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hôtel

  • l’hôtel enchanté (hôtel Alexandra****, Saint-Malo)

    Quinze ans plus tard, j’ai pris quelques rides, je porte une alliance, j’ai deux filles, j’ai changé de boulot. Quinze ans pendant lesquels il y a eu des moments difficiles (des accidents de la vie comme on dit) mais au final, la balance penche quand même plutôt du bon côté. J’ai changé, le monde a changé mais pas tant que ça si on considère qu’internet et les smartphones ne sont que des moyens d’acquérir du savoir et de communiquer...mais les moyens ne sont pas des fins.

    Nous partons en amoureux pour un week-end dans un hôtel à Saint-Malo estampillé  quatre  étoiles. Je n’y connais rien en étoiles mais dans mon esprit quatre étoiles, c’est quasiment le palace. Mais une loi datant de 2008 a changé la donne : l’attribution des étoiles obéit à des critères qui ne sont pas forcément visibles de la clientèle.

    Enfin bref. L’essentiel est d’être bien à deux. On est plus fort quand on est deux. A Paris, en 2000, j’étais seul et vulnérable.

    L’hôtel Alexandra donne sur la plage du Sillon et se situe dans un quartier cossu composé de maisons pittoresques avec des toits et des façades magnifiques.

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    Ma seule déception vient du fait que je m’étais fait une idée fausse de l’hôtel 4 étoiles. Quand on rentre dans l’Alexandra, aucun groom vêtu de rouge nous monte les bagages. A la place, un type un peu blasé, avachi derrière son comptoir nous donne un passe après avoir vérifié notre réservation. Le salon à l’accueil est agréable mais sans plus. D’ailleurs, pendant les deux jours, je n’ai vu personne s’y installer. Ensuite, évidemment, notre chambre donne côté rue et non côté plage mais qu’importe, les toits de la cité corsaire ne sont pas inintéressants.

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    La chambre est spacieuse mais à la place d’un lit deux places, nous devons nous contenter de lits jumeaux accolés. Le petit balcon est le bienvenu mais le bar est décevant. Contrairement à mon modeste hôtel à Montparnasse (en 2000), celui de l’Alexandra ne contient que des jus d’orange et de l’eau bénie. Il faut dire que les temps ont changé !!! Aujourd’hui, c’est chacun pour soi...heu zut, je m’égare (mais c’est pas faux non plus). Les temps ont changé, on ne peut plus fumer dans les chambres ni se bourrer la gueule. Le monde s’aseptise au nom de la santé publique et du culte du bien-être du corps et de l’esprit. Ce n’est pas un reproche,c’est un constat.

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    Après avoir déposé nos affaires, nous enfilons nos tenues de soirée. Je chausse mes souliers qui me serrent et je vêts mon paletot sans manches. Nous nous rendons au dîner dans la grande salle donnant sur la Manche. Le repas est correct sans plus, le prix des boissons est exorbitant et le service est discret. Nous nous sommes amusés à nous moquer d’un jeune serveur peu souriant et manquant d’expérience et d’une serveuse à la coiffure décoiffante. On peut toujours critiquer mais je me sentais bien, on se sentait bien. Je crois que c’est à ce moment du repas que je me suis souvenu de mon séjour à Paris. Il y a eu comme un flash et pensif, je réalisais qu'entre septembre 2000 et octobre 2015 c’était le jour et la lune (pour reprendre un lapsus entendu ce matin sur France Inter). Les couteaux étaient magnifiquement dessinés et conçus de telle sorte que la lame ne peut pas toucher la nappe.

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    Ensuite, la nuit nous tendait les bras...

    Le matin, on aurait pu se faire servir le petit dej en chambre mais on a préféré se rendre en salle, ce qui fut une bonne idée tant le buffet était copieux. Moi le matin, je ne suis pas un grand mangeur mais Prisca s’est régalée. J'ai demandé au jeune serveur s’il savait à quelle température était l’eau de mer et il m’a répondu 18° sans conviction. J’en doutais d’autant qu’il faisait 12° dehors..mais j’avais une envie folle d’aller nager.. Prisca m’y encourageait. Alors, j’y suis allé et je suis rentré dans l’eau sans trop de mal. J’ai nagé 20 minutes et j'en suis ressorti trempé ! Fou que je suis, je suis rentré en maillot de bain dans la grande salle propre comme un sou neuf, les pieds plein de sable sous le regard inquisiteur du personnel.

