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Huis Clos : compte rendu d'un rendez-vous commercial

Hier soir, ayant besoin de rappeler un garage auto pour une raison qu'il me serait bien inutile de signifier (mais bon je peux le dire quand même : il y a 15 jours, un gros 4X4 conduit par une blonde quadragénaire distraite est venu emboutir l'aile avant gauche de ma petite 206 blanche alors que j'étais tranquillement arrêté à un stop), et ne me souvenant plus du numéro de téléphone, je cherche dans l'historique des appels et croyant trouver le numéro, j'appelle mais en fait je tombe sur une secrétaire de chez Huis Clos, boite bretonne qui fabrique des fenêtres et d'autres trucs du genre et dont la mission est d'accompagner le client dans son projet et de rendre son habitation plus confortable, plus économique et plus écologique pour toute la vie. En fait, il y a quelques jours, uen certaine Ophelie de la société Huis Clos nous avait appelé pour nous demander si nous étions satisfaits de leur service alors qu'en fait on n'a jamais fait d'affaire avec cette boite. Deux commerciaux sont effectivement venus chez nous il y a quelques mois, ils nous ont pondus un devis (bardage isolant pour le côté nord de la maison) que nous avons signé avant de nous rétracter quelques jours plus tard comme la loi nous l'autorise. Donc, il y a eu un bug, leur fichier clients est mal renseigné (à moins qu'il ne s'agisse d'une erreur volontaire afin de reprendre contact avec ceux qui ont failli devenir client et dont il ne manque pas grand chose pour qu'ils le deviennent. Avec ce type de boite, on peut s'attendre à tout).

Mais il faut que je revienne sur ce rendez-vous avec les deux commerciaux, parce que c'est une histoire qui vaut son pesant de cacahuètes. Début décembre 2011, je sors d'un supermarché et je me fais gentiment acoster par un commercial bcbg souriant et fraichement émoulu d'une école commerciale et qui tenait un stand Huis Clos itinérant. Il me demande si je connais cette boite, je lui réponds gentiment que oui et que d'ailleurs mon père avait fait refaire toutes ses ouvertures par Huis Clos et qu'il en était content. On discute de je ne sais plus quoi (j'avais du temps, ma pause-déjeuner de midi est assez longue) et je lui dis que je n'ai pas de fenêtres à changer (on vient de le faire) mais que par contre, nous envisagions plus ou moins d'installer un store banne sur la terrasse. Ça tombe bien, Huis Clos en fabrique et en pose. Le type m'en montre de magnifiques sur des prospectus en papier glacé et nous convenons d'un rendez-vous à domicile quelques jours plus tard. Le jour J arrive. C'est un samedi matin. Le commercial jeune et avenant  est accompagné d'un collègue paraissant sûr de lui, aguerri et tout. On sent clairement qu'ils ne sont pas venus ici pour beurrer des sandwichs. On s'installe. Des catalogues s'étalent sur la table, nous faisons part de nos envies et pendant que le compère aguerri prépare le devis en direct ,le jeune entreprend de nous présenter la société Huis Clos, son histoire, son fondateur, sa philosophie (ce dont nous n'avions que faire je dois dire mais on ne nous a pas laissé le choix). La présentation faite, le devis est terminé. Au niveau du timing, c'est parfait. Mais au lieu de nous en faire part, le type aguerri nous demande d'évaluer le montant. Drôle de procédé. Nous en n'avons aucune idée mais puisqu'il faut dire quelque chose, et bien voilà, prenons une fourchette haute, allez..2500€. Le type retourne son devis et là, le chiffre apparait : 6500 euros, tout compris, pièce et main d'oeuvre. On n'en revient pas. Je trouvais 2500€ déjà très cher (mais nous avions choisi un beau store banne (pas électrique) et à coffre intégral mais bon quand même)..alors 6500€.. L'aguerri, voyant notre surprise nous dit " c'est vrai qu'un store banne à ce prix-là, ça fait cher..mais vous nous aviez pas parlé en arrivant de problèmes d'isolation côté nord ? Vous connaissez le principe du bardage isolant ? Attendez je regarde un truc....(il grifonne vite fait quelque chose sur son bloc note)...voilà, et bien pour le prix d'un store banne, on vous propose de faire toute l'isolation du côté nord de votre maison. Ah bon, répond-on naïvement ! L'isolation par l'extérieur pour le prix d'un store banne ? Effectivement, c'est intéressant s'esclame-t-on en choeur ! Donc hop, on abandonne l'idée du store banne,  il refait un devis, ça met un peu de temps...comme le jeune nous a déjà présenté l'entreprise (suite à quoi  il nous a demandé de lui confirmer que la société Huis Clos nous paraissait sérieuse), on discute de tout et de rien avec lui, on plaisante plus ou moins, on parle de la tempête de la veille (Joachim) qui nous a privé de courant (cela durera jusqu'au dimanche soir). Et puis, le devis est enfin prêt. Il nous présente un devis à 7500€ pour un bardage extérieur. C'est trop élevé par rapport à ce qu'il avait promis, il en convient. Et nous arrivons là à l'étape du coup de fil au directeur, le fameux coup de fil au directeur, ce type qui nous connait ni d'Adam ni d'Eve mais qui va consentir 'parce que c'est nous' à faire gros effort sur le prix. Et là, l'astuce, c'est que Huis Clos ayant pris contact avec moi à la sortie d'un supermarché et bien il existe pour cette journée de standing dans le hall d'accueil en question, des enveloppes de réduction ou un truc dans le genre et au bout de la ligne le directeur confirme qu'il reste pour la journée en question une enveloppe, une seule,  non distribuée de 1000€ et qu'elle est pour nous ! 7500-1000 : 6500€ ! pile poil le prix du store banne. Merveilleux ! Prodigieux même ! Comment ne pas signer un devis si intéressant ? Nous allons résoudre tous nos problèmes d'humidité pour le prix d'un vulgaire store banne. Nous signons donc. Les types se barrent. Misson accomplie. J'imagine que dans la clio blanche, on se tape dans la main, on se congratule, "on les a eu ces gogos, aussi facile que des vieux".

