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zones, Jean Rolin - passages choisis (1)

extrait du roman 'zones', page 63 : 

Qu'est-ce qui peut conduire un homme sain d'esprit à descendre d'un autobus de la Petite Ceinture à hauteur de l'arrêt Pont-National ? L'homme se trouve alors au milieu de rien, prisonnier d'un noeud de voies rapides qui ne lui laissent que peu d'espoir d'atteindre quoi que ce soit, pas plus la rive droite de la Seine, pourtant toute proche, que les voies ferrées de cette arrière-boutique de la gare de Lyon qui est désignée sur les plans comme la "gare supérieure de la Rapée". Or au milieu de ce dispositif si violemment hostile à la flânerie, et, comme insularisé par lui, il demeure pourtant tout un pan des anciennes fortifs, avec ses murs percés de quelques meurtrières et ses glacis herbeux plantés de grands arbres, et dans l'ombre de ces arbres on remarque une demi-douzaine de corps allongés à même le sol, déchaussés, environnés de sacs en plastique, comme rompus, désarticulés, par la misère, qui on ne sait trop pourquoi évoquent les suppliciés de la Semaine Sanglante, et cette chanson de l'époque où il est dit que "fleure rouge éclose sous la mousse, l'avenir pousse sur le tombeau des fusillés". Hélas, qui pourrait prétendre aujourd'hui que l'avenir pousse et , plus encore, comme une fleur rouge ?

429a3ecb7ee7a62d6d03dbc1e52068ff.jpgMoi je le prétends ! Même d'ailleurs, sur le bord des autoroutes, je ne vois que merveilles et promesses. Je dis puisque tout à l'heure, en rentrant de Normandie par la A84, je me surprenais à ma régaler des environs dévastés, industries désaffectées et zones diverses n'étant ni de la campagne, ni de la ville. Dans ces environs bocageux, on remarque aussi beaucoup de fermes isolées à l'architecture quelconque entourées de champs plus ou moins boueux avec des arbres morts ou pas de temps en temps.

Hélas, il est difficile de prendre des photos lorsqu'on roule à 130. Surtout quand on conduit et que déjà la main droite est occupée à zapper de stations de radio en stations de radios (puisqu'évidemment, dans ces non-lieux, on ne capte que dalle, si ce n'est des radios de djeunes déversant de la RNB dont on n'a que faire.

Sinon, Jean Rolin, chapeau.

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