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    Après, on a profité de la chambre, écouté de la musique d'ascenceur, écrit des cartes postales (on a gardé cette vieille habitude) et profité du temps présent. Du balcon, je contemplais les toits de Saint-Malo qui dominaient de petits jardins privés toujours bien agencés. La ville était sereine. Le temps était suspendu. Des joggers couraient, des cyclistes pédalaient, des marcheurs marchaient et des vieux devisaient. Le ciel était bleu comme la mer. C’était reposant, tout simplement.

     

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    15 ans plus tôt, ce n’était pas la même histoire.

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    week-end du 10 et 11 octobre 2015, Saint-Malo (et visite de Dinard)

    Loïc LT

  • l'hôtel désenchanté

    Je me souviens qu'en septembre 2000, j'avais décidé de faire une escapade à Paris. J'étais en congé, je vivais avec mon père et j'avais besoin de changer d'air. Je n'étais pas très bien dans ma peau, je me sentais seul et pour ne pas paraître plus désœuvré que je ne l'étais, j'avais fait croire à mon père que j'allais rejoindre un ami à Paris. C'était totalement faux, j'avais bien un ami à Paris mais je n'avais aucune envie de le voir (bien qu'il aurait été super content de me voir). Pour compliquer les choses ou peut-être pour les rallonger, j'avais décidé de ne prendre le train qu'à Rennes et donc de faire le trajet Languidic-Rennes en voiture. Arrivé à Rennes, toujours aussi peu pressé mais me sentant bien, anonyme et libre dans la ville, j’ai loué une chambre dans un F1. Au petit matin, je m'y sentais bien, cette chambre minuscule était comme un refuge où personne ne pouvait m'atteindre. Avec le recul, je me demande pourquoi je voulais absolument aller à Paris. J’aurais pu rester à Rennes et dormir dans de petits hôtels tous les soirs, je serais resté tout aussi incognito. En 2000, je ne connaissais plus personne à Rennes. J’avais quitté la fac en 1994.

    Mais non, j’ai garé ma voiture près de la gare et pris le premier TGV. Arrivé à Montparnasse, je me suis senti seul sur le grand parvis devant la gare où tournait un manège et je ne savais pas où aller. Je remarquai au loin un hôtel qui faisait quelques étages et qui avait l’air plutôt modeste. Je m’y suis précipité. Je ne sais plus quelle heure il était. C’était le début de soirée je crois et c’était la première fois que je me rendais dans un vrai hôtel. Je me souviens très bien de la réception. Une salle style année 70, aujourd’hui on dirait vintage, des divans et une odeur de tabac. A l’accueil, j’ai demandé une chambre. On m’a filé les clés et je suis monté. La chambre était en accord avec la salle en bas mais c’était propre et j’avais une belle vue sur la rue et la gare et enfermé, le tumulte de la capitale me rassurait.

    Tout ceci m’est revenu le week-end dernier lorsqu’on a dormi dans un 4 étoiles de Saint-Malo où soi disant il y avait un bar dans la chambre. Il y  avait effectivement un frigo avec des jus d’orange...alors que dans cet hôtel de Paris, sans doute 2 étoiles, il y avait un vrai bar avec alcool et tout. Mais j’avais peur de me servir, je ne savais pas si c’était payant ou pas. Je n’osais rien, à part m’allonger et dormir. Le réveil de Paris m’a sorti de mon sommeil et je suis sorti de l’hôtel en fin de matinée. Je portais un sac à dos et je ne savais pas où aller. J’avais pas trop envie de m’éloigner de la gare mais en même temps, je n’allais pas rester tout le séjour dans le secteur. D’ailleurs, je ne savais pas combien de temps j’allais rester. J’avais ce qu’il fallait en argent mais j’étais complètement perdu. Alors, j’ai pris un grand boulevard. Je n’avais pas pris de petit dej, ce n’est pas que j’avais faim mais un petit café me tentait bien. Mais les brasseries m’impressionnaient trop , j’avais peur d’y entrer, de paraître gauche. Finalement, je suis rentré dans un bar moins clinquant que les autres et j’ai dû prendre un café.

