en savoir plus : iciDepuis maintenant plus d’un siècle la planification urbaine n’a cessé de montrer son incapacité à contrôler à grande échelle la forme de la ville. Le phénomène de métropolisation contemporaine ne fait que renforcer cet échec : les fragments qui constituent l’archipel de la ville planifiée sont dispersés sur l’immensité de la ville spontanée.
Les photos d’Emmanuel Pinard rendent compte de cette difficulté à contrôler le territoire, en s’attachant à la description de lieux qui, dans le cadre de la dialectique de la planification, sont généralement considérés comme " non qualifiés ".
Leur indétermination formelle et programmatique les rend accueillants à des pratiques sociales multiples. Ces images représentent les traces de ces pratiques, ainsi que celle des limites physiques de la planification - la limite construite entre ville planifiée et formations spontanées.
Ces fragments de ville permettent, en rendant compte, d’une part, de la résistance des territoires à la planification, d’autre part, de la qualité positive de ces situations, de tenir un propos général sur la ville contemporaine à partir de situations locales choisies pour leur exemplarité.
Un séjour prolongé dans ces lieux conduit Emmanuel Pinard à une connaissance fine de leur configuration physique et de leurs usages. Ses images sont ainsi comme des précipités chimiques qui condensent les caractéristiques des paysages photographiés. Ce travail s’inscrit dans une lignée historique qui, depuis le XIXe siècle, met la rigueur de l’approche photographique au service de la description de la ville. Cette approche documentaire permet aujourd’hui de se saisir de la complexité des paysages de la ville contemporaine au-delà de leur caractère superficiellement chaotique.
par Eric Lapierre.