Il s'agit d'un tout petit ouvrage d'un auteur que je ne connaissais pas, un si petit roman que je n'ai pas envie d'en faire des longueurs. Pour résumer, un jeune parisien cultivé et côtoyant les milieux artistiques tombe amoureux d'une étudiante, fille de fermier du Pas-de-Calais. Il est si amoureux qu'il accepte d'aller travailler à la ferme avec comme objectif de devenir le patron quand son beau-père prendra sa retraite. Sauf qu'on se fait une idée de la campagne et le Nooord, c'est vraiment pas beau, c'est plat, c'est gris et la vie de fermier est difficile ce qui nous donne le droit à des situations cocasses. En attendant donc, le parisien est juste ouvrier agricole et voit sa future femme que lorsqu'elle rentre de Paris le week-end. Elle retrouve son futur mari qui est devenu son fiancé mais ce n'est plus le bellâtre bien sapé et qui sentait bon qu'elle avait connu à Paris. Entre temps, elle a trouvé un autre type plus fréquentable et le pauvre fermier qui n'arrive pas à se débarrasser d'une odeur de purin même après trois douches et qui accumule les bourdes sur l'exploitation se retrouve comme un con. Alors, il décide de partir. Il trouve un métier à la télévision lilloise et du coup intéresse à nouveau son ex-fiancée.
Une fois de plus, le nord en prend pour son grade (il n’y a pas encore longtemps avec Eddy Bellegueule) et on va finir par croire que les clichés qu’on se fait des Hauts-de-France (puisque tel est le nouveau nom de cette région) sont vrais. Mais méfiance quand même. Ce petit roman est amusant et parsemé de passages poético-écologiques :
Il y a des coquelicots dans les champs de blé.
Il y a des bleuets dans les champs de blé.
C’est beau
Mais il commence à y avoir du maïs, de plus en plus de maïs. Dans le maïs, il n’y a plus de coquelicots. De toute façon, s’il y en avait, on ne les verrait pas. C’est trop grand, le maïs. Quand il y a du maïs, on ne voit plus la campagne, on ne voit plus rien. Sauf le maïs
Les champs de maïs me font peur. J’ai l’impression que je vais en voir sortir un Vietcong avec une mitraillette et qu’il va m’abattre sans sommation.
En plus, il paraît que ça boit beaucoup d’eau le maïs. A cause de lui, je ne peux plus prendre de bain l’été.
Si les paysans en cultivent, ce n’est pas par amour de la plante, c’est par amour des subventions.
Pourquoi on ne donne pas plutôt les subventions à ceux qui n’en plantent pas ?
Il va y avoir moins de fleurs dans les champs. Heureusement, il reste les tournesols, on les voit de loin, les grands tournesols, on pense à Van Gogh.
Les coquelicots, on commence à les tuer avec de la chimie.
Heureusement, il y a des coquelicots qu’on ne tuera jamais. Ceux qui poussent dans les tableaux de Monet.
Au moins, dans le Nord, ils ont des coquelicots. Il n’y en a pas en Bretagne car la terre est trop acide (sauf que hier j'en ai vu plein dans le jardin en friche de mon père mais il y a une raison particulière...et j'ai voulu en cueillir et à chaque fois que je coupais une tige, les fleurs tombaient snif ). Et je me permets de rectifier l’auteur. Les paysans sèment du maïs avant tout pour nourrir les bêtes. Ils le faisaient avant la politique agricole commune et le feront après.
Et bien, dans une bibliothèque, ce serait peut-être à ranger à côté des romans de Marie-Hélène Lafon. La démarche est différente. Jean-Louis Fournier prend plus de légèreté et fait plus dans la poésie alors que MH Lafon fait de la littérature haut de gamme, avec des mots compliqués et puis des situations souvent plus dramatiques. Mais c’est très bien d’écrire sur la France “profonde” comme on dit.
Moi aussi, et je le dis sans fausse modestie, un éditeur m’a demandé de le faire mais pour l’instant, je ne m’en sens pas capable et pourtant en lisant chaque court chapitre de ce roman, je me dis que j’aurais été capable de les écrire mais de là, à les aligner....même pour n'en faire que 150 pages (en fait, je me demande s'il faut prendre la littérature au sérieux, je me pose trop de questions).
lecture mai 2016, sur livre papier, 155 pages, éditions Stock parution : février 2010, note : 3/5
Loïc LT
Commentaires
Jean-Louis Fournier écrit des romans courts, ce qui est bien agréable. Et puis originaux également. J'en ai lu deux, j'ai bien aimé.
Moi, j'ai une préférence pour les romans longs (dont sont plus friands les auteurs américains) qui te suivent plusieurs jours mais mais en fait, ce n'est pas forcément la quantité qui fait la qualité (exemple : Modiano) mais les romans longs permettent quand même de rentrer plus dans la peau des personnages et en vivant avec plusieurs jours, c'est comme su on vivait deux vies (genre "naissance" de Moix) si tu vois ce que je veux dire.
Là, je vais attaquer "le rapport de Brodeck" qui aura l'honneur d'être le 300 ème commenté en 10 ans ! Il aura le droit à une note spéciale !
Les longs romans, j'adorais ça quand j'étais plus jeune. J'en ai passé, des semaines, sur l'Ile Mystérieuse ou avec les Quatre mousquetaires !!! Aujourd'hui, je n'y arrive plus, je n'ai plus assez de temps. Je le regrette, j'avoue.
Le rapport de Brodeck,, je l'ai lu il y a qq années, j'attends ton CR avec intérêt car je suis curieuse de savoir ce que tu en auras pensé !
Le problème du manque de temps, je l'entends souvent (de ma sœur par exemple et de mon meilleur ami qui ne trouve pas le temps de répondre à un texto et plein d'autres gens) et j'avoue sincèrement que je ne comprends pas. Ça me fait penser aux gens qui me disent pour une raison ou pour une autre "oh, excuse-moi, j'ai pas trouvé le temps de t'appeler" comme si trouver 5 mns dans une journée, c'était compliqué.
Moi je suis salarié, ma femme aussi mais elle a un boulot à responsabilité plus prenant que le mien, nous avons deux ados plutôt autonomes, et je trouve du temps facilement. Peut-être parce que je suis casanier (je ne fais partie d'aucune assoc ni club ni rien) et que je ne regarde pas la télé et que je dors peu aussi (je dos peu mais je dors vite comme disait l'autre) mais malgré mon grand jardin, les activités ménagères, j'arrive à trouver plusieurs heures dans la journée. J'arrive même à lire le matin avant d'aller bosser, pendant la pause déjeuner aussi et le soir évidemment.
un seul conseil de vieux : lance toi sans arrière-pensée... mais le monde de l'édition est redoutable!
Sur le temps, je suis d'accord avec toi en partie, il y a des choses qui en effet relèvent plus de la procrastination que du manque réel de temps. Ensuite, pour la lecture et en ce qui me concerne, il faut bien admettre que le temps n'est pas extensible, et que le temps que je passais autrefois à lire est aujourd'hui consacré en partie à surfer sur le net, et puis à faire le ménage chez moi, jardiner sur mon balcon...