Marie-Hélène Lafon ne fait partie de ces écrivains connus du grand public et elle ne fait pas partie non plus des goncourisables mais la dame, originaire du Cantal a fait son trou dans la littérature française, elle a trouvé une niche comme on dit et du coup a trouvé son public comme on dit aussi. J'ai lu deux romans d'elle : l'annonce (adapté au cinéma) et Joseph. La particularité de cette auteure est de décrire la campagne profonde, en l’occurrence ici le Cantal, ce que ne font pas beaucoup les autres écrivains français. A sa façon, elle est un peu la Annie Ernaux de la ruralité, même si, elle est romancière et non biographe.
Elle était invitée ce soir par la médiathèque de Larmor-Plage (ma station balnéaire préférée), chose peu courante par ici et j'ai décidé d'y aller pour l'écouter évidemment mais avec la secrète intention de discuter avec elle après. On était à peu près 90 groupies dans la salle...dont 4 hommes ! On a compté. Elle est arrivée un peu en retard, plus coquette en vrai que sur les photos et n'a pas perdu de temps. J'ai moi-même posé deux questions que je retranscris à peu près ici :
- Vous décrivez fort bien les petites fermes du Cantal qui fonctionnent à l'ancienne mais seriez-vous capable d'écrire un roman dont l'environnement serait celui d'une grosse exploitation laitière ou céréalière et par là-même décrire le malaise agricole (1 suicide tous les 2 jours) ? Elle m'a répondu que non, qu'elle ne pouvait écrire que sur ce qu'elle connaissait mais se souvenant de ma question, elle m'a interpellé quelques minutes plus tard pour lire un extrait d'un de ses essais où elle décrit avec poésie mais avec minutie le type de tracteurs-bolides qu'utilisent les cultivateurs de la Beauce. J'ai rebondi en lui répondant que si elle était capable d'écrire ça, elle était capable de faire un grand roman sur l'agriculture moderne. Elle m'a rétorqué qu'elle s'était beaucoup documentée sur les tracteurs (avait même appelé un ami je crois) mais qu'elle se voyait mal aller en immersion dans la ferme des mille vaches.
- Votre livre l'annonce sorti en 2009 évoque le célibat des agriculteurs et le désir du fermier de trouver une femme via les petites annonces. Avez-vous même inconsciemment, été influencée par la célèbre émission de M6 ? L'assemblée a ri et elle a répondu que c'est une question qu'on lui pose souvent et que lorsqu'elle a écrit ce roman, elle ne connaissait pas cette émission (d'ailleurs, elle ne possède pas de télé).
- Je lui ai fait une dernière petite remarque : avez-vous conscience que derrière le ton sérieux de vos romans, vous arrivez quand même à nous faire rire et presque plus qu'un auteur dont ce serait la marque de fabrique ? Je lui ai parlé des deux oncles muets qui regardent TF1 toute la journée dans l'annonce et de Joseph, qui, bourré comme un coing, gare sa voiture au milieu du village, s'effondre sur le volant et met sans le vouloir en route le klaxon qui réveille toute la population, jusque ce qu'on vienne le sortir de cette mauvaise posture ? Elle acquiesce.
Elle a lu quelques passages (dont celui du tracteur qu'il faudrait que je retrouve), a répondu à d'autres questions et puis ensuite ce fut la traditionnelle séance de dédicaces. MH Lafon est plus déjantée qu'elle en a l'air. Il n'y a qu'à voir sa signature :
Je n'ai malheureusement pas pu discuter avec elle, parce qu'en bonne parisienne qu'elle est devenue, elle était pressée de rentrer (alors qu'elle venait juste d'arriver) et qu'il y avait trop de monde autour d'elle. C'était quand même une soirée sympathique et instructive. Excusez la médiocrité des photos, je n'avais que mon smartphone qui prend des photos pourries.
On sent que ça bouillonne dans le cerveau de Marie-Hélène Lafon et qu'il faudra compter encore plus sur elle dans l'avenir ; elle a d'ailleurs laissé sous-entendre qu'elle n'allait pas forcément continuer à écrire sur la ruralité.
Médiathèque de Larmor-Plage (Morbihan) , rencontre avec Marie-Hélène Lafon, 18h30/20h00, le 08 mars 2016
Loïc LT
Commentaires
Bonsoir Loïc, je me permets de vous remercier pour cet article rapide et drôle ! les tracteurs c'est dans ALBUM, un de mes livres préférés de Marie-Hélène. Entièrement d'accord sur beaucoup de choses, sauf sur la précipitation finale de la dame, qui était plus que fatiguée de sa grosse journée et inquiète de la journée d'aujourd'hui (dépendant du chemin de fer !). Mais qui est vraiment généreuse avec ses lecteurs, qu'elle évoque dans CHANTIERS, que je vous incite à lire aussi pour mieux saisir son parcours. Bonne continuation à l'usine et sur votre blog...
Ça tombe bien, j'ai acheté ALBUM et CHANTIERS ! J'ai trouvé le passage sur le tracteur truculent !
Par contre, je ne l'ai pas trouvée si fatiguée que ça. Elle m'a beaucoup surpris même. Très à l'aise, passionnée....Il aurait fallu que ça dure deux heures de plus.
Mais je comprends qu'elle était pressée. Moi pas. Ensuite, j'ai erré dans les rues obscures de Larmor-Plage (en quête d'inspiration), ville que j'adore de jour comme de nuit.
Merci de votre passage.
Rien à voir mais je suis un ancien de Dupuy de Lome (bts compta-gestion), période 96/97 (oui bon, j'ai fait mon curieux) . Je ne me souviens plus trop du nom des profs sauf de Mme Gaillard (prof de compta), de Mr Benoit (prof de français), Mr Pinault (orthographe?) à l'économie. Très bon souvenir de ces deux années à Dupuy.
C'est là-bas que j'ai rencontré celui qui reste mon meilleur ami.
Je traînais beaucoup à la bouquinerie et me souviens d'un jour de janvier de 1996 où j'étais sorti en ville en matinée pour faire quoi, je ne sais plus et j'ai appris à la radio la mort de Mitterrand. Quand je suis revenu à Dupuy, personne n'était au courant et j'étais gêné de l'annoncer, je ne sais pas pourquoi.
On avait dû observer une minute de silence mais notre prof n'était pas très motivé, cette minute a dû durer 10 secondes.
J'ai séché bcp de cours mais l'essentiel est que j'ai obtenu le diplôme...à l'arrache ! Grâce aux matières littéraires et économiques.
je ne connais aucun de ces noms, je ne suis à DDL que depuis peu, et hélas vous n'avez pas eu la chance d'avoir mme Fontaine en arts ! Bonne continuation en mots et en lectures.