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paris

  • Il se passe des choses graves à Paris

    Vendredi 13 novembre 2015.  vers les 22h00

    Ma femme et mes filles regardaient la télé et je bouquinais et surfais. Le soir, je me crée mon petit univers, j'approche l'abat-jour du pc, me fais un petit café et laisse aller mes pensées. J'écris des choses, je réponds à des gens, je reprends mon roman. Alors, il est vers les 22h00 ou un peu avant, je ne sais plus. Bien que fan de foot, je ne regarde pas les matchs amicaux donc ce France-Allemagne ne m'intéressait pas. Et puis donc, je vais sur un site d'actu pour voir quand même le score et puis je tombe sur la nouvelle et je  comprends aussitôt qu'il se passe des choses graves à Paris. On parle déjà d'une trentaine de morts, d'une prise d'otages au Bataclan. J'ôte mon casque et je dis :

    - il se passe des choses graves à Paris.

    Tout de suite, on se branche sur une chaîne d'infos. On est tous prostrés. La soirée se passe, je ne sais pas si les filles ont bien compris le drame, ma femme évidemment était choquée, elle est allée se coucher et je suis resté rivé sur l'écran de BFM ou itélé jusqu'au milieu de la nuit.

    Ce sont des moments dont on se rappelle toute sa vie. Toutes proportions gardées, lorsque j'ai appris la mort de Michael Jackson, tard dans la nuit, je suis allé réveiller ma femme qui ne m'a pas cru d'abord je crois, elle était déjà dans ses rêves et j'ai du lui rappeler la nouvelle le lendemain. 

    Attentats du 11 septembre : décidément, je suis un oiseau de mauvaise augure. Il est 10h30 et mes collègues comptables sont dans la salle café. On m'appelle 'ton café est servi'. 'j'arrive'. Mais avant de partir, je vais faire un tour sur le site de boursorama (époque de la bulle internet) pour voir vite fait de combien de centaines d'euros mon portefeuille s'est épaissi, je tombe sur les infos, les deux avions se se sont déjà écrasés, la bourse dégringole, je n'en crois pas mes yeux. Je descends quand même, j'ai peur parce que j'étais assez réservé à l'époque et je ne sais pas comment je vais leur annoncer ça. Et si ma mémoire est bonne, comme vendredi dernier, je leur sors 'je crois qu'il se passe des choses graves à New-York'. Je ne me souviens plus de la réaction de mes collègues mais je crois que très vite la discussion a repris son cours normal, ils n'avaient pris la mesure de l'événement mais aujourd'hui je ne peux m'empêcher de penser que ces anciens collègues quand ils repensent aux attentats du 11/09 ou qu'on leur demande comment ils l'avaient appris, que c'est à moi qu'ils doivent penser. 

    Mort de François Mitterrand : janvier 1996, j'étais à Lorient en cours  de bts de comptabilité et je crois que c'était un lundi, il faisait un froid sec et au milieu de la matinée on avait une heure de libre que j'ai mis à profit pour aller chez mon disquaire préféré (c'est fou ce que j'achetais comme cd à l'époque) et dans la voiture, j'ai allumé la radio et appris la nouvelle. Lorsque je reviens au lycée, je retrouve mes camarades et je leurs annonce la nouvelle. Ils ne me croient pas. Franchement, je vois pas pourquoi j'irais inventer ça. Enfin bref, il y a eu une minute de silence dans les classes après je ne sais plus quand. 

    Je pourrais vous parler aussi du crash du Concorde mais je rentrais du boulot dans mon studio où je vivais seul et je n'ai eu à l'annoncer à personne.

    A contrario, quels événements m'a-t-on appris ? Rien ne me vient. Même si je regarde très peu la télé, j'écoute beaucoup la radio et je suis hyperconnecté. Si Barack Obama se fait tuer à 3 heures du matin, je suis au courant dans l'heure. 

    Il se passe des choses graves à Paris.

    Mais toutes les choses qu'on apprend soudainement et qui nous marquent à vie ne sont pas forcément des événements médiatiques. Un jour, ma femme rentre du boulot et elle m'apprend qu'elle a entendu le premier extrait du nouvel album de Daho sur RTL2. Je lui réponds 'ah bon, déjà ! et c'est bien ? c'est quoi le titre ?'. Elle ne savait pas le titre, elle se souvenait juste qu'il parlait d'être libre. Il s'agissait  de retour à toi, premier single de l'album réévolution (2003). Je ne sais pas pourquoi, je me rappellerai toute ma vie de cette petite annonce, qui semble anodine comme ça. Bizarrement bien que fan de Daho, je n'étais pas informé que le titre du nouvel album devait être diffusé ce jour-là. Depuis à chaque fois que j'entends retour à toi, je repense à cette annonce faîte à l'Homme. 

