Des Peaux-rouges criards les avaient pris pour cibles,
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.
- Un fleuve, Chloé, c'est une rivière qui se jette à la mer. C'est important que tu le saches, car à ton âge et pendant bien des années, je croyais qu'il n'y avait que quatre fleuves en France : la Seine, le Rhône, la Loire, la Garonne. Mais ce n'est pas vrai et d'ailleurs, il parait qu'il y a des fleuves qui ne font que quelques kilomètres.
- Bon, alors, le "je" qui descend le Fleuve est un bateau. Tu me diras qu'un bateau ne parle et ne pense pas..mais le poète peut tout se permettre, c'est ce qui fait la beauté de la poésie. En l'occurrence, quand on fait parler un objet, on appelle ça "personnification". Le poète fait du bateau une personne. Pendant tout le poème, il en sera de même.
- Le bateau descend un fleuve et non pas des fleuves comme dit Rimbaud. On ne peut pas descendre (c'est à dire aller vers la mer) plusieurs fleuves à la fois. Il ne s'agit pas d'une erreur évidemment mais je pense que pour des raisons métriques (je ne vais pas te parler de ça en détail), il a dû mettre fleuve au pluriel.. Et puis, ce n'est pas si choquant : en utilisant le pluriel, il veut aussi dire qu'il s'agit de n'importe quel fleuve.
- Jadis, quand les bateaux n'avaient pas de moteur, des gens qu'on appelait des haleurs tiraient les bateaux depuis le chemin de halage. Mais je crois que ça pouvait être des chevaux aussi. Mais ici, Rimbaud parle d'hommes...capturés par des peaux-rouges, c'est à dire, des indiens. Les peaux-rouges capturent les haleurs, si bien que le bateau se retrouve tout seul. Non seulement, les haleurs sont capturés mais ils sont déshabillés et cloués à des poteaux. Assez cruel tout ça donc, mais ce n'est qu'une image utilisée par Rimbaud pour signifier qu'on se trouve dans un pays lointain et qui donne une touche d'exotisme au poème.
Voilà pour le premier quatrain. Il y en a 24 à suivre !