Le hasard fait qu'après avoir lu une autobiographie de ce bourgeois-bohème un brin cynique qu'est Frédéric Beigbeder, me tombe entre les mains les raisins de la colère, de John Steinbeck, un roman datant de 1939 et qui s'apparente à quelque chose comme une version romancée du capital de Karl Marx ou peut-être plutôt un germinal américain.
Et pour en finir avec Beigbeder, voici ce qu'il en dit dans son dernier inventaire avant liquidation : "pour faire efficace, Steinbeck nous en met plein la vue et en rajoute dans le mélodrame naturaliste...le principal reproche qu'on peut faire à Steinbeck n'est pas de sentir le pâté mais le pathos".
Comme de fait, il a peu raison. Les raisins de la colère est un peu trop manichéen pour être crédible. Cette réserve faite, ce livre est un chef d'oeuvre.
Concrètement, ce roman fleuve traite des excès du capitalisme dans l'Amérique rurale des années 30 à travers la folle équipée d'une famille de paysans (lesJoad) de l'Oklahoma désireuse de rejoindre la "verte" et prometteuse Californie..qui s'avérera bien plus horrible que la région natale, l'optimisme un peu naïf des débuts laissant place au désarroi le plus total jusqu'aux dernières pages proprement bouleversantes. Le récit est entrecoupé de quelqueschapitres qui permettent au lecteur de prendre du recul, de mieux comprendre le système ou de se voir offrir quelques descriptions très poétiques.
Saisissant.
Le roman a été adapté au cinéma en 1940. Et je me pâme encore à la lecture de cette anecdote trouvée sur wikipedia :
Le film a connu une brève exploitation en URSS. Le pouvoir communiste en place autorise en effet sa projection, trouvant dans cette histoire qui se déroule durant la crise de 1929, l'occasion de fustiger le capitalisme. La réaction du public russe ne fut toutefois pas celle escomptée, puisqu'il s'émerveilla que, même au plus profond de la misère, les personnages possèdent encore une voiture. La censure le retira donc aussitôt des écrans.
roman, paru en 1939
folio n°83, 639 pages
lecture du 05/01 au 12/01/2010
note : 4/5
à venir : bella ciao, Eric Holder
Commentaires
Lu il y a 10 ans et il m'avait laissé une très forte impression. Un roman majeur que je relirai sans doute.
Quant à ce pauvre Beigbeder ce n'est pas lui qui risque de faire autre chose qu'essayer vaguement d'amuser la galerie en lui attribuant une veulerie dont il sait pertinemment qu'elle est la sienne... Chacun ses héros.