    Excusez-moi de passer de choses légères aux choses graves mais lorsque mon père a eu son accident en 1991 (chute d'un toit et handicapé à vie), j'étais en 1ère au lycée et un moment, la prof vient vers moi pour me dire que des gens veulent me voir. Je sors dans le couloir et je vois l'épouse de mon père en pleur accompagné d'un voisin. On m'apprend la nouvelle. C'est terrible comme la vie peut changer en quelques secondes. Je repense aux familles et amis de tous ces gens tués le vendredi 13 novembre. La nouvelle tombe brutalement comme une pomme chute d'un pommier sans crier gare. 

    C'est le destin de l'homme. Il faut vivre avec cette épée de Damoclès au dessus de nos têtes. 

    Loïc LT

    retour à toi

    Ennemi de soi-même, comment aimer les autres ?
    Etranger à soi-même, étranger pour les autres
    Qui réduit au silence le fracas de l'enfance
    Et avance masqué en attendant sa chance

    Et sous les apparences, le prix du vêtement
    Personne ne voit les plaies et le sang
    De celui qui survit.

    Et quand demain se lèvera
    Je serai libre, retour à toi
    Mais quand demain se lèvera
    Je serai libre, retour à moi

    Si l'amour me couronne et s'il me crucifie
    Elève mes pensées dans un hymne à la vie
    Et que monte très haut la flamme des bougies
    Quel que soit le drapeau le dieu que l'on prie

    Et sous les apparences, vulnérable et changeant
    Personne ne lèche les plaies et le sang
    de celui qui survit.

    Mais sous les apparences, vulnérable et changeant
    Personne ne lèche les plaies et le sang
    de celui qui survit.

     

  • l'hôtel désenchanté

    Je me souviens qu'en septembre 2000, j'avais décidé de faire une escapade à Paris. J'étais en congé, je vivais avec mon père et j'avais besoin de changer d'air. Je n'étais pas très bien dans ma peau, je me sentais seul et pour ne pas paraître plus désœuvré que je ne l'étais, j'avais fait croire à mon père que j'allais rejoindre un ami à Paris. C'était totalement faux, j'avais bien un ami à Paris mais je n'avais aucune envie de le voir (bien qu'il aurait été super content de me voir). Pour compliquer les choses ou peut-être pour les rallonger, j'avais décidé de ne prendre le train qu'à Rennes et donc de faire le trajet Languidic-Rennes en voiture. Arrivé à Rennes, toujours aussi peu pressé mais me sentant bien, anonyme et libre dans la ville, j’ai loué une chambre dans un F1. Au petit matin, je m'y sentais bien, cette chambre minuscule était comme un refuge où personne ne pouvait m'atteindre. Avec le recul, je me demande pourquoi je voulais absolument aller à Paris. J’aurais pu rester à Rennes et dormir dans de petits hôtels tous les soirs, je serais resté tout aussi incognito. En 2000, je ne connaissais plus personne à Rennes. J’avais quitté la fac en 1994.

    Mais non, j’ai garé ma voiture près de la gare et pris le premier TGV. Arrivé à Montparnasse, je me suis senti seul sur le grand parvis devant la gare où tournait un manège et je ne savais pas où aller. Je remarquai au loin un hôtel qui faisait quelques étages et qui avait l’air plutôt modeste. Je m’y suis précipité. Je ne sais plus quelle heure il était. C’était le début de soirée je crois et c’était la première fois que je me rendais dans un vrai hôtel. Je me souviens très bien de la réception. Une salle style année 70, aujourd’hui on dirait vintage, des divans et une odeur de tabac. A l’accueil, j’ai demandé une chambre. On m’a filé les clés et je suis monté. La chambre était en accord avec la salle en bas mais c’était propre et j’avais une belle vue sur la rue et la gare et enfermé, le tumulte de la capitale me rassurait.

