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cédric kahn

  • soirée ciné : l'économie du couple - Joachim Lafosse

    ob_36a984_capture.JPGSuis-je objectif lorsque je dis qu’il n’y a pas beaucoup de villes auxquelles on s’attache autant qu’à Lorient ? Sans doute pas, mais admettons que si. Je n’ai jamais habité dans cette ville portuaire, qui d’un point de vue architectural n’a rien pour elle puisqu’elle a été complètement détruite en 1944. Mais j’y ai fait deux ans d’étude, mes deux filles y sont nées, je suis fan de son équipe de football et pour des raisons diverses, je l’ai toujours considéré comme ma ville de cœur. Et c’est pour ça que ce soir, en sortant de la séance du cinéma, je me sentais bien alors que la nuit était tombée et que la vie nocturne avait pris le relais, une vie nocturne post-festival qui n’est pas pour me déplaire car je n’ai jamais pu supporter cette manifestation folklorique.

    Nous nous sommes donc rendus tous les quatre au Cinéville, les filles pour voir Insaisissable et Prisca et moi pour prendre une leçon d’économie. Bizarre dans un cinéma me direz-vous..Et bien le fait est que le film l’économie du couple porte bien son nom parce que son sujet principal consiste dans la problématique financière d’un couple en perdition. Les deux ex-amoureux, parents de deux jumelles de 6 ou 7 ans n’ont d’autres choix que de continuer à cohabiter ensemble car ils ne sont pas d’accord sur la part qui revient à chacun...elle, considère qu’elle a le droit aux deux tiers et lui pense que c’est 50-50. C'est la raison de tous les coups de gueule, parce qu’en dehors de ça, le désamour qui est présent dès le début du film ne nous est pas expliqué. Il y a juste lors d’une soirée où elle avait invité des amis que Marie dit qu’elle ne supporte plus Boris pour ce qu’il est, pour ses gestes, pour le son de sa voix etc etc. C’est épidermique, elle n’aime plus cet homme. Lui, par contre semble toujours amoureux d’elle et dans cette période de cohabitation fait comme si la vie continuait comme avant espérant peut-être qu’à force, elle reviendra sur sa décision. Mais son attitude désinvolte agace Marie qui a plus de caractère que Boris qui  ne baisse cependant  pas les bras. Les enfants sont malheureux, va sans dire et en fin de compte…. l’histoire semble bien banale.

    J’ai aimé ce film car le jeu des acteurs est juste, il n’y a pas de débauches de moyen (d’ailleurs l’essentiel des scènes se joue entre la cuisine et le salon), c’est un film qui colle à son époque et personnellement, c’est ce que je recherche dans le cinéma...qu’il soit au plus proche de la réalité. Dans la voiture, en rentrant, Prisca était plus réservée. Elle pense que le cinéma doit permettre de s’évader, de voir autre chose que ce que l’on voit au quotidien. Je respecte cet avis et je ne suis pas contre un James Bond de temps en temps. Mais je me suis régalé de toutes les scènes de ce film, un peu comme si je regardais un Sautet. Et c’est vrai que ça se répète un peu mais à chaque fois, comme dans un jeu d’échec, chacun tente d’avancer ses pions pour tenter de faire craquer l’autre. Dans ce “drame budgétaire’, la musique (le prélude en si mineur de Bach) est à l’image du film, c’est comme une ritournelle qui ne semble pas trouver sa conclusion un peu comme ce couple qui tourne en rond pour une question d’argent. Mais dans l’esprit du réalisateur, est-ce que “l’économie” n’était à prendre qu’au premier degré ? Je pense que non. Ce couple en crise avait-il la possibilité de faire l’économie de sa désunion ? Vers la fin, on constate un petit revirement. L’affection semble revenir. Marie accepte de prendre la main de Boris, accepte de danser avec lui et même, dans un moment de désir, de faire l’amour. Il ne manquait pas grand chose pour que ce couple se retrouve. Mais Marie avait dès le début, pris une décision ferme et n’a jamais voulu y revenir (d'ailleurs, on n'est pas dupe de ces soi disant week-ends qu'elle va passer seule chez son amie Lucie...là, c'est moi qui subodore -). Un moment, la mère de Marie dit quelque chose de très juste qu’on remarque d’ailleurs dans nos quotidiens : un peu comme on jette des objets qu’on n’a plus besoin ou qu'on renouvelle du  matériel non obsolète, de plus en plus les couples considèrent que l’amour est une denrée jetable, qui en appelle une autre....discutable.

    l’économie du couple, 2016. réalisation : Joachim Lafosse. acteurs principaux : Bérénice Béjo, Cédric Kahn, Marthe Keller. film franco-belge. ma note :4.5/5

    Loïc LT