La nuit suivante, l'électricité n'est toujours pas revenue. Toute la nuit, j'alimente le feu. Nous dormons mal. Nous nous levons au milieu de la nuit pour prendre un café au salon. Quelque chose turlupine Prisca. Elle ressort le devis, quelque chose la gêne. Elle me dit qu'elle a clairement l'impression qu'on s'est fait arnaquer. un store banne à 6500€ quand même (ce n'est pas ce qu'on a acheté mais bon c'est sur sur cette base de prix qu'on a jugé l'offre de bardage isolant intéressante). Sans internet, nous fouillons dans des catalogues divers. Les stores bannes les plus chers qu'on peut trouver sont à 2500€ ...comme l'installation est un jeu d'enfants, allez, ça fait un total de 3000€ pour un store banne encore plus sophistiqué que celui que Huis Clos nous proposait. Mais alors pourquoi le type aguerri a-t-il volontairement gonflé le prix d'un store banne au risque de perdre sa vente ? Le pot aux roses se dévoile au coeur de la nuit. La stratégie des deux types était celle-ci : ils savaient qu'on n'allait pas acheter un store banne à ce prix mirobolant, d'ailleurs quand ils sont venus chez nous, ils n'avaient pas l'intention de vendre un store banne, ce n'est pas intéressant comme vente...l'idée, c'était de nous faire croire qu'on pouvait faire d'autres travaux conséquents (et plus rentables pour Huis Clos) pour le prix d'un vulgaire store banne. Technique : présenter un devis gonflé qui sera évidemment rejeté par le client  et rebondir sur ce devis et dire que pour le même prix, c'est à dire pour le prix d'un modeste store banne, on peut vous faire ça...ils retombent  sur leurs pieds en appelant le directeur (ce qui se fait à chaque rdv) qui consent à un effort mais à condition que le futur client signe sur le champ..l'enveloppe ne sera plus disponible après aujourd'hui. La boucle est bouclée, le client est cerné, le tour est joué, il signe. 

