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  • "le bateau ivre" expliqué à Chloé : strophe 1

    18 10 2008056.JPG

    Comme je descendais des Fleuves impassibles,
    Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
    Des Peaux-rouges criards les avaient pris pour cibles,
    Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

     

    - Un fleuve, Chloé, c'est une rivière qui se jette à la mer. C'est important que tu le saches, car à ton âge et pendant bien des années, je croyais qu'il n'y avait que quatre fleuves en France : la Seine, le Rhône, la Loire, la Garonne. Mais ce n'est pas vrai et d'ailleurs, il parait qu'il y a des fleuves qui ne font que quelques kilomètres.
    - Bon, alors, le "je" qui descend le Fleuve est un bateau. Tu me diras qu'un bateau ne parle et ne pense pas..mais le poète peut tout se permettre, c'est ce qui fait la beauté de la poésie. En l'occurrence, quand on fait parler un objet, on appelle ça "personnification". Le poète fait du bateau une personne. Pendant tout le poème, il en sera de même.
    - Le bateau descend un fleuve et non pas des fleuves comme dit Rimbaud. On ne peut pas descendre (c'est à dire aller vers la mer) plusieurs fleuves à la fois. Il ne s'agit pas d'une erreur évidemment mais je pense que pour des raisons métriques (je ne vais pas te parler de ça en détail), il a dû mettre fleuve au pluriel.. Et puis, ce n'est pas si choquant : en utilisant le pluriel, il veut aussi dire qu'il s'agit de n'importe quel fleuve.
    - Jadis, quand les bateaux n'avaient pas de moteur, des gens qu'on appelait des haleurs tiraient les bateaux depuis le chemin de halage. Mais je crois que ça pouvait être des chevaux aussi. Mais ici, Rimbaud parle d'hommes...capturés par des peaux-rouges, c'est à dire, des indiens. Les peaux-rouges capturent les haleurs, si bien que le bateau se retrouve tout seul. Non seulement, les haleurs sont capturés mais ils sont déshabillés et cloués à des poteaux. Assez cruel tout ça donc, mais ce n'est qu'une image utilisée par Rimbaud pour signifier qu'on se trouve dans un pays lointain et qui donne une touche d'exotisme au poème.
    Voilà pour le premier quatrain. Il y en a 24 à suivre !

  • dans la bibliothèque...

    IMGP5835.JPGDans la bibliothèque
    Que l'on vient d'acquérir,
    Y'a une boule aztèque
    Qui peut se mettre à luire.

    Tout en haut, la pléïade
    A le droit aux honneurs
    Bien qu'étant un peu fade
    Diront les emmerdeurs.

    Sinon, y'a comme une oeuvre
    D'art, me laissant pensif,
    Mais qui fournit la preuve
    De mes exploits sportifs.

    Un panier en osier
    Qu'on acheta d'occase,
    Semble s'être imposé
    Dans l'une des huit cases.

    Mais l'essentiel est dans
    Les objets qui viendront
    Remplir au fil des ans
    Ce meuble moribond.

    loïc lt, 07.11.08

  • le droit à ceci et le droit à cela, vu par Alain Fleischer


    9782020680158.jpg" Dans la France des débuts du vingt et unième siècle, le credo des citoyens est leur droit à tout : droit au travail, droit au logement, droit à l'éducation, droit à l'alimentation, droit aux vacances, droit de grève, droit à la médecine, droit à la sécurité, droit à la retraite, droit à la maternité,  et à la paternité... comme si la nation qui avait inventé les droits de l'homme n'avait désormais mieux à faire que de décliner les grandes idées en sous-produits, à mettre en application les idéaux par les services d'une Administration générale du Bien-être - le bonheur est encore une autre affaire, mais on y vient...-, et comme si le but d'une société était de décréter des droits, de définir le citoyen comme le bénéficiaire de ces droits, de lui en assurer la jouissance, la protection; d'enfermer l'individu dans cette prison de ses droits qui l'empêche de penser à tout ce qui ne lui est pas dû automatiquement, et qui ne lui serait accessible que par un désir singulier, un effort personnel, la volonté individuelle, l'ambition d'un seul  de refuser l'ambition commune à tous. Il serait bien beau et généreux de décréter que les aveugles ont le droit de voir, que les sourds ont le droit d'entendre, et que toute privation de la vue ou de l'ouïe est une injustice de la société plus encore qu'une erreur de la nature. Bien sûr, toute disposition est souhaitable pour diminuer la souffrance ou l'inconfort d'un handicap, et pour rendre la vie plus supportable parmi la société à ceux qui en sont frappés, mais combien belle serait la loi qui donnerait au citoyen la conscience des aveuglements et de la surdité auxquels conduit la perversion des idéaux ! Tôt ou tard, tout citoyen connaît une situation où il se sent lésé, tôt ou tard, lui vient l'idée qu'il peut obtenir un dédommagement, car tout malheur qui le touche, petit ou grand, doit avoir un responsable, un coupable, socialement, politiquement identifiable, et tout dommage, même affectif ou moral, est chiffrable en euros."

    prolongations, Alain Fleischer, p178, éditions Gallimard.

