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avec un brin de nostalgie # 1

Tôt le matin lorsque personne n'est levé, le silence règne dans la maison, j'ouvre les volets et la nature avec tous les tons de vert s'offre à moi. Les oiseaux chantent, je vois de temps en temps un chat passer, voire même un chevreuil. Rien ne bouge encore au front des palais. Je ris au wasserfall blond qui s'échevelle à travers les sapins : à la cime argentée je reconnais la déesseJe prépare un café, parcours le Ouest-France et ensuite, soit je lis, soit je surfe soit j'écris et en ce matin du 16 mai 2015, je suis décidé à écrire.

 

Le 14 mai 2015, je me suis rendu au village de Persquen pour le fameux recensement que vous savez (qui viendra après).  Ce n'était pas un reportage photos comme un autre puisqu'il y a deux bourgs qui comptent dans mon enfance, Languidic, celui où j'ai grandi et Persquen, celui où vivait mon grand-père maternel, Émile LB.

Mon grand-père est né en 1923 à St-Caradec-Tregomel dans une ferme de peu sans doute, toujours est-il que le père de mon grand-père, François en plus d'exploiter une petite ferme était le jardinier et garde-chasse du manoir de Kerohel en Persquen (connu pour avoir abrité Marion du Faouët aux alentours de 1740) . Sa femme, Marie, qui habitait avec lui dans une dépendance du manoir (je présume) était verratière, c'est à dire que les éleveurs venaient à Kerohel avec leurs truies.

Mon grand-père n'a pas vécu toute sa vie à Persquen (bourg je précise situé dans le nord du Morbihan, c’est à dire dans le centre de la Bretagne, une zone où l’exode rural a dépeuplé les villages) puisqu'après la guerre, après avoir été maraîcher et livreur de lait en région parisienne, il s'est engagé dans la gendarmerie où il fut affecté à la surveillance des aéroports (Orly, Bourget). Il se maria avec avec Ambroisine Morvan (une femme de Persquen) dont je n'ai aucun souvenir car elle est décédée d'un cancer deux ans et demi après ma naissance. Le couple s'est donc installé à Paris, dans un logement de fonction je suppose (à Dugny) et je suppose aussi que ma grand-mère était mère au foyer. Ils eurent 4 filles, Marie-Claire, ma mère, l'aînée, Patricia, Evelyne et Brigitte. C'est à Paris que mon père a rencontré sa future épouse, Marie-Claire. Je ne me souviens plus très bien de ce que mon père faisait à Paris mais j'ai le vague souvenir qu'il m'avait dit qu'il gérait une auberge de jeunesse catholique ou un truc dans le genre. Donc, coup de foudre comme on dit et sans doute aussi le fait que tout le monde était originaire du même coin de Bretagne a-t-il créé des affinités.

Dans les années 50 (ou début des années 60 ?) , ma grand-mère Ambroisine est tombée malade et pendant qu'elle était soignée de la tuberculose à l'hôpital Val-de-Grâce à Paris, ma mère et Evelyne furent scolarisées à l'école des soeurs de Persquen, Patricia fut mis en garde à Kerohel pendant que Brigitte encore toute petite était gardée par une nourrice. Guérie de la tuberculose, le destin s'acharna contre elle puisqu'elle décéda d'un cancer le 25 février 1976.

Lorsque j'ai fait mon reportage photo le 14 mai, je suis rentré dans l'enceinte de cette école des soeurs où ma mère et Evelyne ne durent pas passer que du bon temps...et tout est à l'abandon, les tables et les pupitres sont entassés dans le préau. Par contre, l'intérieur des bâtiments n'est pas si insalubre et doit servir à quelque chose mais à quoi. Tout à l'heure, j'ai eu ma tante Patricia au téléphone et elle m'a dit qu'il n'y a encore pas longtemps, les locaux de cette ancienne école de bonne-sœur étaient utilisés par le curé pour faire la messe en hiver, la grande église Saint-Adrien n'étant pas chauffée.