Quelques jours plus tard, on annule la commande par recommandé et on demande aux types de repasser nous voir pour des questions complémentaires et sans leur dire qu'on avait annulé la commande. Le type aguerri arrive un soir, tout seul. Chaussures à bouts pointus reluisantes, tenue correcte, grosse malette, mais le type a l'air moins sûr de lui que l'autre jour. Pour un commercial, une vente est une vente, après on passe à autre chose. Qu'est ce qu'ils me veulent les deux naïfs de Camors ? On s'installe, on est un peu gêné parce que l'ambiance était tellement bon enfant l'autre fois, on était presque devenus copains. On avait prévu avec Prisca de lui dire nos quatre vérités mais en fait, on est resté courtois, on lui dit qu'on a annulé la commande parce que nous n'avions pas les moyens de payer et que nous avions des doutes sur une de ses affirmations (parce que je n'ai pas tout dit : il nous avait affirmé que nous avions le droit à un crédit d'impôt bien que nous avions atteint le plafond quinquenal parce que les compteurs avaient été mis à zéro pour le tout le monde...en fait, on a vérifié et on a rien trouvé et quand on lui a dit ça, il a fait son surpris, il a encore appelé son directeur qui n'a pas pu le renseigner..ce qui est dingue quand même. C'était un mensonge en fait car lors du premier rdv, pour enfoncer le clou à la fin, il nous avait affirmé que le chantier nous reviendrait à moins de 5000€ en déduisant les aides d'état auxquelles nous avions droit..or, il savait pertinemment que nous n'en avions pas le droit...mais il s'en foutait de nous mentir, ce qu'il voulait c'est qu'on signe point barre). Pour ce second rendez-vous, on est resté donc sur des considérations financières. Mais à la fin, il n'en menait pas lourd. Tout seul, c'est pas pareil qu'à deux. . J'ai quand même fini par lui demander "et des stores bannes à 6500€, vous arrivez à en vendre ? Il me murmure deux petits 'oui oui'. Ah bon, je rétorque, et je lui fais brièvement part de mes recherches comparatives. Le rdv a assez duré. Il se lève et nous dit que la prochaine fois, si on pouvait éviter de faire déplacer les gens pour si peu....l'ambiance est devenue glaciale mais nous sommes restés courtois. Le type s'en va la queue entre les jambes. 

En relisant tout ça, je réalise que c'est une histoire assez banale en fait. Les stratégies commerciales sont bien huilées et nombre de gens y succombent. Même si on a bien réagi avec Prisca, on s'en est voulu un peu d'avoir été si naïfs dans un premier temps. Au fait, bien que ce que j'ai écrit semble aller dans le détail, je n'ai pas tout dit du premier rendez-vous (leur système de financement dont je n'ai rien compris, cette façon aussi de voir en madame la femme qui gère les finances et en monsieur celui qui a les compétences techniques, et j'en passe...),  un modèle dans le genre du rdv tel que Huis Clos les conçoit. Je suis d'ailleurs tombé sur un compte rendu assez effrayant réalisé par quelqu'un qui a également accueilli des commerciaux de chez Huis Clos mais qui ne s'est pas laissé faire. Cela ressemble étrangement à ce que nous avons vécu. Le titre est bien trouvé, Huis Clos c'est l'enfer. 

