Beauchamp m'avait demandé de me rendre le 20 mai dans une cabine située près de Plumelin à une certaine heure tardive et y attendre son appel afin qu'on convienne d'un rendez-vous, rdv pendant lequel on fixerait les modalités permettant de résoudre le différend qui nous pourrit la vie. Je crois qu'on est au moins d'accord sur une chose : on veut en terminer avec cette histoire inconcevable. Je me suis rendu sur place la veille de l'appel afin d'être sûr de l'endroit ( en retrait du bourg, presqu'au milieu des bois).
Le 20 mai, il faisait encore un peu jour lorsque je suis arrivé sur les lieux. Une Renault 21 Nevada verte pomme était garée près de la cabine et un homme vêtu d'une chemise col mao amidonnée en est sorti. Avenant et souriant, il m'a dit qu'il s'appelait Magdebourg et qu'il était missionné par Beauchamp pour me dire que l'appel n'aurait pas lieu pour des raisons inconnues de lui. Je me suis quand même rendu à l'intérieur de la cabine. Le publiphone fonctionnait et le numéro attribué était le 02 97 44 10 68. C'est alors que la sonnerie retentit. Magdebourg qui avait allumé une cigarette me regardait de l'extérieur et avait dû entendre la sonnerie également. J'ai décroché et une personne m'a demandé si c'était toujours ok pour le cambriolage de la quincaillerie Dumoulin le lendemain. Je lui ai répondu qu'il y avait erreur et qu'elle appelait à une cabine. Comme de fait, le numéro qu'il voulait joindre était le 01 97 44 10 68. Je suis ressorti de la cabine et Magdebourg était toujours là, la main gauche dans la poche droite et l'autre tenant la cigarette. Il était décontracté et il me dit 'je vous aurais bien proposé de boire un verre dans le bar un peu plus haut mais il est fermé'.
Ensuite, il m'a dit que Beauchamp faute de pouvoir appeler lui avait demandé si j'étais disponible pour un rendez-vous à l'hôtel de la gare d'Hennebont le 30 mai à 16:00. Je lui ai répondu qu'à priori oui. Magdebourg m'a alors dit qu'il transmettrait mon accord de principe à Beauchamp et je lui ai répondu que si je ne donnais pas de nouvelles (de toute façon je n'avais aucun moyen de le joindre), c'est que le rendez-vous aurait lieu.
Le 30 mai, je me suis rendu à la gare d'Hennebont avec un peu d'avance, pas par inquiétude ( parce que je n'avais aucune raison d'être inquiet) mais parce que j'aime l'ambiance qui entoure les gares. Lorsque je suis arrivé, j'ai tout de suite noté que l'hôtel en question était fermé.
J'ai quand même frappé à la porte et une vieille dame dans le coaltar (car telle est l'orthographe de ce mot), en chemise et bonnet de nuit est apparue à la fenêtre du second étage possédant un petit balcon. Elle m'a demandé ce que je voulais et je lui répondu que j'avais rendez-vous avec un type dans le bar et elle m'a dit qu'elle en était l'ancienne patronne et que celui-ci était fermé depuis trois ans et qu'elle n'attendait personne. Sans me dire au revoir, elle a fermé violemment sa fenêtre et je suis resté comme un con devant l'hôtel dont la société immobilière Fiducial Conseil était chargée de la vente (si vous êtes intéressé, il faut appeler le 02 97 87 15 28). J'ai pensé que peut-être Beauchamp avait voulu signifier que le rendez-vous aurait lieu devant l'hôtel. Je me suis résolu à revenir à l'heure convenue, 16:00 donc, le temps pour moi d'aller visiter la gare.
Je ne crois pas avoir déjà pris le train depuis cette gare ni y avoir été déposé (encore que j'ai un doute sur ce dernier point). C'est une gare à l'architecture classique qui ne voit s'arrêter que des TER et INTERCITES, genre il y a un départ pour Redon à 19:10 ou pour Quimper à 16:31.
A l'intérieur, il y a même un guichetier et de futurs voyageurs. Le tout est propre et semble avoir fait l'objet d'une récente rénovation...ainsi d'ailleurs que les abris à l'extérieur.
4 ou 5 personnes traînaient dans la gare et je me suis dit que peut-être l'un deux était Beauchamp mais en les regardant bien, je n'ai pas senti que quelqu'un était là pour traiter d'affaires louches. Ou alors Beauchamp allait-il arriver par l'un des prochains arrêts ? Mais le guichetier m'informa qu'aucun arrêt n'était prévu avant 19:00. Au cas où Beauchamp serait fidèle au rendez-vous, il ne viendrait donc pas par le train.
En attendant 16:00, j'ai erré aux abords de la gare. J'avais soif mais je ne voyais aucun bar à l'horizon. L'endroit était calme, il n'y avait pas d'activités et pour un peu j'aurais pu entendre les ronflements de l'ancienne patronne de l'hôtel.
Quand tout est silencieux à ce point, on entend comme un bruit de fond un peu comme celui qu'on entend dans le film Paris-Texas de Wim Wnders à un moment, comme si le silence total ne pouvait être. C'est le son du Cosmos, de l'univers ou celui des Langoliers me dis-je parfois.
A 16:00, je me suis rendu devant l'hôtel mais il n'y avait personne, juste une affichette scotchée sur la porte 'je suis passer un peu en avance et presser je n'ai pu vous atendre, je suis attendus au Congrès Fédéral au quartier de St-Caradec, cordialement, Beauchamp'. (j'ai laissé les fautes)
C'est quoi ce Congrès Fédéral à Saint-Caradec ? Je connais un peu Saint-Caradec, c'est un petit bourg pittoresque faisant partie d'Hennebont mais se situant sur la rive gauche du Blavet (ou droite, ça dépend si on situe en amont ou à Laval) . De nature calme, je commençais cependant à être agacé par ce qui commençait à s'apparenter à un jeu de pistes...et tout ça pour lui annoncer que je possédais l'argent qu'il ne me devait pas.
Il y a des jours où l'on se dit que ce monde ne tourne pas rond.
A suivre,
Loïc LT