Mon grand-père rendit les armes en 1975 et passa dans le privé en devenant surveillant d'une maison d'édition, les éditions Rombaldi, situées boulevard Saint-Germain à Paris. On a quelques exemplaires des livres de cette maison à Berloch, ce sont de gros bouquins assez rébarbatifs avec des illustrations tristes. Cette maison rééditait des grands auteurs comme Bazin et Genevoix. Le couple LB vivait dans les locaux de cette maison d'édition et ma grand-mère s'occupait de l'entretien du hall et autres petites intendances .

Après la mort de sa femme, mon grand-père étant né en 1923 avait donc 53 ans et décida de rentrer à Persquen peu après avec Patricia et Brigitte. Sa mère habitait une maison avec son mari François dans le bourg de Persquen. Je ne l'ai pas connu et j'ai toujours entendu dire qu'il est mort d'une crise cardiaque en se rendant aux toilettes (ou en y revenant). Toujours est-il qu'il n'y avait pas de place pour Émile dans cette maison où vivait aussi François, l'un de ses deux frères, un mécanicien agricole qui travaillait à Bubry (l'autre frère Raymond était ouvrier en menuiserie et selon moi plutôt artisan (il avait conçu pour mon père et ma mère un ensemble lit-armoire dans un style rustique typiquement breton, ensemble qui a toujours été un sujet de moquerie à Berloch tant nous le trouvions horrible mais qui à bien des égards est finalement un véritable chef d’oeuvre du genre) qui deviendra mon parrain et qui habitait une maison qu'il avait fait construire sur les hauteurs d'un village aux confins de Persquen (Talvern) en bas duquel un forgeron foutait un de ces bordels qui empiétait même sur la route.

Mon grand-père loua donc une maison dans un corps de ferme abandonné au hameau de Kercher à quelques kilomètres du bourg. C'était une grande maison avec plein de bâtiments agricoles autour.

 

Ma mère est décédée en 1979. J'avais six ans et ma sœur 4. Je n'ai pas bien réalisé les événements. Je n'étais pas malheureux et je n'ai pleuré que lorsque j'ai vu mon père pleurer.

C'est la première fois que je le voyais ainsi et je pensais qu'il n'y avait que les enfants qui pleuraient. Lorsque ma mère est décédée, ma grand-mère, Elisa (dite Marie) est venue s'installer à la maison à Berloch pour aider mon père à nous élever. C'est à partir de cette période que j'ai commencé à aller régulièrement en vacances à Kercher. Les filles de mon grand-père travaillant et vivant à Paris (à part Patricia, mariée avec Gérard, un mécanicien travaillant à Guéméné) venaient passer quelques semaines de vacances auprès de leur père en été et elles en profitaient pour nous prendre quelques jours (quinze jours ?) avec elles. Ces séjours à Kercher étaient pour moi des moments de stress et en même temps d'excitation. J'adorais mon grand-père, il ne grondait jamais, il vivait tranquillement et mes tantes Brigitte et Evelyne étaient prévenantes à nos égards. Et puis, elles ramenaient avec elle leurs habitudes de Paris à des années lumière de ce que je pouvais vivre à Berloch. J'avais l'impression de vivre dans un autre pays. On avait le droit de faire des choses qu'il était insensé de faire chez nous comme lire le soir au lit ou bien regarder des films jusque la fin (comme Papillon avec Steve McQueen dont j’ai, je ne sais pas pas pourquoi gardé un souvenir inoubliable) . On se rendait dans un supermarché de Pontivy ce que jamais nous ne faisions à Berloch où le boulanger-épicier ambulant nous alimentait en denrées de base que mon père ou ma grand-mère complétaient par quelques courses dans les magasins du bourg de Languidic (genre la coop). Donc, ma première expérience du supermarché eut lieu lors d'un de ces séjours à Kercher. Je me rappelle avoir croisé une fois au supermarché (Continent ?) mon instit de l'école St-Donatien -une école rurale posée au milieu d'un champ à Languidic- et je trouvais insensé que ces deux mondes si différents puissent se rencontrer et en même temps j'étais fier de leur présenter mes tantes parisiennes (encore que j'étais excessivement timide alors je ne sais pas comment la rencontre a pu se passer).