     

  • le nouveau marque-page

    Imgp5756.jpgMon nouveau marque-page représente une toile de Jan Groenhart intitulée endless landscape. Il mesure 14 cm, ce qui signifie qu'il n'est pas trop adapté pour les livres de petit format comme les poches par exemple. On peut toujours l'utiliser pour un poche mais comme il ne dépasse pas, le lecteur ne peut pas voir de loin où il en est dans l'avancement du livre. Tout au plus, verra-t-il un écart mais ce ne sera pas aussi clair qu'un beau marque-page qui dépasse (mais pas trop). Non, perso , pour les petits livres, je vais continuer à utiliser mon ancien marque-page, plus petit, qui représente un petit torrent dans la forêt de Brocéliande. Ça ne me dérange pas de continuer à l'utiliser, vu qu'il marche encore et qu'il n'est pas trop usé.
    J'ai acheté ce nouveau marque-page dans la grande surface culturelle d'une petite ville normande abritant notamment une sous-préfecture, quelques églises, des remparts et pas mal de magasins. Enfin non, j'avais prévu l'acheter mais au moment de passer en caisse, j'ai oublié de le retirer du livre où je l'avais rangé, si bien que la caissière n'en a rien vu. Je jure sur la tête de mes filles que je ne l'ai pas fait exprès. (si cela avait été prémédité, je n'aurais pas été aussi cool et blagueur lors du passage en caisse - car à chaque fois que j'ai chapardé des petites choses en magasin, cela fut toujours au prix d'un immense stress et de sueurs très compromettantes).
    Le livre inaugurant ce nouveau marque-page est prolongations de Alain Fleischer, ce qui est, il faut le dire, un beau début, tant ce livre est beau et épais. C'est un pavé de près de 600 pages édité dans la collection l'infini de Gallimard. J'essaie toujours de donner pour la première utilisation de mes nouveaux marque-pages le meilleur et le plus beau de ce que je dispose. Pour l'instant, j'en suis à la page 54 et et le marque-page ne s'est pas encore trompé, c'est à dire que j'ai toujours réouvert le livre à la page où je l'avais refermé. Au début, il faut se méfier, car je me suis laissé dire que certains marque-pages peuvent être très blagueurs et changer de pages tous seuls à un moment où le lecteur est hors de portée de vue. C'est la raison pour laquelle, lorsque je discute avec un lecteur qui me dit ne rien comprendre à tel ou tel roman, je me demande en moi-même si cette incompréhension ne provient pas d'un déplacement fortuit du marque-page. J'émets parfois l'hypothèse à certaines personnes qui pourraient comprendre la chose mais à chaque fois elles m'ont regardé bizarrement où alors elles se sont mises à rire. Les gens ne s'imaginent vraiment pas combien certains marque-pages peuvent être farceurs.
    Mais là, donc, mon nouveau marque-page, non. Ça a l'air d'être un sérieux. On va lui souhaiter longue-vie et bonne entente avec le lecteur sympa !

  • CR59 : Meuse l'oubli - Philippe Claudel

    IMGP5681.JPGC'est en flânant cet été sur un marché de la région que je suis tombé sur ce bouquin. Je dois dire que le titre m'a tout de suite interpellé (bien plus que l'auteur que je n'avais jamais lu). Meuse l'oubli, Meuse comme le fleuve qui arrose Charleville, cette ville où j'ai passé il y a quelques années deux jours qui resteront à jamais gravé dans ma mémoire.


    Comme je descendais des Fleuves impassibles,
    Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
    Des Peaux-rouges criards les avaient pris pour cibles,
    Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.


    Dans ce petit roman, Philippe Claudel fait de petites allusions au poète mais guère plus. Il faut dire que l'action ne se situe pas dans les Ardennes mais en Belgique. Mais quand même zut, je n'y peux rien, pour moi la Meuse, cela reste le fleuve des rimbaldiens.
    Venons-en au roman proprement dit : le narrateur est inconsolable suite au décès brutal de sa compagne Paule. Il décide d'aller se réfugier dans un petit village belge, paumé de chez paumé. Il débarque, trouve une chambre et des mois duranttraîne dans le village, et notamment au bar l'Ancre où il se prend des bitures avec les habitués. Il se lie d'amitié aussi avec le fossoyeur du cimetière, avec sa logeuse Madame Outsander. Il tente de noyer sa peine dans cette atmosphère bucolique et loin de tout. Les mois passent et la lourde peine devient une petite cicatrice mais hélas pense-t-il, c'est plus la marque du temps (ce grand réparateur) que de son travail intérieur.
    Ce petit roman se lit bien et malgré le sujet, j'ai eu presque sans cesse le sourire aux lèvres. Le tout est baigné dans une poésie rieuse et chatoyante. Les anecdotes* se succèdent aux descriptions très colorées et il faut dire ce qui est : on passe un bon moment de lecture. Il s'agit du premier roman et sans doute le plus méconnu de PhilippeClaudel.

    * Le fossoyeur croise par hasard le narrateur qui se promène dans le cimetière : " quand je vous ai vu la première fois, cet hiver que je vous ai vu, je me suis dit tout de suite, 230x200x110 pour la fosse, il faut toujours compter plus large, et à vue de nez, 45x60x70 pour la taille de la caisse qu'il vous faudrait, la caisse à réduction, car vous êtes tout de même assez grand...Une vraie manie de métreur, je ne peux pas m'en empêcher, dès que je vois quelqu'un, il faut que je le réduise..."

    note : 3/5
    lecture du 29.10 au 31/10
    à venir : à voir