    Je ne me souviens plus du tout de ce que j’ai fait de la journée. Je ne me vois pas déjeuner à midi. Le soir, j’ai réservé une chambre dans un hôtel Ibis. Je suis ressorti, il faisait nuit et j’ai acheté du riz au lait et des pommes et suis retourné à l’hôtel. Ma chambre se situait dans les combles et j’avais une vue magnifique sur les toits de Paris. J’ai allumé la télé et mis une chaîne d’info. Nous étions en septembre 2000 et le CAC40 frôlait les 7000 pts. Je me rappellerai toujours de ça parce que j’avais investi un peu dans des actions. Mais si le CAC n’a jamais atteint les 7000 pts, il a battu son record (toujours à battre) alors que j’étais dans cet hôtel mais je ne me doutais pas de la suite des événements, du dégonflement de la bulle internet, des attentats du 11 septembre 2001. C’est amusant d’y songer aujourd’hui. Ma vie a pris un tournant positif après ce triste séjour dans la capitale alors que la finance internationale commençait son chemin de croix.

    Le matin, j’ai été réveillé par les femmes de ménage qui faisaient du bruit dans le couloir et les chambres à côté. L’une d’entre elle a même frappé à ma porte. Je me suis dit qu’il fallait que je décanille. Je suis sorti et j’ai marché tout en réfléchissant. A quoi bon rester une journée de plus, voire une nuit dans cette ville ? Il m’est alors venu l’idée saugrenue de me rendre aux Lilas, une commune située à l’est de Paris où travaillait dans un office notarial une fille avec qui je discutais beaucoup sur le net. Je savais pertinemment que même si je trouvais l’endroit, je n’oserais jamais entrer dans l’office mais je ne sais pas pourquoi je voulais voir l'endroit...et puis avec un peu de courage, peut-être aurais-je osé. Alors, j’ai marché aidé d’un vieux guide trouvé chez mon père. Il faisait chaud, je transpirais, j’avais soif, j’ai acheté une bouteille d’eau dans une épicerie et au bout de 3 heures interminables pendant lesquelles je n’ai fait preuve d’aucune curiosité comme le ferait tout touriste, je suis arrivé sur les lieux et j’ai vite trouvé le cabinet de la fille en question. Je suis resté 5 minutes de l’autre côté de la rue, on était en fin d’après-midi, vers les 16 heures, je dirais et il me semblait évident qu’elle était là, à bosser derrière les vitres. Aurait-elle été contente de me voir ? J’en doute. Surprise, certainement. Mon cœur battait fort mais inutilement car j’étais incapable de rentrer.

    J’ai donc rebroussé chemin et me suis retrouvé à Montparnasse, éreinté et désœuvré. J’ai pris un train pour Rennes. Il était bondé et avec toute cette marche, j’avais l’impression qu’il émanait de moi une odeur nauséabonde. Mais j’étais tellement prostré que je n’osais même pas me rendre au wagon restaurant où j’aurais été peut-être plus à l’aise. En plus, j’étais côté couloir et j’étais incapable de lire ou faire quoi que ce soit.

    C’est donc avec un grand soulagement que j’ai vu que l’on traversait la périphérie rennaise. Arrivé à la gare, j’ai regagné ma voiture et je crois que j’ai pris le premier hôtel venu mais je n’en ai aucun souvenir. Au petit matin, je suis rentré à la maison.

    Vraiment, c’était chouette ce séjour à Paris !

     

    Mais c’est après que j’ai réalisé que ces trois jours de désœuvrement furent un déclic. Tout s’est précipité dans ma vie après. Je suis retourné au boulot et comme par enchantement, mon existence a pris un nouvel élan. Et j’ignore si ce séjour désenchanté y est pour quelque chose.