Commentaires

  • Je comprends tout cela. La naïveté première vient du fait qu'on est honnête et fichtrement incapable -si on n'est pas d'abord renseigné par qques précédentes victimes- de penser que de telles stratégies pour piéger autrui puissent exister. C'est cela aussi notre parcours de terrien vivant dans une société de consommation : il nous faut rencontrer des méchants déguisés en gentils pour nous obliger à changer le regard sur le monde qui nous entoure, puis nous forcer à évoluer. C'est comme dans les contes initiatiques de notre enfance. En fait, ces sinistres expériences qui nous chamboulent sur le moment (il est vrai qu'on se sent vraiment bête d'avoir aussi bien répondu à l'appel des sirènes)sont riches en apprentissages sur nous, sur le cynisme environnant. On ne peut que se féliciter d'avoir rencontrer cet obstacle, jurant qu'on ne nous reprendrait plus
    Après je m'interroge : selon quels mécanismes succombons-nous ? Comment expliquer cette fièvre qui nous vient soudain au moment de la transaction ? C'est comme si -n'étant jamais tout à fait dupes- une force nous poussait à satisfaire le malfaiteur. C'est étrange, il faudrait voir l'interprétation qu'en fait la psychanalyse. Cela doit être une forme de masochisme bizarre.
    A l'instant, je viens d'avoir au téléphone un représentant de Maximo qui voulait me questionner, je me suis empressée de raccrocher, le coeur battant de l'audace prise à chaque fois pour déjouer le piège. L'autre jour, à l'entrée d'un supermarché, un représentant de France Loisir (et oui, ça existe toujours, je n'en reviens pas !) se jette sur moi, et après qques minutes où je reste courtoise, j'explose...Il m'a fallu toute la journée pour m'en remettre ! Quels mécanismes sont à l'oeuvre ici ? Je l'ignore. Qu'en à ceux de HC, ils n'ont pas franchi le seuil de notre maison : les voir arriver à 2, gagnants comme ça, d'emblée, j'ai regretté fortement d'avoir accepté le rdv je n'ai pas supporté, je les ai renvoyés sur-le-champ, oust ! J'étais pâle, tremblante, au bord de la syncope. Cela touche à quelque chose de très intime chez chacun, je pense. Au fait, feras-tu le cr des Lisières ? Allez, s'il te plaît. Sinon, j'arrive, avec ma stratégie implacable...

  • Nous sommes une foule sentimentale. On a peur de décevoir et puis on a toujours cette impression que le professionnel qui essaie de nous vendre un truc est mieux que les autres, plus humain,on imagine sa vie de famille, qu'il est comme nous etc. Mais tout le monde n'est pas si naïf. Bcp n'ont pas tant de scrupules.
    Moi, je vois l'autre jour, j'essayais une belle chemise en lin à Concarneau, une chemise dont je n'avais pas spécialement besoin mais sur l'instant ça m'embêtait de décevoir la vendeuse, je me disais 'si ça se trouve c'est sa seule vente de l'après-midi et je vais lui gâcher la soirée si je n'achète pas. Je me fais toujours des films. On est trop bon dans la famille. Je suis toujours obligé de forcer ma nature pour dire 'ba non, je n'achète pas'. C'est ce qui est arrivé pour la belle chemise en lin (j'en avais quand même essayé pas mal, obligeant la vendeuse à se démener, à déplier, à replier et à remettre en rayon) et je lui ai finalement dit 'désolé, mais je n'ai pas le coup de coeur'.

    Le compte rendu des lisières est fait depuis longtemps (la liste à gauche n'est pas à jour). Je viens de le relire et je le trouve pas génial. Un peu court et encore une fois, loin de retranscrire le fond de ma pensée.
    le lien : http://doelan.blogspirit.com/archive/2012/10/24/cr238-les-lisieres-olivier-adam.html

  • S'il y a des gens que je ne supporte pas, ce sont bien les commerciaux. Ils sont prêts à tout pour réussir une vente, sans ne rien connaître à ce qu'ils vendent. Beaucoup de noirceur se cache derrière ces costumes et ces chaussures cirées.

  • Pas forcément TOUS, si ? Mais une majorité sans doute. A huis Clos, c'est très spécial, tous les commerciaux utilisent la même méthode imposée par la direction. Je crois qu'ils appellent ça 'R1' ou One Shoot(ne pas quitter la maison sans avoir faire signer parce que les 2 vendeurs ont raconté tellement de conneries que si on laisse les gens réfléchir plusieurs jours, y'aura pas de vente). C'est un foutage de gueule organisé, une technique bien huilée.

  • La société Huis Clos a été placée en redressement judiciaire.
    http://www.quechoisir.org/commerce/methode-de-vente-abus/actualite-huis-clos-en-redressement-judiciaire

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