Ce livre traînait dans ma PAL depuis pas mal de temps et il était toujours devancé par une autre lecture plus urgente. Mais là, ça y est, ce fut fastidieux mais je l'ai terminé. Mon impression à chaud est mitigée. Mi figue mi raisin. Avec le recul peut-être..il y a des livres qui sur le coup m'ont laissé de marbre mais qui se bonifient avec le temps qui passe qui me sépare de la lecture. (et d'autres, le contraire). A son actif, je dirais que ce roman a une vraie valeur documentaire pour qui veut s'imprégner de l'atmosphère et des pratiques du New-York friqué des années 80 (le héros principal, Russell, est éditeur dans une grosse maison d'édition et sa femme, Corrine est courtière en bourse). A son passif, je dirais que quand même, le style narratif est parfois un peu poussif (ou est-ce la traduction qui est moyenne...). Dans le genre, on préférera Auster. Il y a quand même des passages très poignants lorsqu'il est question des problèmes de drogue de Jeff, (l'ami du couple vedette), sa descente aux enfers, sa cure de désintox et les moments précédents sa mort (du sida). Sinon, on découvre sans surprise un milieu de l'édition perverti où règne la cupidité et le faux-semblant, un monde des finances impitoyable comme il se doit et les hauts et les bas de notre couple de jet-setters aussi beaux et sûrs d'eux l'un que l'autre. Au final, ça fait une histoire banale sur fond d'années Reagan, de sida émergent et de krack boursier d'octobre 87 (mais juste effleuré).
Quelques passages :
- Russell à propos de la Californie : ' Il ne voyait pas comment on pouvait être réellement sérieux dans quelques domaine que ce fût, quand le soleil brillait bêtement tous les jours.'
- déjà il y a 20 ans : ' au cours d'un dîner, la conversation roule le plus raisonnablement du monde sur l'art ou la vie sexuelle des célébrités et, brusquement, le mot "optimiser" sort de la bouche de quelqu'un comme un bout de gras recraché sur la nappe. Des gens cultivés se mettaient à transformer des substantifs en verbes - "cibler", "impacter" -, les idées et les opinions politiques ne tardaient pas à suivre. "On dira ce qu'on voudra de Reagan, mais..."
- un des seconds rôles à propos du mariage : 'On n'a pas encore inventé le genre de mariage qui me conviendrait, dit Washington calmement. Tu vois, je ne comprends pas pourquoi il ne devrait y avoir qu'un seul genre de mariage. Quand on cherche un logement, ça va de l'étage dans un immeuble en pierre de taille, au loft, en passant par le deux ou trois pièces dans une grande tour de verre avec club de gym, tout ça dépendant du style de vie qu'on a choisi, mais le mariage, il n'y a qu'un modèle de base. On est censé vivre en ménage, et dans la monogamie. Tu me suis. C'est la taille unique ? Jamais de la vie. Pourquoi est-ce qu'il n'y aurait pas différents modèles ? Tiens, distingué par des couleurs...mariage rouge, quatre nuits par semaine ensemble et les autres à draguer, mariage vert, on a des enfants ensemble et on les refile aux cousins impuissants...'
- Russell, à propos de l'art contemporain : 'Depuis les années vingt, personne ne veut plus être un des blaireaux qui ont sifflé Stravinski ou Duchamp. Voilà bien le grand héritage du modernisme - la peur de passer pour un plouc.'
note : 3.5/5