    Tout ceci m’est revenu le week-end dernier lorsqu’on a dormi dans un 4 étoiles de Saint-Malo où soi disant il y avait un bar dans la chambre. Il y  avait effectivement un frigo avec des jus d’orange...alors que dans cet hôtel de Paris, sans doute 2 étoiles, il y avait un vrai bar avec alcool et tout. Mais j’avais peur de me servir, je ne savais pas si c’était payant ou pas. Je n’osais rien, à part m’allonger et dormir. Le réveil de Paris m’a sorti de mon sommeil et je suis sorti de l’hôtel en fin de matinée. Je portais un sac à dos et je ne savais pas où aller. J’avais pas trop envie de m’éloigner de la gare mais en même temps, je n’allais pas rester tout le séjour dans le secteur. D’ailleurs, je ne savais pas combien de temps j’allais rester. J’avais ce qu’il fallait en argent mais j’étais complètement perdu. Alors, j’ai pris un grand boulevard. Je n’avais pas pris de petit dej, ce n’est pas que j’avais faim mais un petit café me tentait bien. Mais les brasseries m’impressionnaient trop , j’avais peur d’y entrer, de paraître gauche. Finalement, je suis rentré dans un bar moins clinquant que les autres et j’ai dû prendre un café.

    Je ne me souviens plus du tout de ce que j’ai fait de la journée. Je ne me vois pas déjeuner à midi. Le soir, j’ai réservé une chambre dans un hôtel Ibis. Je suis ressorti, il faisait nuit et j’ai acheté du riz au lait et des pommes et suis retourné à l’hôtel. Ma chambre se situait dans les combles et j’avais une vue magnifique sur les toits de Paris. J’ai allumé la télé et mis une chaîne d’info. Nous étions en septembre 2000 et le CAC40 frôlait les 7000 pts. Je me rappellerai toujours de ça parce que j’avais investi un peu dans des actions. Mais si le CAC n’a jamais atteint les 7000 pts, il a battu son record (toujours à battre) alors que j’étais dans cet hôtel mais je ne me doutais pas de la suite des événements, du dégonflement de la bulle internet, des attentats du 11 septembre 2001. C’est amusant d’y songer aujourd’hui. Ma vie a pris un tournant positif après ce triste séjour dans la capitale alors que la finance internationale commençait son chemin de croix.

    Le matin, j’ai été réveillé par les femmes de ménage qui faisaient du bruit dans le couloir et les chambres à côté. L’une d’entre elle a même frappé à ma porte. Je me suis dit qu’il fallait que je décanille. Je suis sorti et j’ai marché tout en réfléchissant. A quoi bon rester une journée de plus, voire une nuit dans cette ville ? Il m’est alors venu l’idée saugrenue de me rendre aux Lilas, une commune située à l’est de Paris où travaillait dans un office notarial une fille avec qui je discutais beaucoup sur le net. Je savais pertinemment que même si je trouvais l’endroit, je n’oserais jamais entrer dans l’office mais je ne sais pas pourquoi je voulais voir l'endroit...et puis avec un peu de courage, peut-être aurais-je osé. Alors, j’ai marché aidé d’un vieux guide trouvé chez mon père. Il faisait chaud, je transpirais, j’avais soif, j’ai acheté une bouteille d’eau dans une épicerie et au bout de 3 heures interminables pendant lesquelles je n’ai fait preuve d’aucune curiosité comme le ferait tout touriste, je suis arrivé sur les lieux et j’ai vite trouvé le cabinet de la fille en question. Je suis resté 5 minutes de l’autre côté de la rue, on était en fin d’après-midi, vers les 16 heures, je dirais et il me semblait évident qu’elle était là, à bosser derrière les vitres. Aurait-elle été contente de me voir ? J’en doute. Surprise, certainement. Mon cœur battait fort mais inutilement car j’étais incapable de rentrer.

    J’ai donc rebroussé chemin et me suis retrouvé à Montparnasse, éreinté et désœuvré. J’ai pris un train pour Rennes. Il était bondé et avec toute cette marche, j’avais l’impression qu’il émanait de moi une odeur nauséabonde. Mais j’étais tellement prostré que je n’osais même pas me rendre au wagon restaurant où j’aurais été peut-être plus à l’aise. En plus, j’étais côté couloir et j’étais incapable de lire ou faire quoi que ce soit.

    C’est donc avec un grand soulagement que j’ai vu que l’on traversait la périphérie rennaise. Arrivé à la gare, j’ai regagné ma voiture et je crois que j’ai pris le premier hôtel venu mais je n’en ai aucun souvenir. Au petit matin, je suis rentré à la maison.

    Vraiment, c’était chouette ce séjour à Paris !

     

    Mais c’est après que j’ai réalisé que ces trois jours de désœuvrement furent un déclic. Tout s’est précipité dans ma vie après. Je suis retourné au boulot et comme par enchantement, mon existence a pris un nouvel élan. Et j’ignore si ce séjour désenchanté y est pour quelque chose.