Je me souviens de ces vacances à Persquen comme de moments d'insouciance. Evelyne avait un fils qui avait un peu près mon âge alors nous jouions ensemble à des jeux divers, nous partions en vadrouille avec le grand-père (il cultivait un jardin au bout d'un chemin interminable, en descente qui menait à un endroit très humide où poussait du cresson), il nous montrait régulièrement son képi qu'il gardait religieusement et qui nous impressionnait mais j'avais quand même un complexe d'infériorité par rapport à mon cousin. Mieux habillé, plus classe en général, je l'enviais mais il ne se la ramenait pas. Nous avions moins de 10 ans et ce n'est pas une période où on se cherche des poux (dont ma tête était couverte d'ailleurs -). Il arrivait aussi que je fasse des séjours dans les séjours en allant passer quelques jours à Talvern chez mon oncle et parrain Raymond (frère de mon grand-père), sa femme Jeanine et leur fils Thierry (que je ne voyais jamais) dont la chambre était tapissée de posters de clubs de foot (impressionné j'étais) mais ces séjours n'étaient pas de tout repos parce que les scènes de ménage étaient récurrentes et les assiettes volaient souvent . Je me souviens même d'une bagarre générale dans le village dont j'ai du mal aujourd'hui à définir qui et pourquoi se battaient avec qui. Jennine est décédée d'un cancer très jeune en 1981, ensuite j'ai beaucoup moins vu mon parrain à part quand il venait à la maison à Berloch avec sa nouvelle campagne.

A chaque fois qu'on partait en vacances à Persquen, c'était pareil. L'oncle Richard et la tante Evelyne venaient nous chercher à Berloch (moins souvent Brigitte et Antoine je crois ; on ne voyait pas beaucoup Antoine très occupé par son travail). Les adultes restaient discuter. Richard parlait beaucoup et son accent alsacien résonne encore dans mes oreilles. Evelyne était plus discrète et toujours très gentille avec nous. Le parcours Languidic-Persquen dans la R18 pourtant pas si long (une demi-heure à peu près) me semblait interminable, il y avait des virages et comme j'étais timide je n'osais pas dire que j'avais envie de dégobiller. L'envie souvent se concrétisait et je vous épargne les détails.

Je ne sais pas combien j'ai fait de séjours à Persquen. Avec le temps, on a tendance à exagérer les choses. Mais une chose est sûre, lorsque mon arrière-grand-mère est décédée en novembre 1982, et ensuite François en 1984 (qui vécut donc seul dans la maison pendant deux ans environ), mon grand-père s'est installé dans la maison du bourg (après quelques rénovations) et jamais on n'a passé de vacances dans cette maison. Donc, nos vacances à Kercher se sont déroulées sur une période assez courte (4 ans à peu près quand même).

Quand mon grand-père a emménagé dans le bourg, la donne a changé. J'avais grandi forcément. Nous rendions des visites à mon grand-père avec mon père, sa nouvelle femme, ma nouvelle petite sœur et ma sœur. A partir de cette période, j'ai commencé à perdre de vue mon grand-père et quand il est décédé en 1997, j'étais sous les drapeaux et je m'en suis atrocement voulu (alors que j'avais mon permis de conduire depuis des années)  de ne pas être allé le voir plus souvent. Je crois que je comptais pour lui. J'étais le fils aîné de sa fille aînée, et je l'ai abandonné. Mais je crois que les dernières années de sa vie ne furent pas simples (problèmes de santé et autres) . N'empêche.

Loïc LT

A venir : reportage photos à Persquen (qui malgré ces 300 habitants dispose d'une cabine!)

Commentaires

  • Je t'envie, de connaitre ces petites heures du matin. J'imagine bien à quel point elles doivent être douces, dans le calme de la maison endormie. C'est bon, ces moments où l'on est seul, sans l'être.
    Tu as bien raison, de mettre sur papier (numérique) ces souvenirs de ton enfance. Ils sont précieux. Tu as eu de la chance d'avoir des souvenirs heureux de ton grand'père :-)

  • Oui, mon grand-père méritait bien une note, ce n'est qu'une petite note, une molécule dans l'océan du net mais qui le fait revivre d'une certaine façon. Les mots sont là pour ça.

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